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Delelis (1827-1886), et fils d’un magistrat à la Cour de Douai : âgé de 24 ans au moment de la mobilisation générale, Camille-

Edmond-Charles de Warenghien de Flory (1890-1965) sera décoré de la Croix de guerre 1914-1918.]

Les premiers feuillets portent les noms de « télémétristes », afficheurs, téléphonistes et servants des pièces d’artillerie, lui-

même étant chef de la 1

re

pièce du 1

er

groupe. D’emblée, « La tension s’accroît. On parle de complications possibles. Ce jour-là

je suis partie de grand matin avec mes hommes à la batterie de Zuydcoote continuer des travaux. Il s’agit de poser les rails

Decauville depuis le magasin bétonné jusqu’à la batterie de Zuydcoote afin d’y amener le plus vite possible les affûts de 24 »…

Soirée en famille : « je dis étourdiment comme je serai heureux de voir la mobilisation. Cela completterait mon éducation

militaire. Ce serait intéressant de voir comment cela fonctionne et puis cela ne doit pas manquer de pittoresque. Mes parents

levèrent les yeux au ciel »… Rumeurs, préparatifs, ordres de marche à Mardyck… Nouvelle de l’assassinat de Jaurès, guet

nocturne, annonce de la mobilisation générale, visite de son frère Amaury qui lui apporte des fournitures « qui devaient m’être

bien utiles » : des caleçons, un briquet, des articles de papeterie et de pharmacie... Anecdote sur les parents d’un fantassin qui

arrivent à la batterie de Dunkerque avec des vivres, comme Roxane au siège d’Arras dans

Cyrano

… Visite touchante de ses

parents et son frère, ce dernier devant sans doute être envoyé au camp de Sissonne : « Nous échangeâmes un regard. Toute ma

vie j’aurai devant les yeux ce regard de mon frère »… Amaury sort de sa poche un « jouet » de leur jeunesse insouciante : un

« appareil photographique » ; chacun prend la photo de l’autre… Le soir, on tire sur un bateau qui se dirige vers Dunkerque : « Je

chargeai moi-même l’obus, c’était un obus explosif chargé de mélinite. L’explosion fut terrible mais le coup tomba long. La faute

en était aux télémétristes qui n’avaient pas calculé l’altitude du moment »… Dunkerque regorge d’espions : « On les fusillait

un peu partout. Des allemands avaient distribués des carrés de bouillon Kub empoissonnés. Ils avaient été découverts »…Visite

du gouverneur général, et instructions du capitaine : « Toute personne qui la nuit ne donnerait pas le mot devait être arrêtée : si

elle bronchait il ne fallait pas hésiter. “V’lan dans la gueule de l’enfant”. Cette expression fit beaucoup rire »… Le lendemain 7

août nouvelles d’exécutions d’espions à Lille et à Croix, escarmouches sur la frontière de l’Est, déclarations d’hostilité, et le 8 on

apprend la violation de la neutralité de la Belgique et de la Hollande, des combats autour de Visé, des pertes invérifiables… « Des

hostilités ont été engagées en mer deux croiseurs allemands seraient coulés, il y aurait cinq mille morts […] Le soir le sous-

lieutenant Pellen me dit que Liège résistait, que l’Allemagne avait sommé la Belgique de faire un armistice. Le roi Albert avait

répondu qu’il préférait passer sur 100 000 cadavres plutôt que de capituler. […] On disait encore que l’Autriche et l’Allemagne

avaient sommé l’Italie de se joindre à eux »…

On joint la copie d’un rapport du lieutenant Douchet, commandant le 63

e

régiment d’artillerie (commandant en second :

adjudant de Warenghien) : compte rendu du début de la bataille de l’Aisne, 26 et 27 mai 1918 (5 p. in-fol., cachet

Hôpital

auxiliaire 405. Union des Femmes de France

).

274.

GUERRE 1914-1918

. Manuscrit autographe du journal de guerre de Charles Dürr, 1914-1919 ; 227 pages

in-12 sur papier quadrillé provenant de carnets à feuillets perforés détachables (au crayon et au crayon violet), sous

chemise cartonnée, étui demi-maroquin rouge titré au dos

C

h

. D

ürr

– Journal de Guerre 1914-1918

.

600/800

Très intéressant journal de guerre. D’un style très sobre, le journal s’ouvre par une liste de noms de communes, laquelle

s’enchaîne sur des entrées datées, commençant par le soir du 29 septembre 1914, à Lachalade (Meuse). Le soldat a 21 ans au

moment de la mobilisation générale ; il connaît son baptême de feu le 22 août 1914. On le suit dans la Meuse, la Somme, la

Meurthe-et-Moselle, puis après l’armistice, dans le Bas-Rhin et le Palatinat ; il est démobilisé le 2 septembre 1919. « Le 30

[septembre 1914] au matin nous partons et passons par le flanc des montagnes (marche très pénible) puis nous nous déployons

en tirailleurs puis ouvrons le feu. En allant chercher les blessés les Français perdent 1 mitrailleuse et 3 caissons »… L’auteur

est nommé caporal le 9 novembre 1915 ; il reçoit la croix de guerre le 19 décembre ; le 25 août 1916 il assiste à l’exécution d’un

soldat condamné à mort par le Conseil de guerre (« Après l’exécution le régiment défile devant le poteau »), et le 19 septembre,

à la dégradation d’un soldat pour désertion devant l’ennemi… Il consigne la chute d’un avion, l’éclatement d’obus sur Reims,

l’incendie d’un zeppelin, l’air irrespirable, le pays brûlé, la terre bouleversée, l’odeur de cadavre, la vermine et les rats, la soif

insupportable, aussi bien que quelques petites consolations : une sape bien tenue, des distributions de cigarettes et chocolat

par les infirmières anglaises. Le 17 juillet 1917, récit d’un assaut : « rien ne nous arrête […]. Au loin les Poilus progressent

toujours à perte de vue. Nous voyons des groupes à la recherche des boches, ces groupes ont dépassé notre tir de barrage, les

75 leur éclatent dans le dos, ça ne fait rien, une fusée verte est lancée et le 75 rallonge son tir. Les prisonniers boches comment

à rappliquer […] ce sont des vrais cadavres vivants »… Ils reçoivent l’ordre de se porter en avant, dans la tranchée Huguenot

(ancienne 1

re

ligne française), mais elle est introuvable, ils s’abritent dans un trou d’obus jusqu’à ce que les marmites les en

chassent : « il y a des fils de fer barbelés, je suis un peu embrouillé dedans, mais les balles sifflent autour de moi et le spectre

de la Mort se dressant devant mes yeux je me dégage dans un suprême effort et saute ou plutôt me laisse tomber dans la

tranchée », etc. Le sentiment d’abandon par la société civile est aigu : «

le combattant et un zéro en chiffre c’est pareil

[…]. À

part une Mère, une fiancée ou un Poilu au front personne quelque degré de parenté ait-il, personne ne nous écrit,

c’est général. Le civil est très occupé !! Il n’a pas le temps d’envoyer un petit mot de consolation au pauvre Poilu

qui souffre physiquement et moralement pour le défendre, non c’est trop pour lui […]. Le Poilu ou pour préciser

le combattant éprouve de la haine pour le civil » (8-9 octobre 1917)… Etc. On joint qqs ff. de notes, un

Bulletin de

renseignements

du Groupe des Armées du Centre et une coupure de presse.

275.

GUERRE 1914-1918

. 2 cahiers autographes signés de François Fichoux, 2 août-23 novembre 1914 et

30 novembre 1914-1

er

juillet 1915, avec quelques notes postérieures ; 2 cahiers de 102 pages in-8, et 75 pages petit

in-4, couvertures toile cirée noire (à la mine de plomb et au crayon violet).

700/800