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les collections aristophil

littérature

pris de vous en tenir à son régime et de laisser ses drogues. C’est

en général, tout l’usage que vous devriez faire de la medecine »...

[Fin décembre 1755]

[186/6]. Il signale un emploi vacant aux douanes

de Grenoble (avec note de la main de Thérèse Levasseur sur la p. 3),

et s’inquiète de la santé de Madame, lui recommandant « toujours le

ménagement : car je trouve qu’en general on prend trop de précau-

tions dans les autres tems et jamais assés dans les convalescences.

Pour moi je ne vaux pas la peine qu’on en parle »...

1756

.

Ce vendredi [janvier-février]

[188/52]. « J’apprends que vous

continuez de souffrir, et j’ai à ressentir vos maux et les miens. […]

Bonjour, Madame, nous souffrons tous deux et je suis triste. Avec tout

cela, je sens en pensant à vous, combien c’est une consolation douce

d’avoir un véritable ami, il n’y a plus que cela qui m’attache à la vie ».

Ce Vendredi [janvier-février]

[189/29]. « Si vous connoissiez l’état de

mon ame, vous verriez que vous n’etes pas de nous deux celle qui

a le plus besoin de voir l’autre. Ne prenez pas encore ceci pour une

déclaration mais bien pour le sentiment tendre et douloureux d’un

cœur flétri qui a besoin de trouver dans celui d’un ami des consolations

à l’amitié perdue. Ma santé se délabre de jour en jour davantage »…

[Janvier-février]

[190/3]. « Quelque impatience que j’aye de sortir pour

aller vous quereller, il faut, Madame, que je garde encore la chambre

malgré moi, pour une maudite fluxion sur les dents qui me désole »...

[Janvier-février]

[191/4], au dos de la lettre de Mme d’ÉPINAY à

Rousseau s’inquiétant de sa santé : « Le plaisir de vivre avec vous

me manque, voila mon plus grand mal et mon seul besoin. […] Je

souffre plus d’incommodité que de vraye douleur, mais je ne puis

sortir dans cet état. […] Je ne puis vous dire combien de consolation

je trouve dans nos dernières conversations »...

Ce Jeudi [4 mars ?]

[196/8]. Il la prie de lui prêter pour Mme DUPIN

de Chenonceaux le

Poème de la Religion naturelle

de VOLTAIRE ;

mais il ne sait où trouver celui « sur le tremblement de terre » de

Lisbonne. Il envoie, avec un air de musique copié, « la reverence de

l’ours » (sobriquet que lui avait donné Mme d’Épinay)…

Ce mardi [9 mars ?]

[197/5]. Il la conjure de ne plus lui envoyer le

Dr Malouin : « ne vous joignez pas à ces importuns amis qui pour

me faire vivre à leur mode me feront mourir de chagrin. En vérité

je voudrois être au fond d’un désert quand je suis malade ». Puis

il évoque la visite de SAINT-LAMBERT... « Ainsi j’ai le bonheur de

rassembler autour de moi tout ce que je voudrois fuir et d’écarter

tout ce que je voudrois voir. Cela n’est assurément ni fort heureux ni

fort adroit. Au reste je n’ai pas même entendu parler de DIDEROT.

Que de vocations pour ma solitude et pour ne plus voir que vous »...

[Mi-mars]

[198/10], après la proposition faite par Théodore Tronchin

d’un poste de bibliothécaire à Genève : « votre amitié pour moi y met

un obstacle qui me paroit plus que jamais difficile à surmonter, mais

vous avez plus consulté votre cœur que votre fortune et mon humeur

dans l’arrangement que vous me proposez ; cette proposition m’a

glacé l’ame ; que vous entendez mal vos intérêts de vouloir faire un

valet d’un Ami […] Je ne suis point en peine de vivre ni de mourir :

mais le doute qui m’agite cruellement c’est celui du parti qui durant

ce qui me reste à vivre peut m’assurer la plus parfaite indépendance.

[…] Je la cherche avec plus d’ardeur que jamais […] les plus grandes

probabilités sont pour mon païs, mais je vous avoue que je la trou-

verois plus douce auprès de vous. […] ce ne seront pas des raisons

d’intérest qui me détermineront, parce que je n’ai jamais craint que

le pain vint à me manquer et qu’au pis aller je sais comment on s’en

passe. Je ne refuse pas, au reste, d’écouter ce que vous avez à me

dire pourvu que vous vous souveniez que je ne suis pas à vendre »…

[Mi-mars]

[199/11] : « je ne puis souffrir que vous me croyez fâché […]

Je n’ai pris le mot de valet que pour l’avilissement où l’abandon de

mes principes jetteroit necessairement mon ame […] L’indépendance

que j’entens n’est pas celle du travail ; je veux bien gagner mon pain,

j’y trouve du plaisir ; mais je ne veux être assujeti à aucun autre devoir

si je puis. […] Je n’engagerai jamais aucune portion de ma liberté ni

pour ma subsistance ni pour celle de personne. Je veux travailler

mais à ma fantaisie, et même ne rien faire quand il me plaira sans

que personne le trouve mauvais hors mon estomac. […] Apprenez

mieux mon dictionnaire, ma bonne amie si vous voulez que nous

nous entendions »...

Ce mardi [23 mars ?]

[200/12]. Il ira « passer les fêtes de Pâques à

l’hermitage », mais redoute un déménagement.

Ce Jeudi [25 mars ?]

[201/13]. Il doit dîner chez le Baron [d’HOLBACH].

« Occupé des moyens de vivre tranquille dans ma solitude, je cherche

à convertir en argent tout ce qui m’est inutile, et ma musique me l’est

encore plus que mes livres », et il va la lui envoyer : « Vous y choisirez

tout ce dont vous pourrez me défaire, et je tâcherai de mon côté de

me défaire du reste. Je ne puis vous dire avec combien de plaisir je

m’occupe de l’idée de ne plus voir que vous ».

[29 mars ?]

[204/15], au dos d’une lettre de Mme d’ÉPINAY à « mon

ours » à laquelle il répond, au sujet de la vente de papier et de

musique, et d’un envoi de livres.

[31 mars ?]

[205/16]. « Quoique mon parti soit bien pris, je suis jusqu’à

mon délogement dans un état de crise qui me tourmente. Je desire

passionnément de pouvoir aller m’établir de samedi en huit »...

Ce samedi [3 avril]

[206/14] : « je suis horriblement occupé de mon

démenagement ce qui n’arriveroit pas s’il étoit composé d’objets plus

considérables et que soixante bras s’en occupassent pour moi »…

[13 avril]

[207/17], sur

son installation à l’Ermitage

. « Quoique le tems

me contrarie depuis mon arrivée ici, je viens de passer les trois jours

les plus tranquilles et les plus doux de ma vie. Ils le seront encore plus

quand les ouvriers qu’occupe mon luxe ou vôtre sollicitude seront

partis. Ainsi je ne serai proprement dans ma solitude que d’ici à deux

ou trois jours : en attendant je m’arrange, non selon la morale turque

qui veut qu’on ne s’établisse ici bas aucun domicile durable, mais selon

la mienne qui me porte à ne jamais quitter celui que j’occupe. Vous

me trouverez rangé délicieusement, à la magnificence près que vous

y avez mise et qui toutes les fois que j’entre dans ma chambre me

fait chercher respectueusement l’habitant d’un lieu si bien meublé ». Il

savoure « les beautés de mon habitation et les charmes d’une entière

liberté. Mais en me promenant ce matin dans un lieu délicieux j’y ai mis

mon ancien ami DIDEROT à côté de moi et en lui faisant remarquer les

agrémens de la promenade je me suis apperçu qu’ils s’augmentoient

pour moi-même […] Malgré la barbe de l’hermite et la fourrure de l’ours

trouvez bon que je vous embrasse »...

A l’hermitage ce lundi 19 [avril]

[208-18]. Son séjour le charme de

plus en plus. Il donne des instructions pour finir son déménagement,

et évoque une histoire de linge taché par une bouteille d’encre. Il

prie son amie de « continuer à raffermir tellement vôtre santé que

quand vous serez à la Chevrette vous puissiez venir frequemment

à l’hermitage chercher un ami et la solitude. Je vous montrerai des

promenades délicieuses que j’en aimerai davantage encore quand

une fois vous les aimerez. Vôtre conseil est bon et j’en userai désor-

mais, j’aimerai mes amis sans inquietude, mais sans froideur. Je les

verrai avec transport, mais je saurai me passer d’eux. Je sens qu’ils

ne cesseront jamais de m’être également chers, et je n’ai perdu

pour eux que cette délicatesse excessive qui me rendoit quelquefois

incomode et presque toujours mécontent. Au surplus je n’ai jamais

douté des bonnes resolutions de DIDEROT, mais il y a loin de sa porte

à la mienne et bien des gens à grater en chemin. Je suis perdu s’il

s’arrange pour me venir voir, cent fois il en fera le projet et je ne le

verrai pas une. C’est un homme qu’il faudroit enlever de chez lui et

le prendre par force pour lui faire faire ce qu’il veut »...

Ce mardi au soir [20 avril]

[209/30], s’inquiétant pour l’état des affaires

de son amie.

Ce samedi 1

er

may

[210/31]. « Je viens de courrir les bois à la rosée et

j’ai l’onglée, ainsi je ne vous écris qu’un mot pour vous dire que je suis

bien aise que vous vous portiez bien, que je me porte passablement

aussi, que nous vous remercions tous »...

Ce Dim. matin [été-automne ?]

[219/44]. « J’envoye, Madame, savoir

si vous êtes de retour en bonne santé. Je ne vais point vous voir

aujourdui parce que vous avez ordinairement du monde le dimanche.

Mais je vous verrai demain, s’il fait beau et que vous me fassiez dire

que vous n’aurez personne »...

[Été-automne ?]

[220/20]. « Je suis beaucoup mieux aujourd’hui mais

je ne pourrai cependant vous voir que la semaine prochaine, et j’irai

fièrement à pied, car cet appareil de carrosse me fait mal à l’imagina-

tion, comme si je pouvois manquer de jambes pour vous aller voir »...

Ce mercredi [été-automne ?]

[221/53]. « Quoique je ne craigne pas la

chaleur, elle est si terrible aujourdui que je n’ai pas le courage d’en-

treprendre le voyage au fort du soleil. Je n’ai fait que me promener

à l’ombre autour de la maison et je suis tout en nage. Ainsi je vous

prie de témoigner mon regret à mes prétendus confrères, et comme

depuis qu’ils sont Ours je me suis fait galant, trouvez bon que je vous

baise très respectueusement la main »...

[Été-automne ?]

[222/35]. « Je voulois vous aller voir jeudi, mais le

tems qu’il fit gâta tellement les chemins qu’ils ne sont pas encore

essuyés, je compte pourtant s’il fait beau tenter demain le voyage.

[…] je suis inquiet de vôtre situation de corps et d’esprit. Bon jour ma

Dame et amie, j’aspire à ces momens de tranquillité où vous aurez

le tems de m’aimer un peu »...

Ce Dimanche matin [septembre ?]

[224/43]. « Comme j’espère vous

aller voir dans la semaine, j’aurai bientôt la consolation d’achever avec

vous cet entretien. Au reste vous savez que le Philosophe [DIDEROT]

m’est venu voir », ainsi que M. d’Épinay. Il envoie deux copies du

Salve Regina

… « Vous prenez continuellement les eaux, il me semble

qu’il seroit bientôt tems de changer de régime pour reprendre un

peu de forces : mais [citant un vers de Voltaire]

Je ne suis qu’un soldat et je n’ai que du zèle

et je sens bien que mes ordonnances de medecine ne doivent pas

avoir plus d’autorité que mes livres de morale »...

[Mi-septembre ?]

[227/21]. « Je suis arrivé saussé et à une heure de

la nuit, mais du reste sans accident, et je vous remercie de vôtre

inquiétude ». Il dénonce le jardinier qui « a encore emporté ce matin

des pêches au marché de Montmorenci. On ne peut rien ajouter à

l’effronterie qu’il met dans ses vols, et bien loin que ma présence ici

le retienne, je vois très évidemment qu’elle lui sert de raison pour

porter chez vous encore moins de fruit qu’à l’ordinaire ». Il conseille

à Mme d’Épinay de le congédier…

[17 septembre]

[228/22]. Il est déterminé à passer l’hiver à l’Ermitage :

« Il m’est essentiel d’avoir du loisir, de la tranquilité, et toutes mes

comodités pour travailler cet hiver, il s’agit en cela de tout pour moi,

et il y a cinq mois que je travaille à pourvoir à tout, afin que nul soin

ne vienne me détourner. Je me suis pourvu de bois, j’ai fait mes

provisions, j’ai rassemblé, rangé des papiers et des livres pour être

comodément sous ma main. J’ai pourvu de loin à toutes mes aises en

cas de maladie. Je ne puis avoir de loisir qu’en suivant ce projet, et il

faudra necessairement que je donne à m’arranger le tems que je ne

puis me dispenser de donner à mon travail. […] dans la position où je

suis, mon tems, et mes comodités me sont plus précieux que ma vie »...

Ce Lundi [20 septembre]

[229/19]. Il a congédié le jardinier voleur. Il

attend DIDEROT, et a reçu « une lettre obligeante de VOLTAIRE »…

De l’hermitage, ce je ne sais pas quantième [automne ?]

[230/46],

faisant allusion à

La Nouvelle Héloïse

 : « Ce que vous me recom-

mandez étoit tout à fait superflu. Les Ecos de mes bois sont discrets,

j’ai pour l’ordinaire peu de choses à leur dire, et de ce peu je ne leur

en dis rien du tout. Le nom de Julie et le vôtre sont les seules choses

qu’ils sachent répéter »...

De l’hermitage à 10 heures du matin [25 ou 26 novembre]

[231/25].

« Il fait ici un froid rigoureux qui vient altérer un peu de bonne heure

ma provision de bois mais qui me montre par l’image prématurée

de l’hiver que, quoi qu’on en dise, cette saison n’est plus terrible

ici qu’ailleurs que par l’absence des amis ; mais on se console par