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63

Littérature

195

Tout le monde se pique de littérature au

Pays

 : « les

Escudier

, les X.

Eyma

, les

Esnaut

, y déposent tour à tour d’odieuses...

choses

qui

n’ont pas de nom dans la langue des gens bien élevés. […] N’est-ce pas comique à faire rire aux larmes... de sang ?

Mon cher Baudelaire,

si je suis autorisé

, vous serez content de moi. Le volume publié n’est pas ce que j’aime le mieux de

P

oe

, mais

n’importe ! Votre

vie

est très-belle, sombre et amère comme la destinée de votre héros. Excepté le passage sur

Gérard de Nerval

que je

blâme et regrette d’avoir trouvé là, je n’aurais qu’éloges à vous donner. C’est pensé par la Rage, – mais la rage qui demain sera le mépris,

le plus grand sentiment et le seul que valent réellement les hommes ! et c’est écrit par un écrivain qui ajoute à la profondeur de sa

pensée une singulière

noirceur

d’expression. De tout cela, il résulte quelque chose qui m’a

poigné

le diaphragme – voilà mon impression

en

déshabillé

 ! »

Il va lui faire envoyer par

T

rébutien

les

Reliquiæ

d’Eugénie de

G

uérin

, et suggère à Baudelaire d’en « risquer un mot » dans la

Revue

des deux Mondes 

: « Je serais curieux de voir votre idiosyncrasie juger celle de Mlle

Eugénie

et filtrer votre

mordant

dans le calice de cette

fleur ». Il signale un article de Sainte-Beuve sur le livre. « Quand vous l’aurez lue,

elle

et ma Notice, dites-moi

toujours

ce que vous en

pensez – et faites-lui faire une de ces reliures qui sont des

flatteries de Maroquin

pour les livres que vous en parez »...

Ancienne collection Armand

G

odoy

. Publ.

Lettres à Baudelaire

(publ. Cl. et V. Pichois, 1973, p. 37-38).

194.

Jules BARBEY D’AUREVILLY

. L.A.S., 31 octobre 1867, [à Frédérick

L

emaître

] ; 2 pages in-8.

1 000/1 200

S

uperbe

lettre d

admiration

au

grand

acteur

, qui avait créé le rôle-titre du

Père Gachette

(Folies-Dramatiques, 13 juin 1867 ; Barbey

l’avait encensé dans

Le Nain jaune

du 11 juillet). Cette lettre semble

inédite

.

Il remercie l’acteur de ses photographies. « Mais croyez que la plus belle, – car celle-là est coloriée et enflammée, – je l’ai là, dans ma

tête, toute pleine de vous ! Dites à M.

C

arjat

que je le félicite. Vous ou lui, vous avez bien choisi l’

instant à fixer

, puisque la magnifique

unité du rôle, – la circulation du rôle tout entier échappe au peintre. Seulement, j’aurais voulu deux moments encore : P. Ex. Lorsque

vous délibérez sur les moyens de sortir de cette maison de fous, – campé contre la cheminée, le menton dans la main, méditatif et

sculptural : Puis, quand faisant face au public, vous voulez

vous

prouver que vous n’êtes pas fou, et que vous dites, la main étendue :

Mais cette main que je vois là est bien ma main. Il y a bien là cinq doigts…

” Je ne sais plus les paroles, mais je sais mon impression, et je

ne la perdrai jamais »… Il évoque des dîners chez leur ami Silvestre auxquels Frédérick n’est pas venu. « Il fallait, sans doute, que vous

fussiez pour moi la plus puissante réalité et le plus impatientant des rêves »…

195.

Jules BARBEY D’AUREVILLY

. L.A.S., Paris 24 avril [1872], à Élisabeth

B

ouillet

; 3 pages in-8 à l’encre brune avec

soulignures à l’encre rouge (légères fentes aux plis réparées).

1 000/1 500

T

rès

belle

lettre

à

une

vieille

amie

de

son

village

natal

de

S

aint

-S

auveur

-

le

-V

icomte

(M

anche

)

.

« Ma chère Élysabeth, C’est vous qui êtes plus folle que votre cher fou ! Comme avez-vous pu m’écrire les sottises dont on vous a

battu les oreilles ? Comment avez-vous bien pu croire que j’étais de

la proie à Ernest

et que je me laisserais plumer de sa main avec la

grâce de la volupté ?.. C’est insensé »… Il ne sait rien des affaires d’Ernest [son frère cadet], qui ne l’a pas sollicité pour être solidaire de

ses dettes ; il n’en a pas moins écrit au notaire Le Marinel pour dénoncer « la démence de pareils bruits […] je lui parle au

long

et au

net

de ma volonté de ne jamais, sous aucune forme,

sacrifier

ou

risquer

un sou de ma pauvre petite fortune pour Ernest. Le débris que j’ai

sauvé du naufrage de mon père, je le garderai intact. […] Selon vous, je ne serais qu’un polichinelle de sensibilité et de générosité qu’on

pourrait, quand on le voudrait, casser en quatre morceaux et se partager. Je ris de cette belle idée que vous avez de moi. Si j’étais ce que

… / …