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«
J’
AY
TROUVÉ QUE CETTE CONTRARIETÉ QU
’
ON MET
EN
LEURS HUMEURS
ET
EN
LEUR CONDUITE PUBLIQUE
ET PARTICULIERE
EST PLUSTOST UNE DIVERSITÉ DE GENIE
&
DE
TEMPERAMENT QU
’
UNE VRAYE CONTRARIETÉ
.
Chaque nation a son caractère
particulier et son sceau speci que tant au corps qu’en l’esprit, quy est pour le dire ainsy son principe d’individuation
et quy la distingue l’une de l’autre. Si outre cette diversité commune et generalle quy vient du pays où l’on naist,
il y en a quelqu’une de plus expresse et de plus formelle d’un peuple à autre, elle vient de quelques accidents, d’une
certaine conjoncture ou de quelques autres circonstances quy font le mesme effect pour la haine ou le mespris sur des
particuliers que sur des communautez entieres... Cela posé, je dis que hors de cette competence de puissances et cet
estat de rivalles auquel les deux nations se trouvent depuis si longtemps par leurs disputes et qui ne sont pas encore
nies, on ne remarqueroit pas plus d’opposition entre elles que chacune d’elles en a avec les autres...
»
C
ALLIGRAPHIE D
’
UNE GRANDE
ÉLÉGANCE
.
L
E
PHILOSOPHE
H
ELVÉTIUS
,
LE
VOLUPTUEUX
L
A
P
OUPELINIÈRE
,
LE MARI DE
LA
P
OMPADOUR
,
L
’
AÏEUL DE
G
EORGE
S
AND
...
6. FERMIERS GÉNÉRAUX.
– «
MÉMOIRES POUR SERVIR À L’HISTOIRE DU PUBLICANISME
MODERNE ; contenant l’origine, les noms, les qualités, les portraits et l’histoire abrégée de messieurs les
fermiers généraux du roy qui se sont succédés depuis 1720 jusqu’en 1750
». Manuscrit, seconde moitié
du XVIII
e
siècle. In-4, (2 dont la seconde blanche)-211-(1 blanche) pp., parchemin vert, dos à nerfs
avec pièce de titre grenat, tranches rouges, reliure un peu usagée avec plats un peu voilés, accrocs
à la pièce de titre, un mors fendu, deux vignettes manuscrites collées au dos (
reliure de l’époque
).
1 500 / 2 000
B
IOGRAPHIES DES
FASTUEUX
ET HAÏS
FERMIERS GÉNÉRAUX
.
Les impôts indirects étaient affermés, au contraire des
impôts directs relevant des receveurs généraux : un adjudicataire général recevait les baux des gabelles,
traites, aides, domaines, octrois, droits sur le tabac, tandis qu’une compagnie de nanciers, improprement
appelés « fermiers généraux», versaient un cautionnement considérable – garantie de la perpétuité de leurs
fonctions, l’état étant toujours dans l’impossibilité de le rembourser. Au nombre de quarante à soixante, ils
souffrirent d’une impopularité qui, si elle fut d’abord justi ée, fut nettement moins méritée dans la seconde
moitié du XVIII
e
siècle.
C
ETTE GALERIE DE
PORTRAITS
CONCERNE DES
PERSONNAGES
ÉMINENTS
COMME
H
ELVETIUS
(«
Il est encore actuellement
garçon et un des principaux membres de la maçonnerie : en cette qualité on assure qu’il exerce noblement la charité
envers les frères de cet ordre si fort recommandée dans les statuts
»),
D
UPIN
DE
F
RANCUEIL
(grand-père de George
Sand, avec longue anecdote sur le mariage qui a fait sa fortune),
L
E
N
ORMANT
D
’É
TIOLES
, époux de la
marquise de Pompadour, ou encore
L
E
R
ICHE
DE
L
A
P
OUPELINIÈRE
(mécène raf né et auteur des érotiques
Tableaux des mœurs du temps
et l’un des commanditaires de l’édition des contes de La Fontaine dite «des
fermiers généraux»), qui béné cie de la plus longue notice (pp. 142-159) :
«
Le Riche de La Poupelinière. Il est natif de Paris et ls d’un receveur général des nances dont la femme étoit une
joueuse impitoyable qui auroit ruiné son mari s’il n’y avoit mis bon ordre...
I
L
A DE
L
’
ESPRIT
ET
BEAUCOUP DE MONDE
,
TIENT
BONNE
TABLE
,
AIME
LA MUSIQUE
ET GÉNÉRALEMENT
TOUS
LES
PLAISIRS
.
Ce qui n’en fait pas un des plus grands travailleurs quoiqu’il entende bien la matière des fermes. Si sa beauté ni sa
bonne mine ne le font pas soupçonner d’être homme à bonne fortune, il est certainement homme à avantures...
U
NE
NUIT
ÉTANT
COUCHÉ
AVEC
LA
DEMOISELLE
A
NTIER
,
ACTRICE
DE
L
’O
PÉRA
,
QUI
ALORS
ÉTOIT MAÎTRESSE
DU
PRINCE
DE
C
ARIGNAN
, ce prince vint chez elle environ sur le minuit, et comme il avoit une clef de son appartement, il trouva
la place occupée par le s
r
Le Riche. Il y eut un grand bruit entre ces rivaux si peu faicts pour se rencontrer. Le sieur
Le Riche t si bonne contenance que le prince fut contraint de le laisser habiller et sortir paisiblement, sans lui faire
d’autre mal que des menaces : il voulut les effectuer dès le lendemain, et fut à Versailles pour demander au cardinal de
Fleury de faire chasser le sieur de La Poupelinière des fermes pour avoir eu l’insolence de se trouver en concurrence
avec lui. Le ministre répondit à ce prince que le roi ne chasseroit point un bon sujet de ses fermes, pour une pareille
bagatelle, mais pour lui donner quelque espèce de satisfaction, et lui laisser la possession libre et tranquille de sa
maîtresse, s’il étoit possible qu’elle voulût bien se contenter de lui seul, on donna une espèce d’exil au s
r
Le Riche, qui
eut ordre de se rendre à Marseille où il resta 3 ans... : il y t une très grosse gure, s’y divertit beaucoup, et donna
quantité de belles fêtes aux dames qui furent très contentes de lui, et le regrettèrent beaucoup à son départ. Le pendant
de cette avanture n’est pas tout à fait de la même espèce...