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Littérature
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VIGNY Alfred de (1797-1863).
18 L.A.S. « Alfred de Vigny » ou
« Alfred », 1820-1830, à Victor
HUGO ; 56 pages in-8, adresses
dont plusieurs avec cachets de cire,
montées sur onglets sur feuillets
de papier vélin, le tout relié en un
volume in-8 maroquin bordeaux,
plats et dos à nerfs ornés de filets et
d’un motif romantique doré aux petits
fers, doublure de maroquin même
ton serties d’un filet doré, gardes de
soie brochée vieil or, doubles gardes
tranches dorées (
Marius Michel
,
A. &
R. Maylander
).
20 000 / 30 000 €
Remarquable recueil de la correspondance
de Vigny à Victor Hugo, précieux
témoignage de l’amitié fraternelle entre
les deux grands poètes romantiques
.
[En 1820, Vigny a fait la connaissance de
Victor Hugo, son cadet de cinq ans, par
l’intermédiaire de leurs amis communs Émile
et Antoni Deschamps. Vigny, qui suit une
carrière militaire, n’a alors rien publié, tandis
qu’Hugo est déjà célèbre. En décembre,
Le
Conservateur littéraire
, fondé par les frères
Hugo, va publier ses premiers textes. Nous
renvoyons entre crochets pour chaque lettre
à l’édition de 1989 de la
Correspondance
de Vigny.]
[Courbevoie] 22 octobre [1820
. 20-2]. Il
félicite « Monsieur Victor » de son
Ode sur
la naissance du duc de Bordeaux
: « Vous
avez fait là un bel ouvrage sur un sujet où
l’on marche toujours au bord du vulgaire, et
jamais le pied ne vous a glissé ». Il est malade.
« Je ne fais rien, comme vous pensez, que
rêver à quelques projets pour l’avenir, et j’ai
un singulier plaisir à oublier ce que j’ai fait,
j’y reviendrai ensuite pour perfectionner,
mais j’aime les pays nouveaux. […] je sens
que mon imagination est comme Phaéton,
elle meurt si elle n’est libre »...
[
Orléans février-mars 1823
. 23-4]. Il n’est pas
allé embrasser Victor avant de partir, mais
(allusions à la folie d’Eugène Hugo, et à ses
propres amours contrariées pour Delphine
Gay) : « J’avais honte de toutes ces misères
du cœur lorsque je les comparais à ces
grands fléaux dont nous frappe notre propre
nature physique quand elle se dégrade
tout-à-coup longtems avant la mort, et que
l’âme s’absente en laissant le corps debout
et souriant comme ces horribles figures
d’Herculanum ».
Han d’Islande
remplit son
esprit tout entier : « c’est un beau et grand et
durable ouvrage que vous avez fait là. Vous
avez accompli tout ce que j’attendais lorsque
j’eus dans les mains le premier chapitre.
Vous avez posé en France les fondemens de
Walter Scott. Votre beau livre sera pour nous
comme le pont de lui à nous et le passage
de ses couleurs à celles de France »…
Bordeaux 26 août 1823
. [23-13]. Commentaires
sur le 2
e
numéro de
La Muse française
, et les
articles d’Hugo, notamment celui sur Walter
SCOTT : « Je lui en veux mortellement de
déflorer ainsi notre histoire pour habiller de
ses nobles traits ses paysans d’Écosse ». Puis
il évoque son travail sur son poème
Satan
(qui deviendra
Éloa
) : « J’ai pensé, j’ai écrit.
Satan
est fait, c’est-à-dire, en style de mon
ami Girodet, je n’ai fait que couvrir la toile,
il me reste tout à retoucher »...
[Bordeaux] 20 octobre [1823
. 23-29]. Sur la
mort du premier fils des Hugo : « Que vous
dire, mon bon ami, sinon que je pleure
comme vous ? Je ne sais pourquoi on a créé
le mot de consolation, quand la chose n’existe
pas. Il n’y en a pas pour ceux qui sentent le
malheur tout entier, tout fort comme il est.
Vos douleurs de père ont été bien proches
de celles de fils et de frère ; vous êtes accablé
par les peines de famille, cette assemblée
naturelle que l’on croit notre seule source
de biens »...
22 mai 1824
. [24-10]. Après l’article louangeur
d’Hugo dans
La Muse française
sur
Éloa
, et
la publication des
Nouvelles Odes
. « Malgré
les illusions de votre amitié, malgré les éloges
trop grands de mon ouvrage, le vôtre est
une bien belle chose, mon ami ; je ne sais
rien de supérieur à votre définition de la
méditation et de l’inspiration. Tous les poëtes
du monde vous doivent de la reconnaissance
pour avoir fait connaître au profane vulgaire
quelle est leur nature […] Vous n’avez pas
cherché bien loin votre modèle, vous êtes
descendu en vous. Vous y avez aussi trouvé
cette fraternelle amitié dont vous parlez avec
tant de charme et que j’ai si bien aussi pour
vous ». Hugo doit faire « un bel article pour
la mort de Lord Byron »...
[Oloron] 25 juillet 1824
. [24-18]. Sur le
sabordage de la revue
La Muse française
.
« Je ne comprends rien à tout ce qu’on
m’écrit, cher ami, mais du fond de mes
montagnes il me semble que nous faisons
une sottise. Quoi la Muse cesserait quand elle
est devenue une puissance ? Autant vaudrait
que des hommes chassés de tous les ports
de mer et exilés sur l’océan s’avisassent de
brûler leur vaisseau ». Quant à lui, il travaille,
« et je me trouve heureux de ne plus voir la
littérature pour mieux vivre avec la poësie ».
Il aimerait savoir ce que Chateaubriand a
pensé d’
Éloa
… Il conclut : « Combattons
toujours. Nous nous appelons tous les deux
Victor, qui veut dire vainqueur dans la langue
classique »…
Pau 5 octobre 1824
. [24-27]. « L’Ennui
m’environne, je vis seul, les Pirénées sont
sous mes yeux, et vous pouvez croire que
je n’écris pas ! Je ne cesse de penser que
pour écrire tout ce qui s’accumulerait dans
ma tête. J’ai fait et terminé un mystère, mais
c’est le troisième [
Le Déluge
] et non celui
que je vous avais raconté : ce Satan qui
effrayait votre amitié pour moi, et auquel je
ne puis cependant résister je l’achève aussi
à présent. L’autre est sur la terre et j’y ai mis
toute cette immense nature que je représente
avec tous les arts qui sont dignes d’elle. Je
vois de mon balcon les montagnes qui voient
la Méditerranée, et à ma droite celles que
.../...