59
avoué, lorsque je questionnais avec sollicitude et indulgence, quelques dettes que l’on ne m’a confessé que lorsqu’on a prétendu me les
faire payer. Je n’ai voulu autoriser un emprunt sur la dot de ma fille, qu’à la condition d’en savoir et d’en surveiller l’emploi. On me fait
un grand crime de cela, et moi, je crois avoir rempli mon devoir. On s’est pris en outre d’une folle jalousie pour ma pauvre Augustine
[
B
rault
, que Sand a adoptée] qu’on a abreuvée de chagrin et la vie commune est devenue intolérable dès le premier essai. J’ai été et je
suis encore très malade de ces malheurs domestiques dont la cause n’emportait certainement pas les résultats. La crise dans laquelle
mon gendre s’est placé n’avait rien de grave en elle-même. Ses dettes n’étaient pas exhorbitantes et rien n’était plus facile que d’en sortir
sans colère et sans bruit. Mais son cerveau est aussi faible qu’exhalté, et celui de ma fille est beaucoup trop entier »... Et le 22 novembre
1847, après une entrevue douloureuse avec Solange : « ces malheureux enfants, qui sont réellement fous à l’heure qu’il est, sont bien
méchants dans leur folie. Ils ne respectent rien ni personne. Pour un peu, ils m’accuseraient de friponnerie moi-même. Ils m’ont fait
bien du mal, ils m’en font encore et ils m’en feront toujours »... Elle sera soulagée d’apprendre la séparation de biens entre les deux
époux, en juillet 1848.
Au début de 1849, elle est « sans argent », et presse Falampin de régulariser l’affaire de la rente qui lui revient de son demi-frère
Hippolyte Chatiron, et celle de l’arrêt rendu par la Cour de cassation à son profit contre la commune de Nohant-Vic. En mai, elle veut
liquider l’inscription de rentes sur l’État au profit de son fils, mais se heurte à des difficultés avec le Trésor…
En 1850, elle hésite à s’inscrire à la Société des Auteurs dramatiques : « J’ai dans l’idée que c’est un coupe-gorge, mais enfin puisqu’il
n’y a pas moyen de l’éviter je signerai quand on me mettra en mesure de le faire »… Elle s’inquiète de l’annonce d’une
Petite Fadette
aux Variétés. Elle le charge d’empêcher les représentations de
François le Champi
, pour garder ses droits sur la pièce ; il doit également
vérifier les recettes déclarées par les théâtres pour lui payer ses droits... Devant prendre un nouveau fermier, elle prie Falampin
d’examiner les garanties des personnes qui se présentent.... Elle le pousse à réclamer le paiement de l’amende à laquelle la Société des
Gens de lettres a été condamnée contre elle : « Je ne suis pas intimidée de leurs injures »… Elle le prie de se renseigner discrètement « sur
la situation actuelle d’une ancienne femme de chambre à moi dont la fille est ma filleule et que je secours depuis de longues années sans
trop savoir si je ne suis pas exploitée »… Le 24 mai, elle se plaint de la lenteur avec laquelle Falampin répond à ses questions, et elle se
demande s’il veut continuer à se charger de ses affaires…
En février-mars 1851, ayant besoin d’argent après avoir fait de grands travaux à Nohant, elle charge Falampin de récupérer l’argent qui
lui est dû sur les représentations de
Claudie
à la Porte Saint-Martin et la reprise de
François le Champi
à l’Odéon ; elle surveille de près
et conteste les comptes fournis par les agents dramatiques. Elle le prie de trouver « un bon sujet, homme ou femme, qui saurait faire
la cuisine passablement », pour remplacer sa cuisinière qui se meurt. Elle lui demande aussi de récupérer à la
Revue des deux mondes
le
manuscrit de son roman
Le Château des Désertes
, qui doit lui être rendu après la publication.
En janvier 1852, elle charge Falampin de renouveler son abonnement à
La Presse
, et lui recommande de ne pas donner son adresse
parisienne, 3 rue Racine : « Je me cache comme toujours, pour éviter les ennuyeux mais non pour cause de danger »…
Le 19 décembre 1854, elle envoie son article sur les
Visions de la nuit dans les campagnes
, avec « six bois » de son fils : « Maurice vous
demande de faire graver avec un peu plus de soin que de coutume, de ne pas faire trop charger les fonds et noircir les transparences, afin
de laisser détruite le moins possible ses petits effets nécessaires aux sujets »…
Elle accuse réception d’envois d’argent, ou charge Falampin de diverses commissions ou paiements : achat de plumes, commandes de
livres, vin de champagne, notes d’épicier, paiement d’un livre sur la
Flore du centre de la France
, etc.
Correspondance
(éd. G. Lubin), t. XXV.
Ancienne collection du Colonel Daniel
S
ickles
(XVII, n° 7663, 25-26 octobre 1994).
210.
George SAND
. L.A.S., Nohant 2 mai [18]52, [à l’acteur Henri
L
afontaine
] ; 4 pages in-8 très remplies d’une petite
écriture à l’encre bleue (petites fentes réparées au papier gommé).
800/1 000
B
elle
et
longue
lettre
sur
sa
pièce
tirée
du
roman
M
auprat
et
sur
le
théâtre
de
N
ohant
.
« Mon cher enfant, il est vrai qu’un
Mauprat
m’a été demandé à la Porte St Martin et que j’ai
promis, mais tout cela sans traités et sans écrits
directs
. […] j’ai promis le rôle de
Mauprat
à
B
ignon
qui est mon ami, et qui seul, dans la composition
de la troupe avant votre projet d’engagement,
pouvait jouer ce personnage. Mais que cela ne
vous décourage pas de jouer dans la pièce, car je
ne fais pas qu’un rôle, vous le savez, dans une
pièce, et quand elle sera faite vous choisirez le
meilleur en dehors de celui-là. Même en la faisant
je songerai à vous particulièrement pour faire
valoir votre talent auquel j’ai confiance, vous le
savez, et que je tiens de tout mon coeur à mettre
sur la ligne qui lui convient ». Elle évoque sa pièce
Maître Favilla
pour les Variétés, puis le directeur
de la Porte Saint-Martin Marc Fournier, qui est
un personnage « glissant dans les mains ; il m’a
fait déjà un beau tour de son métier. N’importe,
puisque la destinée des artistes est d’être floué
Littérature
… / …