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Histoire

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DEIBLER Anatole

(1863-1939) bourreau, exécuteur en chef

des arrêts criminels, il assura le service de la guillotine.

Ensemble de 14 carnets autographes

, 1885-1939 ; 14

carnets in-12 reliés toile bise avec étiquette autographe

collée sur le plat supérieur. Plus des photographies et

documents joints.

15 000 / 20 000 €

Exceptionnel témoignage sur l’histoire des exécutions capitales

pendant plus d’un demi-siècle.

À partir de 1871, un décret ayant supprimé les exécuteurs de province,

il n’y a plus qu’un seul bourreau officiant pour la France entière,

assisté d’adjoints. Descendant d’une lignée de bourreaux originaires

d’Allemagne depuis le XVII

e

siècle, Anatole Deibler succéda en 1899,

comme exécuteur en chef des arrêts criminels, à son grand-père

et à son père, dont il avait été l’adjoint depuis 1885. Surnommé

« Monsieur de Paris », il inscrivait chronologiquement tous les détails

des condamnations et des exécutions auxquelles il a participé, soit

395 exécutions, dont 299 comme exécuteur en chef ou « bourreau

national » entre 1899 et 1939. En plus d’un demi-siècle, Deibler a

tranché la tête de 395 hommes et femmes dont la diversité offre un

témoignage inestimable sur la sociologie des auteurs de crimes et

délits : rôdeurs des villes, empoisonneuses, parricides et fratricides,

anarchistes, pirates, violeurs, déments, etc. Après sa première exécu-

tion parisienne comme exécuteur en chef (Peugnez, devant la prison

de la Roquette, le 1

er

février 1899), on pouvait lire dans la presse :

« Tous les journaux s’accordèrent à rendre justice au jeune monsieur

Deibler qui montra pour ses débuts à Paris un tournemain et une

aisance de vieux praticien. Jeune, élégant, vêtu d’une redingote de

couleur sombre, comme un témoin de duel sélect, il réalise dans la

perfection le type du bourreau moderne. On peut, après cet heureux

essai, lui prédire une belle carrière et un nombre respectable de

représentations ». Les exécutions capitales avaient alors lieu en public,

et attiraient un grand nombre de curieux.

Il a tenu méticuleusement

deux séries de carnets

.

6 carnets d’« Exécutions », de 1885 à 1938

, écrits à l’encre et au

crayon. Deibler y rapporte le lieu et la date de son action (il ajouta

ensuite l’heure et des mentions météorologiques), le nom du condamné

à mort, les éléments de la condamnation (date, tribunal et motifs).

Chaque exécuté est numéroté dans l’ordre chronologique. Ces

comptes-rendus sont pour la plupart très sobres, objectifs et sans

appréciations personnelles. Cependant, Deibler précise parfois quel

a été le comportement du condamné à l’approche de la guillotine.

8 carnets de « Condamnations », de 1891 à 1939

, écrits à l’encre et

au crayon. En 1891, Deibler commence, parallèlement à la première,

une seconde série de carnets intitulés

Condamnations

, où il expose

les circonstances des crimes, en ajoutant parfois des renseignements

sur le déroulement du procès. Ces carnets semblent avoir fait office

de brouillon, Deibler y notant tous les détails des inculpations, avant

même de connaître la sentence. Ce compte-rendu des audiences

comporte aussi des précisions sur les peines prononcées : une croix

rouge pour les exécutés, une croix bleue pour ceux dont la peine a

été commuée ; il barre d’une grande croix bleue les procès annulés

pour vices de formes, suicides ou décès des condamnés, fusillés

militaires... « “Brouillon” plus intime que les “carnets d’exécutions”, cet

exercice constitue une soupape de sécurité psychologique dans son

existence d’“écorcheur” » (Gérard A. Jaeger,

Anatole Deibler

, p. 92).

Certaines notices précisent des anecdotes marquantes concernant

le moment de l’exécution, « moment suprême » selon Deibler lui-

même : derniers actes ou paroles, comportements curieux, etc. « Il

donna un violent coup de poing en pleine poitrine au gardien qui lui

enlevait les fers et il fallut le ligoter à terre » (l’Italien Spagiari, exécuté à

Chambéry, 9 mai 1891). Émile David (exécuté à Saint-Nazaire, 21 mars

1892) « s’adressant aux exécuteurs : Bonjour messieurs, faites votre

devoir ! ». « Au moment de son exécution, il se refusa à marcher, il fallut

le porter » (l’assassin Joseph Vacher, exécuté à Bourg, 31 décembre

1898). « Au cimetière, un professeur de la Faculté de Lille lui enlève

la glande thyroïde, pour la greffée sur une jeune fillette atteinte de

paralysie, l’opération réussie parfaitement, l’enfant est sauvée » (Henri

Olivier, dit

le Tigre

, exécuté à Lille, 24 mars 1925). « Au moment de

l’exécution, Couliou s’écria d’une voix forte : “Vive l’anarchie ! Mort

aux vaches !” » (Yves Couliou, exécuté à Aix, 31 octobre 1925). « Arrivé

devant la guillotine, il se raidit et, à très haute voix, dit : “Peuple dun-

kerquois, je suis innocent” » (Félix Bergeron, exécuté à Dunkerque,

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