49
162.
Camille MAUCLAIR
(1872-1945).
M
anuscrit
autographe signé,
L’Art de Mrs. Archer M. Huntington
, [1933]
; 10
pages in-4.
100/150
S
ur
la
sculptrice
américaine
, A
nna
H
yatt
, femme du mécène Archer
H
untington
(paru dans le n° 41 du
Manuscrit autographe
)
.
« L’art n’est-il pour ces peintres et sculpteurs des États-Unis qu’une distraction, un luxe, un amusement d’ordre supérieur sans racines
dans la vie même ? […] Non. Une conscience et une vocation qui veulent irrésistiblement s’exprimer et exprimer une race »…
163. [
Guy de MAUPASSANT
(1850-1893)].
Léon FONTAINE
(1816-1892) dit «
P
etit
B
leu
». 2
manuscrits
autographes (le
1
er
signé « Petit Bleu »), sur Guy de
M
aupassant
; 38 pages in-4 et 22 pages petit in-4.
600/800
T
rès
intéressants
témoignages
sur
M
aupassant
,
rédigés
par
son ami
intime
L
éon
F
ontaine
,
dit
« P
etit
B
leu
»
; précieux témoignage sur
leur jeunesse, sur la vie de « Joseph Prunier » (surnom de
M
aupassant
)
, puis sur son déclin et sa fin tragique, mais aussi sur ses œuvres.
Le premier manuscrit (38 pages, incomplet du début, paginé 5-39), signé en fin « Petit Bleu », probablement rédigé en vue d’une
causerie avec Pierre Borel, a dû servir à la rédaction du livre
Le Destin tragique de Guy de Maupassant
, publié sous les noms de Pierre
Borel et « Petit Bleu » (Les Éditions de France, 1927). Il présente des ratures et corrections, des annotations marginales, et des variantes
avec le texte publié.
Le manuscrit commence lors de l’évocation du Casino d’Étretat : « Prunier et ses camarades y avaient leur “ardoise” et Joseph n’était
pas exigeant pour le règlement des parties de billard et des bols de punch »... Fontaine raconte ensuite les excursions que le chef
incontesté de la bande, Prunier (Maupassant), qui connaissait « dans les moindres replis la Côte où il avait été élevé », leur faisait faire
dans tout le pays, les falaises, les grottes, etc. : ils partaient à pied, marchaient grand train jusqu’à Saint-Jouin « où l’on festoyait et
s’attardait à l’auberge de “
La Belle Ernestine
”, une bonne et saine Normande ». Il rappelle que Maupassant avait aussi connu le poète
anglais
S
winburne
à Étretat en 1868, et que ce dernier lui avait donné « une affreuse main d’écorché » dont il s’inspira pour écrire sa
première nouvelle publiée sous le pseudonyme de Joseph Prunier (
La Main d’écorché
, Almanach Lorrain 1875). Puis c’est la vie à Paris :
« Donc Joseph Prunier et Petit Bleu, vers leur vingtième année, étaient si bons camarades qu’ils passaient presque toutes leurs soirée
ensemble à Paris »... Fontaine décrit la « modeste chambre » de Maupassant, 2 rue Moncey, et raconte les nuits magiques que les deux
amis y passaient : « après s’être gavés de prose toute la journée, ils se saoulaient de poésie toute la soirée ». Mais dès le printemps, ils
louaient une chambre dans une guinguette d’Argenteuil, qui « se transformait souvent en dortoir les soirs où “la bande” était réunie » :
il évoque alors « les folles journées de canotage » sur leur yole
La Feuille de rose
: « ils fumaient force pipes, buvaient sec, et faisaient des
charges abracadabrantes, auxquelles se complaisait Prunier [...] Ils étaient jeunes, ils étaient gais, ils avaient besoin de se dépenser »... En
automne, Prunier et Petit Bleu vont chasser l’alouette dans la plaine de Bezons... Fontaine brosse un beau portrait de Maupassant : « Ah !
quel beau et solide gars était alors Maupassant, le cou, le torse et les biceps d’un athlète », hardi, intrépide et toujours gai, mises à part
les terribles migraines qui parfois le terrassaient... Le premier volume de poésie de Maupassant lui valut une certaine estime ; il raconte
les visites chez
F
laubert
, la joie de ce dernier à les recevoir, et leurs discussions passionnées de littérature... Il raconte la représentation
de la pièce de théâtre scandaleuse,
À la Feuille de rose, maison turque
, dans laquelle il jouait une odalisque, et à laquelle assistèrent Zola,
Flaubert, Daudet, Tourgueniev, etc. ; la première de l’
Histoire du vieux temps
, la véritable première pièce de Maupassant ; puis le succès
de
Boule de Suif
dans
Les Soirées de Médan
, qui valut aussitôt à Maupassant « une grande notoriété et les journaux se disputèrent sa
collaboration ». Ils déménagent alors dans un petit appartement au bord de l’eau à Sartrouville, où il travaille à
Une Vie
et à
La Maison
Tellier
; nombreuses anecdotes, notamment d’un déjeuner chez
Z
ola
à Médan... « Puis vinrent les années laborieuses » : le travail,
l’écriture, puis enfin le soleil de la Côte d’Azur, Cannes, les sorties et croisières sur son bateau le
Bel Ami
... Fontaine explique aussi
comment l’état psychologique de son ami s’est peu à peu altéré, avec « le surmenage de son existence, les névralgies qui le faisaient tant
souffrir, les remèdes de toute sorte qu’il prenait pour les calmer, l’excès de travail »… Il raconte sa tentative de suicide, le transport à
Paris à la clinique du Dr
B
lanche
« où il végéta dix-huit mois avant de s’éteindre le 6 juillet 1893 »... Puis il consacre un chapitre aux
« femmes de Maupassant », faisant remarquer que chez lui « c’est le plus souvent la femme qui est la sacrifiée, la victime de l’amour » : il
étudie ainsi les héroïnes de ses ouvrages, et conclut : « Maupassant n’était pas un sentimental non plus qu’un passionné [...] C’était un
gourmand d’amour, avec beaucoup d’appétit et un tempérament robuste »...
Le second manuscrit, de 22 pages, est une analyse des nouvelles fantastiques de Maupassant, mises en perspective avec ses problèmes
mentaux et sa fin tragique : « Bien que son œuvre témoigne de tant de santé, d’équilibre et de lucidité, Maupassant a toujours été
attiré par l’étrange, le mystérieux, les sujets de folie, de peur, de cauchemar. Il n’y a pour ainsi dire pas un de ses volumes de contes,
pourtant si gais, qui n’en renferment d’écrits sous cette inspiration ; et l’on pourrait, en les réunissant, composer un recueil de contes
fantastiques ». Il évoque plusieurs nouvelles et contes, dont
La Main
,
Sur l’eau
,
Fou
,
La Peur
,
Le Horla
, etc. Maupassant écrit ces
contes par goût du bizarre et de l’étrange, en y mêlant de plus en plus un frisson d’angoisse personnelle : « On sait qu’il a eu souvent
des hallucinations », mais il en parlait avec tant de lucidité qu’on ne pouvait penser qu’elles aboutiraient au naufrage de sa raison. À
quel moment les premiers symptômes ont-ils apparu ? Il est difficile de préciser, son entourage intime ne s’en aperçut que quelques
mois avant sa tentative de suicide. Mais quelles affres, dont par fierté il ne faisait confidence à personne, a dû ressentir le pauvre grand
écrivain, quand il put appréhender le dénouement fatal ! »...
164.
François MAURIAC
(1885-1970). L.A.S. « F.M. », 28 septembre [1937 ?], à « mon cher petit Jacques » [le Père Jacques
L
aval
]
; 2 pages petit in-4.
200/300
« Non, vous ne devenez pas trop vieux. Je crois au contraire que vous êtes voué à l’enfance éternelle et que votre cœur d’enfant
sera préservé des atteintes de la vie […] Ma pièce [
Asmodée
] est entrée en répétition. Je m’occupe de faire renaître de ses cendres
Sept
(brutalement supprimé pour des raisons politiques). Je ne sais si j’y arriverai. Je ne suis pas trop loin du Seigneur ces temps-ci
(relativement à d’autres moments). J’ai été à Lourdes […] Il y a tellement de choses détestables à Lourdes que je n’ai jamais essayé de
Littérature
… / …