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les collections aristophil

littérature

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ROUSSEAU JEAN-JACQUES (1712-1778).

MANUSCRIT MUSICAL autographe,

Le Duo des roses

 ;

6 pages oblong in-fol. sur 2 bifeuillets, avec envoi

autographe sur la 8

e

page (marque de pli).

8 000 / 10 000 €

Manuscrit musical d’un duo de Jean-Jacques Rousseau, qui

sera recueilli dans

Les Consolations des misères de ma vie

.

Ce duo pour deux voix (Sylvie et Tirsis) avec basse continue compte

166 mesures ; les voix sont notées en clef d’ut, la basse en clef de fa.

En ré majeur, le duo commence

Largo

, à 3/4 ; puis, à la 21

e

mesure,

il se poursuit

Andante

à 2/4, puis

Andante meno

, et après un bref

Adagio

, à nouveau à 3/4

Larghetto amoroso

, avant de s’achever

Andante

à 3/8. Le manuscrit, à l’encre brune sur papier filigrané

de Johannot d’Annonay daté 1742, comprend 21 systèmes de trois

portées ; il présente quelques petites corrections par grattage.

Le dernier feuillet porte cet envoi autographe : « Ce Duo de mon

petit faiseur est à […] pour […] et non autrement », mais les noms des

dédicataires ont été grattés. L’explication de ce « petit faiseur » est

donnée dans l’« Avis de l’éditeur de ce recueil » des

Consolations

des misères de ma vie

(p. 2) : « son

petit Faiseur

 ; expression dont

il se servoit, par allusion badine à la plus ridicule & la plus absurde

des imputations », car on l’accusait de n’être que le « prête-nom »

du véritable compositeur de ses œuvres (notamment du

Devin

du village

) : il se désigna alors avec humour et modestement

comme « le petit faiseur », fiction entretenue dans son « Extrait

d’une réponse du petit faiseur à son prête-nom, sur un morceau

de l’

Orphée

de M. le chevalier Gluck » (

Œuvres complètes

, Bibl.

de la Pléiade, t. V, p. 461-465).

Le Duo des roses

fut gravé et recueilli en 1781 dans

Les Conso-

lations des misères de ma vie, ou Recueil d’airs, romances et

duos

, édition posthume par souscription préparée par les amis de

Rousseau, dont le marquis de Girardin. Il y figure dans le volume

sous le n° 82 (pages 165 à 172), avec quelques variantes, l’indication :

« Sylvie doit avoir devant elle un bouquet de roses », et le nom du

parolier : « Paroles de M. de Laire » ; journaliste, diplomate, futur

conventionnel, Alexandre DELEYRE (1726-1797) demeure une des

figures attachantes des Lumières, il fréquenta Diderot et d’Holbach,

collabora à l’

Encyclopédie

(article « fanatisme »), travailla avec

l’abbé Raynal, et, pétri d’admiration pour Rousseau, entretint avec

lui une longue relation épistolaire.

C’est Tirsis qui commence : «Vois-tu la lune qui m’éclaire à travers

ce vieil ormeau. Si jamais je deviens légère, qu’elle luise sur mon

tombeau »...

Un autre manuscrit de ce

Duo des Roses

figure dans le

Recueil de

nouveaux airs sur d’anciennes chansons avec accompagnement

,

rassemblant des manuscrits musicaux trouvés dans les papiers

de Rousseau après sa mort et déposés à la Bibliothèque royale

en 1781 (BnF, Musique, Rés. Vm

7

.667, fol. 293-301, pagination de

Rousseau 132-140).

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SADE DONATIEN-ALPHONSE-FRANÇOIS,

MARQUIS DE (1740-1814).

MANUSCRIT autographe,

Le Mariage du Siècle

,

drame

ébauché

, [1772] ; 35 pages petit in-4 en 4 cahiers et un

feuillet, sous chemise-enveloppe titrée.

8 000 / 10 000 €

Rare manuscrit d’une des premières œuvres de Sade, rassemblant le

plan et les ébauches d’un drame conçu pour le théâtre privé de Lacoste

ou Mazan, intéressant pour sa méthode d’écriture.

[Le manuscrit peut être daté de 1772, à cause de la mention dans la dis-

tribution du comédien Bourdais, engagé par Sade le 25 février 1772 avec

sa femme, pour, selon le contrat, « jouer dans mon château et partout où

bon me semblera tous les rôles que je leur distribuerai dans la comédie

et la tragédie ». Ces ébauches renvoient aux pages d’un manuscrit perdu,

en vue de sa révision. Il est probable que la pièce ne fut pas jouée, à

cause du scandale de Marseille du 27 juin 1772 où Sade et son valet

Latour se livrèrent à une orgie avec quatre prostituées, qui portèrent

plainte, provoquant une perquisition à Lacoste et la fuite de Sade en

Italie, avec sa belle-sœur la chanoinesse de Launay et son valet Latour.

Ce dossier a été publié pour la première fois en 1970 par Jean-Jacques

Brochier dans le

Théâtre

de Sade (tome I, correspondant au t. 32 des

Œuvres complètes

chez Jean-Jacques Pauvert) ; repris dans le tome I du

Théâtre

(13 des

Œuvres complètes

) par Annie Le Brun et Jean-Jacques

Pauvert (Pauvert, 1991, p. 49-70).]

Le manuscrit, qui présente de nombreuses ratures et corrections, se

compose de quatre cahiers et une feuille volante, emballés dans un papier

portant le titre : «

LeMariage du Siecle

» et la mention « drame ébauche ».

La feuille donne le «

Nom des personnages

 », avec deux projets de

distribution, le premier avec des acteurs de la Comédie-Française : « Le

baron de St Pré – M. Brissaut / Pauline – Mlle Doligni / Le Cte de Casteli

– M. Molé / Le Ch[evali]er de Castelli – M. Chevalier [remplaçant Belcourt

biffé] / Sophie – Mlle Lucie / Mde Destournelles – Mme Préville » ; un 7

e

rôle a été supprimé : « Mlle Dorbessa » tenu par Mlle Hus ou Dépinai. La

seconde distribution est destinée au théâtre de Lacoste, avec Bourdais

(le baron), Mme de Launay [belle-sœur de Sade, chanoinesse] (Pauline),

« M. de Sade » lui-même (le Comte), Mme de Sade (Sophie), etc. « La

scène est au château de St Pré dans la forêt de Fontainebleau ».

Les deux premiers cahiers (8 et 6 pages) donnent le synopsis détaillé des

cinq actes. Nous en citons le début :

« La première scène est une conversation de Saint Pré, et de Pauline,

celle-ci travaille à sonmétier, M. de St Pré au coin de sa cheminée lisoit une

brochure et s’interrompt, il fait entrevoir à Pauline les vues d’établissement

qu’il a pour elle, les avantages qu’il croit trouver dans l’alliance de M. de

Castelli, la laissant cependant libre de son choix. St Pré sort, Sophie entre.

Scène seconde

. Pauline en continuant de travailler rapporte à Sophie une

partie de la conversation de son tuteur. Portrait du comte mis en parallèle

avec celui du chevalier par Sophie qui paroit pencher fortement pour

le chevalier. Un laquais annonce Md Destournelle qui a avec Pauline la

conversation détaillée pages 38 et 39 »... Etc.

L’acte IV se déroule dans « un cachot affreux », où est emprisonnée

Pauline. La pièce (acte V) s’achève ainsi (après une première ébauche

biffée) : « Après le monologue de Pauline, un laquais apporte un billet

de la part du Cte, page 165. Effroi, désespoir de Pauline. Elle s’éva-

nouit, monologue intéressant par lequel elle fait entendre qu’elle se

croit empoisonnée. Entre Destournelle qui vient dit-elle contempler sa

victime. L’attendrissement, le remords pénètrent le Comte ; il poignarde

Destournelle, qui meurt en disant qu’elle est enfin punie de ses crimes.

Le Cte est seul sur la scène entre le cadavre de Destournelle et sa femme

expirante. Celle ci l’embrasse et expire en lui disant tout ce qu’il est pos-

sible d’imaginer de plus tendre. Le Cte seul a un monologue effraiyant,

préparé par une scène à l’angloise, où tous ses crimes se présentant à

son esprit lui font dresser les cheveux à la tête, l’accablement le saisit,

il tombe et meurt de douleur sur le corps de sa femme. – Il ne faut

point qu’il ait l’air de consentir à l’empoisonnement de sa femme ».

Le 2

e

cahier donne un autre synopsis, sans le premier acte. Il s’achève

ainsi : « Le Comte ne peut tenir à cet excès d’horreur, il poignarde la

Destournelles, le chevalier arrive. Son frère le méconnoit il est hors

de lui, le chevalier cherche à le rappeler à la raison, il la perd et se

poignarde sur le corps de sa femme ».

Le 3

e

cahier donne la rédaction de l’acte I, en cinq scènes. Citons le

début de ce monologue de Pauline dont une première version a été

biffée (scène 3) : « Monstre ce n’etoit donc que pour me tromper

que tu cherchois à me seduire ; eh bien quel fruit as tu recueilli de ta

perfidie ? etoit-ce du spectacle d’une femme malheureuse toute sa

vie, dont tu voulois amuser ta barbarie »...

Le 4

e

cahier donne le début de l’« Acte Second ».

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