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que ce devoir ! Toute ma faculté pensante en est paralysée. Les délicieux voiliers qui frôlent à chaque instant nos rochers me donnent

l’envie de planter tant d’ennuis et de soucis sur quelque grosse pierre et de pousser au large vers l’île de Robinson. L’idée de rentrer

à Paris m’est odieuse »… Il partira pour Grasse en fin de semaine « avec l’idée vague (si je prolonge) de revenir enfin (pour traîner un

peu) à Roquebrune, […] chez les

B

ussy

qui m’y verraient avec joie. Mon portrait commencé par lui était en belle voie. Les choses que

vous m’écrivez ne sont pas plus gaies que celles que je reçois d’autre part de Paris. Les affaires et les enfants – sans compter les grandes

personnes – tout est contre l’esprit. Je ne parle pas du cœur dont c’est le métier d’être torturé »…

[28 novembre 1928].

Nouvelles de sa santé : « Il y a du mieux, et même un mieux très sensible du côté douleur. Le mouvement demeure

limité quoique bien plus libre ! Mais V.R. que j’ai vu hier me laisse entrevoir que je ne puis m’attendre à avoir jamais une extension

et une rotation de ce membre bien développées. […] Aujourd’hui, en dehors de cette chose locale, je ne me sens pas du tout en train.

Neige, peut-être, dans l’air, et les soucis… Enfin, je suis comme dans un brouillard et me sens excessivement faible. Il paraît que je sème

le phosphore, mais de la mauvaise façon. […] Et les raseurs m’assiègent ! Préface par-ci ! Préface par-là ! Le cerveau nul et déphosphaté

les regarde béant…et ne dit rien »... Il signe « Pierre du Roc de Four à Chaux ».

224.

Jules VALLÈS

(1832-1885).

M

anuscrit

autographe, [1872] ; 1 page in-4.

100/150

N

otes

préparatoires

pour

sa

pièce

L

a

C

ommune

de

P

aris

.

Liste de personnages fictifs ou réels (« Peintres indépendants / Chabrillot /

Spuller », « les jeunes auteurs en vers », la Cour des Comptes, le juge d’instruction…), bribes de répliques (« Je suis la magistrature »…),

indications de faits, de références ou d’éléments divers (« lettres de menaces », « Manet –

Un bar aux Folies Bergères

 », « combat », « la

magistrature des puissants », « l’homme à la ceinture de cuir et l’homme blessé », « abolition des titres de noblesse »)…

225.

Paul VERLAINE

(1844-1896). L.A.S., Lunéville 9 novembre 1893, à sa maîtresse Philomène

B

oudin

 ; 1 page et quart

in-8.

800/900

L

ors

d

une

tournée

de

conférences

en

L

orraine

.

Il repartira pour Paris le lendemain « par le

rapide

 ». Il la prie de venir l’attendre à

la Gare de l’Est. « Ma conférence d’hier soir [à Nancy] a complètement réussi. La salle était pleine de beau monde et les journaux m’ont

été favorables. J’espère qu’il en sera de même ici. Quant à l’argent, j’en rapporterai je pense quelque chose comme cent francs et plus.

J’ai écrit à

Z

ilcken

et fait écrire à Blok par Nathan qui est avocat en cour d’appel. Et puis il y a encore

Le

Figaro.

Et mon voyage de

demain, grâce au permis, me coûtera 1 franc pour le wagon à corridor. J’écris par ce courrier à Londres et à Oxford, demandant cent

francs d’avance au cas où Blok et

Le Figaro

ne donneraient rien. Enfin tout va bien. […] Je t’embrasse de tout mon cœur comme je t’aime,

chère femme adorée »…

226.

Alfred de VIGNY

(1797-1863). L.A.S., 8 décembre 1835, [à Charles

M

ichel

] ; 3 pages in-8 à son chiffre couronné.

500/600

B

elle

lettre

à

un

homme

qui

veut

se

suicider

[sur la lettre qu’il avait reçue de Charles Michel, Vigny a noté : « Suicide que j’ai eu le

malheur de ne pouvoir empêcher »].

« Je suis vivement ému de ce que vous souffrez [...] sans vous connaître et sans vous avoir vu, si j’avais la somme dont vous avez besoin,

je vous l’enverrais à l’instant, sans examen, car votre lettre est douloureusement vraie, mais je n’ai pas même la fortune de l’autre Poète

dont vous parlez et

Chatterton

fut un plaidoyer que j’adressai à la France entière, en faveur des malheureux jeunes gens que j’avais la

douleur de ne pouvoir secourir moi-même et que je voyais prêts à succomber. Votre devoir est de résister à la mauvaise fortune, [...] en

vivant, en travaillant avec courage et en repoussant l’idée criminelle et égoïste qui vous poursuit. Vous n’avez pas le droit de dire à la

Société qu’elle vous méconnait puisque vous n’avez fait aucune œuvre importante encore. Si vous vous sentez propre à une carrière tant

soit peu lucrative, je ferai mes efforts pour vous en ouvrir l’entrée, mais c’est malheureusement tout ce que je puis faire au milieu des

chagrins dont je suis accablé moi-même »...

Correspondance

, tome 3 (35-169).

227.

Alfred de VIGNY

. L.A.S., 30 novembre 1845, au vicomte Jehan de

C

lérambault

, au château de Kimkampois près de

Liège ; 4 pages in-8 très remplies, adresse avec cachet de cire rouge (légère mouillure sur la 1

ère

page).

400/500

B

elle

lettre

à

son

cousin qui

vient

d

avoir

une

fille

(Jehanne de

C

lérambault

est née le 31 août 1845).

Il avait « reçu une lettre charmante toute pleine d’un esprit gai et d’un cœur joyeux, lettre d’un jeune père tout blond qui m’apprenait

que son garçon était une fille, que ma jolie cousine Valérie était couchée sur un lit surmonté d’un trophée d’armes et que sa fille serait

nécessairement une amazone, à voir la quantité de sabres d’abordage et de lances qui l’entouraient ». Vigny s’amusait de sa lettre, alors

que Jehan assurait qu’il aurait un fils. Mais il a reçu la nouvelle de Djemmâ-Ghazaouat (sanglante embuscade tendue au Maroc par Abd-

el-Kader) : « Au milieu de toute cette horrible trahison, le 2

e

Hussards me frappe la vue ». Craignant que Charles, le frère de Jehan, ne

soit parmi les officiers tués, il court au ministère, puis va rassurer leur mère. Depuis, il a repoussé le moment de répondre : « J’ai dit

tous les jours à ta petite lettre : je te répondrai demain ma chère amie et je n’en ai rien fait. J’étais encore attristé de l’idée d’écrire : ta

fille est née et de penser : ton frère est mort. Nous sommes tous rassurés. […] Mais c’est égal le bouquet de la naissance m’est tombé des

mains au moment où je te l’envoyais, je n’ai pas pu le ramasser. […] Tu verras comme je gâterai ta fille. Je lui dirai qu’elle a bien fait de

ne pas être un garçon et de se nommer Jehanne de Liège et qu’elle a bien fait aussi de vouloir que son père demeurât auprès d’elle au

lieu d’aller revoir la mer qui ne le reconnaît plus. […] Eh bien ! moi aussi je te boude, je ne serre la main qu’à ton aimable beau-père, je

baise la main de ta Valérie et le front de Jehanne de Flandres. Puisque c’est une amazone elle fera des conquêtes »...

Correspondance générale

, tome 5 (45-126).

Littérature