195
ACADÉMIE FRANÇAISE
1144
TROYAT Henri
(1911-2007) [AF 1959, 28
e
f].
MANUSCRIT autographe signé « Henri Troyat »,
Discours
de réception à l’Académie Française
, 1960 ; 2-127 feuillets
petit in-fol. montés sur onglets et reliés en un volume petit
in-fol. carré demi-chagrin bordeaux à coins.
1 500 / 2 000 €
Manuscrit de travail de son discours de réception à l’Académie
française au fauteuil de Claude Farrère
.
Lev Aslanovitch Tarassov, dit Henri Troyat, a été élu le 21 mai 1959
à l’Académie au fauteuil de Claude Farrère (décédé le 21 juin 1957) ;
né à Moscou, il était le premier écrivain d’origine étrangère admis
dans cette institution. La réception eut lieu le 25 février 1960 ; Henri
Troyat fut reçu par le maréchal Juin.
Troyat fait part de son émotion en songeant à sa Russie natale, « à
la distance qui sépare mon lieu de naissance du lieu où me voici »,
aux coupoles du Kremlin bien différentes de celle-ci, au petit garçon
enfin qu’il était et qui, « fuyant avec ses parents son pays déchiré par
la guerre, débarqua à Paris au début de l’année 1920 », pensant qu’il
n’y resterait que quelques mois. Il évoque la force qu’eurent bientôt
la culture et l’art français sur le jeune immigré qu’il était : « Bientôt
la France le saisit tout entier ». Puis il retrace, avec son talent de
biographe, la vie et l’œuvre de son prédécesseur Claude FARRÈRE
(1876-1957), pour conclure : « Pareil aux vieux conteurs arabes qu’il
avait rencontrés, Claude Farrère a voulu, jusqu’à son dernier souffle,
imaginer des fables et les répandre autour de lui pour notre délas-
sement. À une époque où trop d’écrivains croiraient déchoir s’ils
n’apportaient au monde un message politique, mystique, esthétique
ou social, il a eu le naïf courage de n’être qu’un romancier. Si certains
de ses héros manquent de poids, si une psychologie sommaire les
anime, si des péripéties invraisemblables les poussent d’un chapitre
à l’autre, l’espèce d’entrain chaleureux que met l’auteur à écrire ses
livres lui gagne plus d’une fois la sympathie du lecteur. Que ceux qui
jugent sévèrement la littérature dite d’évasion interrogent bien leur
mémoire : il n’est personne, ou presque, qui, à un moment de sa
vie, n’ait été charmé par un roman, par un conte de Claude Farrère,
personne qui, à l’âge des vocations hésitantes, ne lui soit redevable
d’une envie de voyage, d’un rêve japonais, turc ou indochinois, d’un
élan d’héroïsme ou d’amour, personne dont l’univers intérieur ne
porte sa marque, à l’étage des belles illusions de l’adolescence »...
Le manuscrit, de premier jet, à l’encre bleue au recto des pages de
bifeuillets, comporte de nombreuses ratures, des passages entiers
biffés (souvent au crayon rouge), des renvois et des ajouts sur le verso
de la page en regard, et des variantes avec le texte publié (Plon, 1960).
Ce manuscrit a été offert au grand bibliophile Jean DAVRAY (1914-1985),
ami très intime de Troyat, comme en témoigne cette belle dédicace
(sur le feuillet suivant la page de titre) : « Pour Jean Davray. Mon cher
Jean, tu fus si près de moi tandis que j’écrivais ce discours ! Nous
en avons tellement parlé ensemble ! Reçois-en le manuscrit comme
gage de mon amitié fraternelle ! Henri le 19 mars 1960 ».
Jean Davray a fait relier en tête une belle photo de Troyat jeune, le
bulletin de souscription pour son épée d’académicien et 4 cartons
d’invitations.
On joint
3 L.A.S., 1954-1959, à André MAUROIS ; et une L.A.S. à André
Lasseray, 1959 (avec brouillons de Lasseray).