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Littérature
qu’il ne me paye chaque exemplaire de la Revue comme un exemplaire de volume, car je serais bien dupe à présent (si je laissais aller les
publications comme celle d’
André
). […] sans qu’il se méfie de vous, faites-lui dire combien il a tiré d’exemplaires d’
André
et combien
il en a vendu »... elle demande de lui envoyer sa croix, des médaillons, et « mon manteau dont j’ai regretté l’absence aux variations du
temps et ma jupe d’amazone. […] Je ne ferai qu’une promenade au lieu d’un voyage que je comptais faire, ce sera toujours cela. Voyez
mes enfants bien souvent et surveillez-les dans leurs sorties. […] ne laissez point Maurice trop abandonné à ses petites fantaisies. Adieu,
mon cher enfant, je vous embrasse de cœur »...
Correspondance
, t. III, p. 7.
304.
George SAND
. L.A., [Nohant mi-janvier 1836], à son amie Rozanne
B
ourgoing
à La Châtre ; 2 pages et demie in-8,
adresse (déchirures au f. d’adresse avec quelques petits manques).
500/700
« Ma chère enfant, je comptais t’aller voir hier soir, et je m’étais mise en route. Il faisait si mauvais que je me suis arrêtée chez M
me
Decerfz, et que je n’ai pas eu le courage d’aller plus loin. Ce matin, j’étais forcée de revenir ici pour compter des
madriers
et des
limandes.
Tu crois peut-être que ce sont des poissons ou des légumes, du tout, ce sont des bûches, j’en ai encore pour demain tout le jour. Ne te
verrai-je donc pas avant que tu partes ? Si tu pouvais venir un peu plus tôt que la patache avec ton époux, tu pourrais l’attendre ici et la
prendre au vol. Je voulais te voir, surtout pour te dire, que si tu vas passer quelques jours à Paris, mon appartement est à ta disposition
[…] Du reste, tu peux disposer de tout ce qui est chez moi, boire tout mon vin, tout mon rhum, et coucher dans tous mes lits à la fois.
Je te prie pourtant de ne point recevoir
B
uloz
à des heures indues. C’est un comprometteur de femmes comme il n’y en a pas. Si tu me
promets de ne point trop t’en amouracher, je te fais cade[au] de lui, propriété et usufr[uit] avec son œil, sa lèvre et tous ses furoncles »…
Correspondance
, t. III, p. 244.
305.
George SAND
. L.A., [Nohant 31 (?) janvier 1837], à son amie Rozanne
B
ourgoing
à La Châtre ; 3 pages in-8, adresse
(petite déchir. par bris de cachet).
600/800
« Chère Rozane, je t’envoye une livraison de ma collection. Je te prie si tu as un n° de la
Gazette musicale
où est
le Contrebandier
de
me le renvoyer ». Qu’elle ne vienne la voir que dans une semaine : « Tous mes domestiques sont grippés et je présume que Don José
n’est pas si fort sur la confection du dîner que sur l’absorption. Notre petite réunion de famille n’aura donc pas lieu cette semaine mais
je saisis cette occasion pour te dire que tu es bien sauvage, ou bien paresseuse. Moi je ne me conduis pas mieux. J’ai été à La Châtre une
seule fois et au moment où j’allais chez toi vers quatre heures il s’est mis à tomber une petite neige froide qui m’a fait peur, car j’étais
à cheval et je suis très rhumatisée cette année. Je me suis donc sauvée vilainement comptant re[venir] exprès pour toi au premier jour.
Mais je suis écrasée de travail, il fait un froid de chien, je souffre continuellement et Maurice est encore au lit avec la fièvre »…
Correspondance
, t. III, p. 676.
306.
George SAND
. L.A.S. « George »,
Paris
[vers le 10 novembre 1841], à son amie Rozanne
B
ourgoing
à Roanne ; 2 pages
et quart in-8 à en-tête de
La Revue indépendante
, adresse.
800/1 000
B
elle
lettre
sur
L
a
R
evue
indépendante
qu’elle vient de fonder avec Pierre Leroux et Louis Viardot.
« Chère Rozanne, Tu vas me faire le plaisir de t’abonner à ma revue. Je suis bien aise d’avoir une occasion de réveiller ta vieille amitié
engourdie par l’absence peut-être. La mienne est toujours fidèle au poste, et tu la retrouveras quand tu frapperas. Maintenant nous
faisons une œuvre de propagande, il nous faut des sympathies, et aussi des abonnés, non pour faire prospérer une
spéculation
, tu sais
bien que ce n’est pas là notre but, mais pour nous soutenir, et trouver dans l’argent, ce
nerf de la guerre
, le moyen de propager nos idées
par la presse. Ainsi prends un abonnement et fais en prendre à tous ceux de tes amis qui en auront le moyen. Tu nous rendras service
au point de vue de
la foi
»…
Correspondance
, t. V, p. 491.
Reproduction page 78
307.
George SAND
. L.A.S., Nohant 25 décembre 1850, à son ami « Paloignon » (le peintre Léon
V
illevieille
) ; 3 pages et demie
in-8.
1 000/1 200
B
elle
lettre de
conseils
. Elle ne sait quand elle le verra, car la première de
Claudie
n’est pas du tout fixée. Elle lui donne des conseils
pour l’organisation de sa vie : « il ne faut pas que les vivans soient sacrifiés à ceux qui ne le sont plus et qui ne peuvent plus être utiles à
rien ni à eux-mêmes ». Elle parle également de la mère de son ami... « Vous, il faut travailler, et vous ranger jusqu’à l’austérité, jusqu’au
stoïcisme, pour adoucir son sort et pour assurer le vôtre [...] Je vous ai fait la morale à Nohant, je vous la ferai tant qu’il vous plaira
de l’écouter [...] nous devons être nous mêmes les gardiens de notre conduite et les réformateurs de nos impuissances. Vous avez déjà
beaucoup de talent, mais il ne faut pas vous en contenter, car du moment où l’on est satisfait on est trop confiant. Il vous faut travailler
encore plusieurs années, et toujours vous lancer et vous faire connaître peu à peu, en mettant tous vos soins toute votre conscience à
mieux faire le lendemain que la veille. Le public, quelque bouché qu’il soit, sent les progrès d’un artiste, et il les exige, car il s’ennuie
vite d’un talent qui est arrivé à son terme et qui ne se renouvelle pas »... Elle lui recommande à se garder de l’égoïsme, et l’engage à
revenir au plus vite à Nohant : « J’espère que vous prendrez ici des habitudes de persévérance et un faire délibéré, productif, et soutenu.
L
ambert
[le peintre Louis-Eugène Lambert] qui était mou et réellement paresseux s’est bien corrigé et il entre dans sa voie avec certitude.
[...] tout cela se développe ensemble forcément, le talent, la raison, le cœur. Si l’équilibre se détruit, le talent se meurt. [...] Ne flânez
pas dans la politique à Paris. C’est du temps perdu, ce n’est plus que du bavardage à l’heure qu’il est. Rien d’utile ne se fera que par le
progrès et la moralisation du peuple. Les artistes doivent faire leur prédication par leurs œuvres, et par l’exemple d’une bonne vie ».
Correspondance
, t. XXV, p. 760.
Reproduction page 79