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vingt ans de misère et un médecin me disait que j’en paie les conséquences ». Il connaît bien l’œuvre du Douanier

R

ousseau

« dont le

principal collectionneur fut mon ami intime Serge Jaztrebzoff » [Serge

F

érat

], qu’Aynard peut contacter de sa part. « 

P

icasso

connait

aussi fort bien l’œuvre de Rousseau mais il ne vous répondrait pas ». Il le remercie de parler de lui : « j’ai grand besoin qu’on élargisse

mon nom qui n’est connu qu’à Paris et à l’étranger ». Il évoque ses souvenirs sur Maurice

U

trillo

,

qu’il a bien connu : « Quelle figure ! Je

me le rappelle assis au bord d’un trottoir un litre à la main. Pas de boutons à la veste mais des ficelles, pas de chemise, pas de chaussettes,

le nez saignant ». Ivrogne, il insultait les boutiques avant de les briser d’un pavé dans la vitrine ; il molestait les peintres modestes et

les petits vieux de la Place du Tertre : « La police arrivait ! On m’envoyait chercher Suzanne

V

aladon

qui arrivait en larmes. Et voilà

Maurice expédié à Picpus. là on le martyrisait ! Les infirmiers volaient les toiles et le

suppliciaient

quand il se plaignait », lui faisaient

boire du bromure, ce qui le tuait. Quand on obtenait enfin de le sortir, « il se promenait dans Paris avec un gardien

qui le faisait boire 

!

Voilà la vie de ce génie. Celle de Suzanne

V

aladon

n’était pas plus heureuse »… Il n’ose pas donner de prix pour ses peintures : « Level

vend mes toiles 1800 francs. Elles font jusqu’à 4000 à l’Hôtel. […] J’ai une église de Bretagne avec des personnages », qu’il doit vendre

mille francs en Espagne, mais qu’il propose à Aynard à ce prix…

15 mars

. Il donne « des noms de jeunes » à lire : « Vous connaissez

la bande

C

octeau

. R

adiguet

, M

orand

, G

iraudoux

, D

elteil

, M

ac

O

rlan

, moi, etc. Vous connaissez aussi la bande surréaliste André

B

reton

, Louis

A

ragon

, Paul

É

luard

, Michel

L

eiris

, René

C

revel

,

S

oupault

, Robert

D

esnos

, Benjamin

P

éret

,

V

itrac

[…]. Il faudrait

un volume pour parler de ces mouvements modernes. […] Il y a aussi le clan catholique

M

aritain

, R

everdy

, C

laudel

, Stanislas

F

umet

,

C

hesterton

, G

héon

, Henri

P

ourrat

, R

amuz

 », etc. Il joint à cette lettre une

liste

complète

de

ses œuvres

, en commençant par

Le Roi

Kaboul et le marmiton Gauvain

et

Le Géant du Soleil

, « introuvables » (1904), jusqu’aux

Pénitents en maillots roses

, recueil de poésie paru

chez Kra en 1926, et son

Tableau de la bourgeoisie

, actuellement sous presse, « grand luxe illustré par l’auteur, Gallimard ». Il annonce

ses ouvrages en préparation :

Anatomie religieuse

chez Jean Fort,

Gribouille ou les gants blancs

et

Contes du garage

, tous deux chez

Gallimard,

Poème.

.. Il n’a mentionné ni ses articles, ni ses conférences, ni son théâtre …

24 mars

. Tous les noms bretons cités par Aynard

lui rappellent son enfance : « J’ai connu de vue toute ma vie le chanoine

P

eyron

mais ma famille était juive et il y avait un précipice

que l’amour de l’archéologie seul comblait ».

Le Roi Kaboul

et

Le Géant du Soleil

sont absolument introuvables : « L’un parut en livre

chez Picard et Kaan […] en 1904, l’autre en feuilletons dans les

Lectures de la Semaine

, revue de famille qu’éditait la Librairie Générale

rue Dante. Il pourra trouver plus facilement

Alliés en Arménie

, et

Matorel

, à la Galerie Simon… Il est d’accord pour une exposition

religieuse : « Mais je n’ai pas une gouache chez moi. Tout part aussitôt fait. Demandez à Level […] il a justement des peintures religieuses

qu’il admire et qu’il exposera volontiers »…

97.

Max JACOB

.

M

anuscrit

autographe signé,

Roman abrégé

, Saint-Benoit-sur-Loire

; 9 pages petit in-4.

700/800

M

anuscrit

d

un

conte

ou

nouvelle

,

probablement

inédit

 ; non datée, elle est

dédiée « à Pierre Colle, poète », son futur exécuteur

testamentaire.

Cette curieuse nouvelle, dans le genre des contes de Jouhandeau (l’action se situe dans la Creuse), raconte la fausse amitié, qui cache

une terrible rivalité, entre un bon avoué de province, Maître Julien Bonnefous, de la ville du Blanc-Sainte-Mesme, d’un caractère plutôt

bonhomme en apparence, mais aigre en dedans, faible et lâche, et le principal clerc de son étude, Thomas Thomas, personnage mauvais,

veule et tyrannique, qui tient, sous des dehors aimables, son patron et toute la ville au creux de sa main… « S’il y a jamais eu d’amitié

entre le clerc et l’avoué c’est que l’amitié peut exister entre gens à mauvaises humeurs. Thomas n’a d’amitié que pour une vieille parente

auvergnate qu’il ne voit jamais et un camarade de la guerre qui ressemble à Bonnefous. Bonnefous a pour amis tout le département de

la Creuse. Plutôt qu’amis ils étaient préoccupés l’un de l’autre et le furent vingt-cinq ans. Thomas accordait à son patron de la douceur

et une politesse naturelle alors que lui-même n’avait que l’affectation de ces deux vertus ». Le patron croyait qu’il ne pouvait se passer