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Tu n’as pas lu sans doute une foule de choses de moi, qui ne sont que musc et roses. Après cela, tu es si fou, que tu t’es peut-être dit :

Je vais lui faire bien plaisir ! »

Dans le troisième paragraphe, il prie Nadar d’aller « faire la Cour » au marchand de tableaux Moreau (« Je compte bien lui faire la

mienne à propos d’une étude générale que je prépare sur la peinture espagnole ») afin d’obtenir « la permission de faire une double belle

épreuve photographique d’après la Duchesse d’Albe, de

G

oya

(archi-Goya, archi-authentique). Les Doubles (grandeur naturelle) sont en

Espagne où

G

autier

les a vus. Dans l’un des cadres, la Duchesse est en costume national, dans le pendant, elle est nue et dans la même

posture, couchée à plat sur le dos. La trivialité même de la pose augmente le charme des tableaux. Si je consentais jamais à me servir

de ton abominable argot, je dirais que la Duchesse est une

bizarre fouterie

 ; l’air méchant, des cheveux comme Silvestre, et la gorge, qui

masque l’aisselle, atteinte d’un strabisme

sursum

et divergent à la fois ». C’est, selon Baudelaire, « du Bonnington ou du Devéria galant

et féroce ». Moreau les a achetés au fils de Goya et en demande 2400... Il recommande de ne pas faire de trop petites épreuves : « Cela

enlèverait une partie du caractère »…

Ensuite, Baudelaire charge Nadar de lui trouver un artiste « pour les frontispices qu’il me faut pour mes articles sur

P

oe

(un portrait

enguirlandé d’emblèmes), mon

Opium et Haschisch

, mes nouvelles

Fleurs

[

du Mal

], et mes

Curiosités

[

esthétiques

] » ; comme il ne veut pas

de

D

uveau

, « l’éternel ami de Malassis », il prie Nadar de se renseigner sur Alfred

R

ethel

, « l’auteur de la

Danse des morts en 1848

, et

de la

bonne Mort

faisant pendant à la

première invasion du Choléra à l’opéra

 »... Puis Baudelaire parle des derniers articles sur la peinture

qu’il écrit avant de publier les

Curiosités esthétiques

, et cela sans avoir été au Salon ; il s’aide du livret : « Sauf la fatigue de deviner les

tableaux, c’est une excellente méthode [...] On craint de trop louer et de trop blâmer, on arrive ainsi à l’impartialité ».

Dans un dernier paragraphe (5), Baudelaire supplie Nadar de ne pas écrire « de farces, selon ton antique mode, sur l’enveloppe de ta

lettre »...

Correspondance

(Pléiade), t. I, p. 573.

202.

Charles BAUDELAIRE

. L.A.S. « C.B. », 14 [décembre 1859], à son éditeur Auguste

P

oulet

-M

alassis

à Alençon ; 1 page

in-8, adresse avec timbre.

2 000/2 500

S

ur

ses

traductions

d

’E

dgar

P

oe

.

« Vous ne vous donnez même pas la satisfaction banale des reproches. Vous êtes un Ami parfaitement généreux, et d’une manière

201