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les collections aristophil
Littérature
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SAINT EXUPÉRY, Antoine de
Manuscrit autographe.
[Vers 1943].
7 p. in-4 (27 x 21 cm), sur papier pelure « Fidelity Onion
Skin ».
1 500 / 3 000 €
Brouillon de premier jet d’une longue lettre de Saint Exupéry.
« Si la machine bouleverse un monde qui ne sait pas s’y ajuster,
il est évidemment une solution, laquelle consiste à anéantir la
machine. »
Voulant amener son correspondant à une vision plus égalitaire
sur l’économie et les ressources mondiales, Saint-Exupéry illustre
son analyse en prenant l’exemple d’un livre fictif, qu’il intitule « Le
Scaphandrier et l’étoile ».
« Le besoin est ce qui me rend permanent. Si je suis baron de
Charlemagne, j’ai besoin d’un château fort et d’une armure. Si je
suis […] moderne j’ai besoin de magie et de poésie bien qu’étant
de la même structure biologique que l’homme des cavernes si
proche de moi, lequel n’en avait pas besoin. Les seuls besoins
sont le besoin de la permanence par le besoin mystérieux de
l’ascension. L’homme des cavernes tend à avoir besoin de Jean-
Sébastien Bach. Rien ne me permet de chiffrer et de codifier le
besoin de l’accroissement de nos besoins c’est-à-dire la tendance
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SARTRE, Jean-Paul
Lettre autographe signée.
S. l., 24 janvier [1940].
3 p. sur 2 ff. in-4 (26,8 x 20,9 cm).
800 / 1 000 €
Lettre autographe signée à sa maîtresse Wanda Kosakiewicz.
Depuis le début de la drôle de guerre, Sartre est mobilisé en
Alsace. Voyant la date de sa prochaine permission approcher,
l’impatience des retrouvailles s’exprime :
« J’ai pensé aussi (je
serai donc vers 7 heures ½ à peu près à Montparnasse) qu’il
vaudrait mieux nous revoir chez toi, si tu le veux bien, parce que
le Dôme ou tel autre endroit va mettre une imperceptible distance
entre toi et moi et je voudrais bien te revoir sans distance pour les
premiers moments. Je n’aimerais pas te voir de l’autre côté d’une
table – ni même sur la banquette à mes côtés mais sans pouvoir
te prendre dans mes bras à cause des gens. Je t’aime. »
Il évoque également Lucie Ville, connue sous le pseudonyme de
Marie Girard ou de « la femme lunaire » :
« Tu sais, ça m’inquiète
un peu ta cohabitation avec la lunaire, je me demande si tu y
trouves ton compte, surtout à présent que la lunaire te dégoute. »
à l’enrichissement de ma personnalité (exemple soif, oxygène). Je
réponds toujours exagérément aux besoins de l’homme quand
je l’élève. Je comprends bien l’adaptation naturelle comme
une conquête. […] L’homme est défini par l’antinomie besoin de
créer - besoin d’être stable […] l’état d’équilibre vivant entre ces
deux antinomies est naturel. Il n’est pas définissable par une
opération logique. […] La communauté aidera progressivement
pour la bonne raison que la création, désormais, est fruit de la
communauté. »
Numérotation postérieure au crayon rouge.
PROVENANCE :
Vente anonyme, lot 373 (Paris, 16 mai 2012).
Trous d’épingle, petits plis, quelques rares taches.
Ratures et corrections. Essai d’encre au verso du dernier feuillet.
Il est également question des surréalistes et notamment de
Breton :
« Tu sais je lis deux livres ou on fait figurer des surréalistes
comme personnages romanesques. Dans l’un d’eux, Breton en
personne y joue un grand rôle sous le nom de Caël et dans l’autre
le surréaliste s’appelle Vorge. Je te les apporterai ; ils ne sont
flattés ni dans l’un ni dans l’autre. Surtout Breton qu’on montre
braillard et pleutre mais je me demande bien si c’est vrai. Je
regrette bien de n’avoir pas connu tous ces gens quand il en était
temps
. »
Quelques rousseurs et mouillures.