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les collections aristophil
littérature
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STAËL GERMAINE NECKER, BARONNE DE (1766-1817).
L.A., 13 janvier [1803], à son ami Claude
HOCHET
; 4 pages
in-8.
2 000 / 2500 €
Belle lettre alors que Bonaparte lui a interdit de séjourner à Paris
.
« Vous exprimerai-je assez comme je le sens mon cher ami, à
quel point je suis touchée du sentiment généreux qui élève votre
amitié pour moi au dessus d’elle-même quand vous me savez
malheureuse, c’est ce caractère d’élévation qui m’a toujours
attachée à vous et vous me l’avez développé maintenant avec tant
d’éclat qu’il ne s’agit plus de le découvrir mais de le reconnaître &
de l’admirer »… Quant à l’éloignement de Paris qui lui est imposé,
« je trouve les dix lieues trop severes pour mes amis et moi, et
j’ai envie de rendre cette distance beaucoup plus tolérable alors
j’y resterai tout l’été je pense à mon
ancienne
habitation ou à peu
près j’aurais fait le sacrifice de cet hyver et je suis si sage que je
mériterai ainsi l’autre car vous n’avez pas d’idée de la sagesse dont
je veux être c’en est assez de la persécution il faut s’endormir non
dans la dégradation mais dans le repos. […] j’attends que la saison
soit adoucie pour que le séjour à la campagne et les voyages à
la campagne coutent moins à mes amis », peut-être même son
père [
NECKER
] viendra-t-il…
Puis à propos de
Delphine
: « Maradan me demande une 2
de
édition
je mettrai à la tête un morceau intitulé ce roman a t’il un résultat
moral, c’est la seule critique qui m’importe de confondre ». Puis
à propos de rumeurs sur ses amours : « On mandera peut-être
ici que M
r
O’BRIEN
est amoureux de moi croyez-moi quand je
vous dis que
rien
de ma vie ne se fixera là ». Elle ajoute, à propos
de
NAPOLÉON
et des événements militaires : « Qu’est ce qu’un
bruit qui court ici sur le titre de majesté et sur la menace faite à
l’Angleterre de réunir la Hollande si elle n’évacue pas Malthe ».
Correspondance générale
, t. IV-2, p. 584.
Ancienne collection Daniel SICKLES (XIII, 5544).
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STAËL GERMAINE NECKER, BARONNE DE (1766-1817).
5 L.A., 1803-1812, à Claude HOCHET ; 16 pages in-8 et 4
pages in-4 (le bas du 2
e
feuillet de la 3
e
lettre a été coupé, et
3 lignes et 6 mots de la 4
e
ont été raturés).
10 000 / 12 000 €
Très intéressante correspondance à son fidèle ami et confident
Claude Hochet
.
[Claude HOCHET (1772-1857), journaliste au
Publiciste
de Suard, fit la
connaissance en 1796 dans le salon de Suard de Benjamin Constant et
Mme de Staël, dont il restera jusqu’à la mort l’ami et le correspondant
fidèle. Il abandonnera peu à peu la littérature pour la carrière admi-
nistrative, mais restera pour Mme de Staël et Constant un confident
et un ami dévoué, jouant entre eux le rôle d’agent de liaison et leur
servant aussi d’intermédiaire et d’informateur.]
Metz 7 novembre [1803]
.
Départ de France pour l’Allemagne après
avoir reçu son ordre d’exil
. Elle a reçu et brûlé sa lettre « qui contenoit
de si nobles preuves de votre amitié je désire que vous n’en parliez
jamais certain que le souvenir s’en retrouvera dans mon cœur mais il
y a des moments où il faut tout éteindre, c’est presque mourir de son
vivant. Je voulais dire par ma
littérature métaphysique
que j’écrirois
à M
r
Su[ard] ce que j’observerois en Allemagne […] Non en vérité je
ne veux rien imprimer, je ne sais quand je retrouverai mes facultés,
j’ai souffert si horriblement que je ne suis pas sure d’en ressortir moi
– du moins pour l’esprit. Ce départ de France me redonne toutes
les douleurs de celui de Bondy pour l’imagination, c’est une terrible
chose qu’une frontière et une grande épreuve pour le cœur que
des adieux. […] Quelle folie que de se présenter un voyage comme
agréable je n’ai aucune curiosité et chaque objet nouveau secoue
la peine et la fait mieux sentir ». Elle ne savait pas que Mme SUARD
avait écrit à son père : « Je lui suis attachée et pour elle et pour son
mari qui a redoublé en moi un sentiment presque pénible tant il est
vrai. Personne en France ne conçoit l’amitié mais je ne puis vous dire
à quel point je m’en suis reconnue susceptible depuis que je frémis
à l’aspect de l’étranger, même lorsqu’il m’apprend à quel point ma
célébrité est générale, comme je donnerois ce droit d’aînesse pour
six mois de bonheur, je n’ai plus rien que de vulgaire depuis qu’il
faut se séparer de tout ce que j’aime, le 1
er
C[onsul] n’a pas su à quel
point je me serois annullée avec plaisir »...
[Rouen] ce lundi [3 ou 10 novembre 1806]
.
Sur son amour pour Prosper
de BARANTE
: « Je vous donne
ma parole d’honneur
mon ami, que
vous ne serez pas nommé à Pr. sur cette affaire d’argent » ; elle va
payer ses dettes : « nous sommes tout à fait à cet égard sans gêne
réciproque. Ce que je souhaiterois vivement c’est qu’il cherchat à se
faire renvoyer à Paris – et ce n’est pas pour mon sentiment seul, c’est
pour sa dignité que je le souhaite, c’est un homme qui peut tomber
comme il peut s’élever, sa mobilité et son père combattent contre sa
fierté et contre moi ». Puis à propos du 17
ème
Bulletin de la Grande-
Armée : « La reine de Prusse est la plus respectable femme du monde
et Hullin [le général HULIN avait présidé la commission militaire du
duc d’Enghien] pour commander à Berlin ! Vous parlez de bonheur
en peut-il exister quand un objet si cher [Barante] est au milieu de
tout cela. Ah je tremble à chaque instant qu’il ne s’engage dans une
route qui fausse toutes les idées comme tous les sentiments, qui les
fausse bien plus quand on est né une noble créature que quand on
s’est trouvé d’accord naturellement avec tout cela. J’ai vu Mr de Tall.
[TALLEYRAND] fondre en larmes trois heures au pied de mon lit quand
j’étois malade la fermeté est le seul garant des dons reçus du ciel. Vous
êtes bien généreux de me pardonner mon malheureux sentiment hélas
il m’a rendu bien heureuse six mois m’en vaudra t’il davantage ? »… Elle
a remarqué [dans
le Publiciste
] l’extrait de
l’histoire Auguste
: « j’au-
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rois du vous y reconnoitre puisque le courage m’en avoit frappée. Si
ceci dure encor dix ans, on ne saura plus en France ce que c’étoit
que l’honnêteté, cela s’appellera le radotage des vieillards. Tant que
nous sommes jeunes encore au moins ils ne peuvent pas attribuer la
délicatesse à la foiblesse ». Elle explique à Hochet qu’elle souhaite lui
prêter « de l’argent pour acheter une ferme […] je regarde cela comme
une bonne spéculation pour moi je vous en avertis car vous êtes le
plus sur de tous les débiteurs »… Quant à la date de publication de
son roman [
Corinne
], elle voudrait « que cette guerre fût finie je trouve
indécent de se montrer sur des sujets d’agrément au milieu des larmes
de l’Europe », et il faut arranger « l’affaire de la censure ». Elle est en
train d’acheter « une terre [Acosta] à deux lieues plus près de Paris que
Mantes il faut voir si l’on m’y laissera »...
[Genève] ce 26 mars [1809]
.
Sur la tragédie
Wallstein
de Benjamin
Constant, et sur
De l’Allemagne
.
« On peut trouver plus ou moins d’intérêt dans la nature même du
sujet de
Valstein
mais ne pas admirer Alfred et Thécla mais ne pas
sentir la beauté noble et simple de la poësie de cette pièce c’est
tellement différer avec moi qu’il n’y a pas moyen de s’entendre. Je
n’ai point d’illusion sur le talent littéraire de mes amis il me semble
au contraire qu’on est sévère pour ce qu’on aime mais je ne suis pas
du tout influencée par le petit esprit de cotterie qui se croit imposant
en s’appellant Paris. Je n’ai affaire qu’à la nature même des choses
et tout ce qu’on me dit n’a pas le moindre effet sur ma conviction
intime. Vous devriez être ainsi vous qui avez tant d’âme et d’esprit
à vous mais vous êtes dominé dans tout ce qui n’exige pas du
courage il vous faut du danger pour être indépendant ». Elle espère
qu’il viendra la voir : « je pourrai vous montrer mon manuscrit sur
l’Allemagne ceux qui l’ont lu et moi je le crois supérieur à ce que j’ai
fait jusqu’à présent. Il le faut vu la grandeur et la nouveauté du sujet.
Mais je n’ai pas sur mes ouvrages la même certitude que sur ceux
de mes amis et dans ce qui me regarde le succès ou le revers me
fait beaucoup d’impression »...
[Genève] 10 mars 1812
. « Pour la première fois ma santé est dange-
reusement attaquée, et je ne sais pas si je m’en tirerai c’est une phase
nouvelle pour mon imagination [elle écrit les
Réflexions sur le suicide
]
et qui l’affecte plus que je ne l’aurois cru car mon existence est si triste
que si je ne considérois la mort que comme sa fin j’en serois bien
peu émue mais cet abyme inconnu m’effraye d’autant plus que j’ai
beaucoup souffert et que j’espérois de la bonté suprême des jours
plus doux avant les derniers. J’avois aussi une belle idée d’ouvrage
c’étoit un poëme historique de Richard Cœur de Lion comme il
seroit en prose je ne m’y permettrois aucune fiction c’est bien assez
des traditions du tems de Saladin, de Philippe Auguste, de Frédéric
Barberousse &c. Les couleurs de l’Orient donneroient du charme à
cette composition mais il faut vivre pour penser puisque Descartes
a dit Je pense, donc j’existe. [Suivent 3 lignes rayées sur Benjamin
Constant.] Il y a quelque chose de bien sévère dans l’existence quand
elle sort
des voies communes
comme dit Chateaubriand. Ce qu’il y
a de plus triste dans la mienne c’est de me trouver jusqu’à ce jour
dans l’impossibilité de rien faire pour la carrière de mes enfants et de
m’entendre louer tout le jour sur ma célébrité sans qu’elle ait d’autre
résultat que de nuire à ce que j’aime »...
Stockholm 19 octobre [1812]
.
Sur son séjour en Suède
. « Je ne résiste
pas à une occasion de vous dire que je vous aime. […] j’ai été reçue
par tout
le nord
comme une reine et il me suffisoit de n’être plus tour-
mentée pour me croire au moins dans le paradis d’Odin. Je vais écrire
sur le nord comme je l’ai fait sur le midi je crois que cela sera curieux
comme Europe et comme Asie mais la terre que l’on décrit tremble et
les tableaux s’évanouissent avant d’être tracés. Ce qui reste fixe en moi
ce sont les affections. Je rêve que je reverrai mes amis comme ces
pauvres nègres qui croyent en mourant retourner dans la patrie. […] j’ai
fait ce que je devois et si je vis vous direz avec moi que j’ai fait ce que
je devois. Je vous demande de ne pas m’oublier […] Mon fils cadet est
très bien placé militairement ici il falloit une carrière à nous tous et s’il
plait à Dieu nous l’aurons tous. Mais autrefois j’aimois bien des objets
dignes d’enthousiasme ou de tendresse tout est blessure maintenant
par l’absence ou par les torts – mais je trouve dans la rêverie plus de
ressource que jadis et ce dont je jouis c’est de la cessation de l’état où
j’étois. Sécurité et indépendance sont des biens nouveaux pour moi.
[…] Le ciel est gris la terre est aride mais l’ame n’est point oppressée les
beaux arts se faisant mais la conscience peut parler enfin je referois ce
que j’ai fait et je bénis Dieu de m’avoir conduite pendant quinze cents
lieues ma fille et moi, sans que mille périls nous ayent atteints. J’ai
passé par des villes qui ont déjà disparu de la terre. L’homme survit
maintenant aux empires »…
Correspondance générale
, t. V-1, p. 98 ; t. VI, p. 152, p. 627, t. VII,
p. 556 ; t. VIII, p. 103.