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les collections aristophil

Littérature

478

SAINT EXUPÉRY, Antoine de

Tapuscrit corrigé pour

Pilote de guerre.

Fin 1941.

202 p. (chiffrées 200) dactylographiées sur papier pelure

« Fidelity Onion Skin ».

3 000 / 5 000 €

Un des quatre tapuscrits aboutis du roman.

Publié en anglais à New-York le 20 février 1942, sous le titre

Flight

to Arras

, puis en français à Paris, sous le titre

Pilote de guerre

, le

27 novembre 1942, ce livre destiné à célébrer l’héroïsme français

eut un retentissement considérable aux États-Unis. Il figurera

parmi les records de vente pendant plus d’un an, alors même qu’il

avait été interdit en France par les autorités d’occupation et n’était

diffusé que clandestinement par les mouvements de résistance.

On sait, par Saint-Exupéry lui-même, qu’il existe quatre

dactylographies du texte : l’une d’elles, conservée à la Bibliothèque

nationale (cote

N.A.fr

18269), porte une dédicace manuscrite à

Nadia Boulanger, datée « fin 1941 », qui précise : « Je suis bien

heureux de vous donner un des quatre manuscrits. » Il est fort

probable que notre dactylographie est l’une de ces quatre,

d’autant qu’elle a les mêmes caractéristiques matérielles que celle

de la Bibliothèque nationale.

Notre copie porte des corrections manuscrites à l’encre noire ou

au crayon. Ces corrections sont le plus souvent orthographiques

ou typographiques, mais certaines changent le texte (f. 15 : l’ajout

manuscrit des mots

« presque toujours »,

intégré dans le texte

de la B. n., ou, f. 18,

« vous aimiez le mort, vous n’êtes pas en

contact avec la mort »

, et corrigé à la main en

« nous qui aimions

le mort, nous ne sommes pas en contact avec la mort »,

texte

qui est celui de la B. n.) De même, les premières lignes du f. 156

sont totalement différentes du texte publié et ne sont pas dans le

document de la B. n.

Le découpage en paragraphes est presque toujours le même dans

les deux dactylogrammes, sauf pour le chap. VI qui ne commence

pas au même endroit (f. 34).

Parmi les interventions les plus importantes, il faut noter le

changement de numérotation des chapitres : le 6

e

est coupé

pour en introduire un 7

e

et les suivants sont renumérotés en

conséquence. Il demeure toutefois deux chapitres IX.

Version non-expurgée du récit, le dactylogramme propose le

texte voulu par l’auteur, avec la fameuse phrase

« Hitler qui a

déclanché [sic] cette guerre démente »

(f. 21) qui fut supprimée du

texte publié : la

Progagandastaffel

contraignit Gallimard, qui avait

demandé l’autorisation de publier, à supprimer cette phrase.

PROVENANCE :

Vente anonyme, n° 392 (Paris, 16 mai 2012).

Quelques taches et brunissures ; quelques pliures et froissements,

déchirures marginales, certaines avec manque de papier.

479

SAINT EXUPÉRY, Antoine de

Manuscrit autographe pour la

Lettre à un otage

.

[Vers 1941].

7 p. in-4 (27 x 21 cm) sur papier pelure jaune.

3 000 / 4 000 €

Précieux manuscrit du premier chapitre de la

Lettre à un otage,

« véritable poème symphonique » (F. Gerbod).

Notre manuscrit présente une version plus détaillée que celle

finalement publiée (

Œuvres complètes,

II, Bibliothèque de la

Pléiade, 2009, p. 89-92). Cette version inédite constitue un

important complément de celle conservée à la Smithsonian

Institution, à Washington. D’autant plus que, de ce premier

chapitre, ne sont connus que des manuscrits et dactylographies

peu élaborés.

Après le Portugal, plusieurs pages dépeignent New York, où Saint-

Exupéry se trouve absorbé par l’écriture de

Pilote de guerre

, mais

loin de sa patrie et des siens. Le bruit de la ville est envahissant, et

l’empêche d’écrire.

« Mais le Portugal essayait de croire au bonheur, et lui laissait un

couvert à sa table et ses lampions, et sa musique. Dès le premier

soir j’y dînai à bord d’une caravelle. Et tout était si plein de goût, si

plein de tact, cette expression était si mesurée, si pleine de goût si

charmant, si visiblement aimé par ceux qui l’avaient faite. Et qui,

me semblait-il avait désiré dire au monde “voyez la qualité de

notre sourire, et notre passé non trahi, voilà notre visage”. Et cette

musique répandue disait, cette musique et non ce tintamarre, et

qui faisait un bruit […] dans le cœur. Mais je retournais le soir à

Estoril où j’allais jeter un coup d’œil sur mes fantômes. […]. Une

fois de plus je me disais : la guerre. Ce n’est point la mort qui est

tragique. La mort n’est rien si j’ai où loger mes morts. Mais on fait

craquer mon armature. On veut me forcer d’habiter une grande

maison vide. On me découd de mon sens de la vie. Je me réveille

et ne reconnais pas les murs. Je me réveille et ne reconnais pas le

balancement de l’arbre. Je me réveille et je ne reconnais pas les

pas des servants. […] Je suis maigre d’une vie si elle commence à

quarante ans. Ce n’est rien d’être loin. J’ai toujours été loin. Mon

dieu, il suffit de les [voir] exister. Et la fête de la famille. Et la fête

du village. Je veux bien m’écarter. »

Foliotation partielle, de 2 à 5. Le texte présente quelques ratures.

PROVENANCE :

Vente anonyme, lot 386 (Paris, 16 mai 2012).

Quelques petites taches au premier f., quelques bords un peu

effrangés.