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228.
Alfred de VIGNY
. L.A.S., 7 février 1857, au vicomte Jehan de
C
lérambault
, à Pau ; 5 pages et demie in-8, adresse (petits
trous d’épingle, un coin un peu rogné sans perte de texte, mouill. au f. d’adresse).
400/500
B
elle
lettre
évoquant
les
P
yrénées
,
et
l
’
impératrice
E
ugénie
.
Il accuse son cousin d’être un « enfant gâté de la Fortune », ayant une fille si jolie, qu’il lui souhaite de « gagner au terrible jeu du
mariage un protecteur, un ami, un compagnon de sa vie qui ne soit pas un maître et en qui l’adoration qu’il aura pour elle s’accroisse
par la contemplation de toutes ses petites grâces »… Il espère voir l’enfant à son passage à Paris… Il évoque le « froid des belles Pyrénées.
Quoique je les aie chantées et dessinées, j’ai toujours pensé, au fond du cœur, et malgré les géographes qu’elles étaient situées en Écosse.
Paris est bien plus chaud »… Il est allé à « un bal peu nombreux donné dans les appartemens de la jeune Princesse dont tu parles et qui
ne cesse de se faire adorer pour les trois charmes particuliers qui sont réunis en elle, la rêverie Anglaise, la gravité Espagnole et tout à
coup l’enjouement Français. C’était l’anniversaire de son mariage et du jour où l’Empereur a dit à la France :
je l’aime et je l’épouse. Je
serai plus fort étant plus libre
. – Aucun scrupule de gendre n’a suspendu la marche de notre drapeau et il a repris enfin sa place »… Vigny
regrette de ne pas connaître le duc d’Hamilton : « je voudrais le voir ici comme Lord Holland avec qui j’ai dîné il y a quelques jours et
Lord Herfort qui passa huit jours avec moi dernièrement à Compiègne en très-bonne compagnie au temps des chasses »…
229.
Auguste de VILLIERS DE L’ISLE-ADAM
(1838-1889). L.A.S., Bruxelles 4 mars 1888, [à Émile
P
ierre
] ; 1 page in-4,
en-tête et vignette du
Café du Grand Hôtel
(fentes réparées au verso au papier gommé).
250/300
Il est allé en Belgique donner des conférences : « oh ! ce n’est pas très-argentifère, – à cause du froid ! […] Sans le froid, j’avais en dix
jours, 1.500 francs de conférences. J’ai eu ici de grands succès de presse et de
futur
: pour la fin d’été prochain. Mais quelle nourriture
immonde ! Quels appartements de 200 mètres ! Des cabinets d’aisance de 10 mètres, et un froid de 12 degrés constants sans calorifère.
[…] Je pars pour Gand demain, vociférer pour 200 francs diverses âneries ». Il signe : « ton inutile et lugubre ami Villiers »…
230. [
VOLTAIRE
(1694-1778)].
M
anuscrit
,
Mémoires secrets de Voltaire
, fin XVIII
e
siècle ; 183 pages petit in-4, cousues
en un gros cahier (1
ère
page salie et brunie, légère mouillure en haut des feuillets).
800/1 000
C
opie
des
célèbres
M
émoires
rédigés
par
V
oltaire
en
1759,
et
dont
quelques
copies
manuscrites
circulèrent
avant
la
première
édition
en
1784
; on a recensé une dizaine d’exemplaires manuscrits. Cette copie est soignée, d’une belle main ; elle s’inscrit élégamment
dans des cadres estampés sur papier vergé, à la marque de Jan Kool (fabriqué entre 1777 et 1812).
Dans ce texte autobiographique et plein d’esprit, Voltaire évoque Madame du Châtelet, « la femme de France qui avait le plus de
dispositions pour toutes les sciences », mais surtout le roi Frédéric II de Prusse que l’on voit s’affronter avec son père, faire la guerre,
correspondre avec Voltaire, et l’inviter auprès de lui : « Le moyen de résister à un roy victorieux, poëte, musicien et philosophe, et qui
faisait semblant de m’aimer ! Je crus que je l’aimerais ; enfin je repris le chemin de Postdam au mois de juin 1750 ». Mais Voltaire finit
par quitter le roi et trouve consolation auprès de sa nièce Madame Denis avec laquelle il s’installe à Genève. Sont cités des lettres et
des vers de Frédéric, que Voltaire ne manque pas de critiquer. Le manuscrit fait état des dissensions politiques en Europe, où Voltaire
semble jouer un rôle primordial ; il sert d’entremetteur entre le roi de Prusse, la margrave de Bayreuth sa sœur et le cardinal de Tencin,
qui veut réconcilier la France et la Prusse, projet voué à l’échec. Le manuscrit reprend aux Délices en 1759, où Voltaire a trouvé liberté
et repos, mais ne peut s’éloigner des intrigues et se mêle encore de vouloir réconcilier la France et la Prusse, qui se battent autant « à
coups de plume qu’à coups d’épée »...
231.
Émile ZOLA
(1840-1902). 2 L.A.S., Médan 6 et 24 juin 1881, à Joris-Karl
H
uysmans
; 3 et 2 pages in-8 (deuil) (onglets,
légères fentes aux plis réparées).
1 200/1 500
I
ntéressante
correspondance
amicale
et
littéraire
,
sur
la
préparation
de
P
ot
-B
ouille
.
Médan 6 juin 1881
. Il remercie Huysmans de ses « bons renseignements » (sur les architectes diocésains), mais demande encore des
précisions : « Mon architecte, d’une importance médiocre, habite Paris, rue de Choiseul sans doute, et se trouve être de la paroisse de
Saint-Roch. Si j’en fais l’architecte du diocèse d’Évreux, par exemple, pourrai-je l’employer à des réparations dans l’église Saint-Roch ?
Ce serait sans doute lui donner une trop grande situation que de le prendre pour Paris ? Voyez pourtant s’il n’y aurait pas moyen,
s’il n’existe pas à Paris des architectes de paroisse, et quels seraient alors leurs appointements, leurs occupations, etc. Autrement, si je
dois m’en tenir à mon diocèse d’Évreux, voyez à m’avoir quelques détails complémentaires, sur les voyages à faire, les rapports avec le
clergé, etc. – Mais je préfèrerais mille fois Paris ». Il se souvient aussi qu’il lui avait parlé d’un pauvre employé qui
recopiait la nuit des cours pour les élèves de l’École centrale, et il demande des détails précis : « Quels sont ces
cours, pourquoi les faire recopier ? Enfin, puisque vous avez été collectionneur de timbres-poste, pourriez-vous
m’en décrire trois ou quatre très rares (timbres du Cap) et trois ou quatre ordinaires ? C’est pour compléter les notes
que vous m’avez déjà données ». Il le remercie de son aide : « Je travaille, j’ai fini d’arrêter mon plan, dont je suis très
satisfait, chose rare. Prochainement, dès que j’aurai toutes mes notes, je vais me mettre à l’écriture »…
24 juin 1881
. Il le remercie pour l’envoi d’informations sur l’église de Saint-Roch et les maisons adjacentes :
« J’avais l’extérieur des deux maisons, mais je n’osais pas trop me risquer. Ce que vous me dites me suffira à rêver le
reste. Pourtant, si par hasard votre ami lâchait des détails plus précis sur la vie de ce petit monde, vous me donneriez
ça de vive voix, lorsque vous me ferez le plaisir de venir me voir. Je fais mes trois petites pages par jour, ce qui est
mon train-train habituel ». Il séjournera à la mer en août et septembre, où il tâchera « d’abattre de la besogne ». Il
plaint Huysmans, « réduit au séjour à la campagne que vous n’aimez guère, je crois. Le déplacement sera ennuyeux,
mais vous travaillerez mieux peut-être. […] Je trouve l’été mélancolique : voici pour moi la saison noire »…