Previous Page  62-63 / 124 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 62-63 / 124 Next Page
Page Background

60

61

les collections aristophil

Littérature

432

JACOB, Max

Correspondance avec Jean Rousselot.

16 août 1941 - 29 décembre 1943.

In-4 (30,5 x 25,6 cm), demi-maroquin grenat à coins, dos

lisse, étui bordé de même cuir

(C. de Séguier)

.

1 500 / 3 000 €

Réunion de 28 lettres autographes signées, dont 24 datées (38

pages en tout). L’ensemble des lettres est monté sur onglets, sous

serpentes.

Émouvante correspondance littéraire et amicale, restée en partie

inédite, entre deux poètes.

Ces lettres au jeune poète Jean Rousselot, écrites durant les

années noires de l’Occupation, et peu avant la mort tragique de

l’écrivain en mars 1944, sont à la fois vivantes, pittoresques et

secrètement tragiques, voire bouleversantes.

Retiré à Saint-Benoît-sur-Loire, Max Jacob y donne de ses

nouvelles à son correspondant, dont il lit les poèmes (pour

lesquels il le félicite souvent). Dans ces lettres de plus en plus

amicales, il confie pudiquement ses souffrances et surtout sa

solitude :

« Mais nous vivons de restrictions ; il faut restreindre

en même temps que l’essence, les joies et les expressions de la

sympathie. »

Ses angoisses :

« Je suis sans grandes nouvelles de

ma sœur qui est au Drancy, croit-on. J’essaie de me distraire de

cette douleur »

(s. d.). Conscient des dangers qu’il court, il invite à

la prudence :

« Je demande à mes amis de mettre “Mr Max” sur

les enveloppes et de supprimer le “Jacob” suspect »

(11 mai 1943).

Dès 1941, Max Jacob avait lucidement prévu son destin :

« Ici je

me persuade doucement qu’on en arrivera bientôt à la fusillade

de tous les juifs en masse. Une roue qui tourne va jusqu’au sol

avant de remonter. La mort en martyr ne me déplaît pas. Si je ne

l’ai pas comme juif je l’aurai (après) comme catholique. C’est plus

beau que le gâtisme qui me menace ou la mort sur un lit de fer

à l’Hospice de Saint-Benoît. En somme tout va très bien, comme

disait cet homme précipité d’un toit, avant d’atteindre le pavé.

Dieu ne peut me vouloir de mal et si je suis fusillé je ne l’aurai pas

volée, ma part de ciel »

(31 décembre 1941).

Cette correspondance est aussi marquée par les échanges

littéraires. Max Jacob fait l’éloge des poèmes de son

correspondant, dont il admire la personnalité et l’indépendance :

« vous êtes un cas, un Incas… »

Il est souvent question des autres

jeunes poètes de l’École de Rochefort : Manoll, Béalu, Cadou et

aussi du peintre Roger Toulouse.

« Béalu est à la N.R.F. à cause de

la nouveauté de ses inventions. Une revue cherche le nouveau et

non l’excellent. Cherche l’invention !! Tu sais très bien que tu n’as

pas à te décourager… »

(20 octobre 1942).

Pages jaunies, quelques déchirures (très petites atteintes au texte)

et défauts d’usage.

433

JACOB, Max

Réunion de 70 manuscrits autographes.

S. l. n. d.

133 p. sur 70 ff. in-folio et in-4 (dimensions diverses).

6 000 / 8 000 €

Important ensemble de 70 manuscrits autographes de Max

Jacob.

8

feuillets

sont

illustrés

de

croquis

,

à

l

encre

et

au

crayon

.

Ces manuscrits, qui présentent peu de ratures, se rapportent à

l’exercice des méditations religieuses de Max Jacob, qui s’est

converti en 1915 au catholicisme.

Pendant plus de trente ans, il rédige chaque matin, parfois à

l’aube, un texte sous forme de réflexion spirituelle. La parole d’un

homme profondément croyant jaillit de ces textes :

« La mort.

7h25. Ne pas regarder la mort en païen car alors elle est terrible

et abominable. […] Mais si je regarde la mort à la lumière de

N.S.J.C., tout change. Je vois la vie comme une préparation à la

mort et de deux choses l’une ou j’aurais satisfait à cet examen

et je n’ai rien à craindre du jugement de Dieu ou je n’aurais pas

satisfait et je peux espérer en la loi qui est la loi de pardon et dont

pas un iota ne sera dans l’oubli. »

Jacob évoque tour à tour les grandes questions et les piliers de la

foi chrétienne. Chaque feuillet présente, dans la marge supérieure

gauche, le thème de la méditation du jour, accompagné de l’heure

de la rédaction :

« La mort »

et

« Le sépulcre »

(8 ff.),

« But de la vie »

(6 ff.),

« L’amour de N. S. pour nous »

(2 ff.),

« Bienfaits de Dieu »

(5

ff.),

« Excellence de l’Esprit »

(4 ff.),

« Excellence des vertus »

(5 ff.),

« Exemple des saints »

(3 ff.),

« Les pêchés »

(8 ff.),

« Situation de

l’homme »

(5 ff.),

« Création »

(1 f.),

« Les deux bandes »

(3 ff.),

« Le

Jugement dernier »

(7 ff.),

« Choix entre paradis et enfer »

(5 ff.),

« Le Paradis »

(3 ff.),

« L’Enfer »

(5 ff.).

Certains feuillets débutent par un verset de la Bible :

« Les paroles

que je vous ai dites sont esprits et vie. St Jean, VI, 64 »

. Jacob

s’en sert de fondation pour bâtir son propre texte, qui s’apparente

à une homélie :

« Que mon corps se penche vers vous, au-dessus

de moi-même, car c’est en moi que je vous trouverai. Vous

habitez en moi et si je vous abandonne c’est que je m’abandonne

moi-même. »

Jacob apparaît transfiguré par la foi :

« Je l’ai dit comme l’Évangile !

Je l’ai répété avec lui. Celui qui a la foi sera sauvé. Foi peuvent

la vie et bonheur de la vie. Foi peuvent la mort et espérance du

salut dernier. Je voudrais que vous fussiez bien persuadés que

la Foi est le seul but de la vie. Alors vous cesserez d’en chercher

un autre. »

Le poète et l’homme de foi se rejoignent en une seule parole :

« Poète en tous lieux, ses méditations quotidiennes unissent

poésie et religion. […] Célébration du monde, célébration de la foi,

célébration de la diversité font de Max Jacob un des plus grands

lyriques de la première moitié de notre siècle » (Robert Sabatier,

La Poésie du XXème siècle

, Albin Michel, 2014).

Taches, rousseurs, déchirures marginales.

433