91
beaux-arts
123
MONET CLAUDE (1840-1926).
L.A.S. « Claude Monet », Pourville mercredi soir
[19 février 1896 ?], à SA FEMME ALICE ; 4 pages in-8
à en-tête de
Giverny
.
4 000 / 5 000 €
Belle lettre avant de se mettre au travail sur le motif à Pourville
près de Dieppe
.
Il s’inquiète de la santé de sa femme, à qui il recommande de bien se
soigner… « Quand à moi je suis rendu de fatigue tant j’ai marché grimpé
en deux jours, les jambes ne sont décidément plus si solides. Enfin
j’ai la certitude de travailler. C’est le grand point. Hier par le splendide
soleil qu’il faisait, j’ai tout vu, et aujourd’hui temps gris j’ai refait les
mêmes pérégrinations et sais ce que je ferai par l’un ou l’autre temps.
Je serai donc à l’œuvre demain à la première heure à moi de pluie,
ce dont j’ai un trac monstre »... Il craint de ne pouvoir écrire tous les
soirs à Alice : « cela voudra toujours dire que le travail marche. C’est
décidément un endroit superbe malgré les horribles maisons qui se
sont élevées en masse et ici on peut au moins regarder la mer tout le
jour sans être aveuglé ». Il occupe dans le petit pavillon « une petite
chambre au midi, où je couche et une plus grande avec balcon sur
la mer. J’ai du reste toutes mes aises ici, et toutes les commodités
possibles. Mais ce n’est plus la même cuisine que dans le temps »,
et le beurre est infect…
Il ne sait s’il viendra dimanche; il aura peut-être besoin de prendre
d’autres toiles : « cela dépendra et du temps et de ce que j’aurai fait
d’ici là »…
À Dieppe, il est tombé sur THAULOW : « c’est peut-être un bon garçon
mais j’ai de la méfiance et ce doit être un crampon » ; quand il sera à
Paris, il veut venir voir Monet en bicyclette, « et il est gros et grand »…
Il termine en envoyant toutes ses tendresses à Alice et aux enfants.
midi du soleil qui s’est couché juste quand il me le fallait. Demain,
ce sera du gris noir ou de l’eau, et j’ai grand peur encore une fois
de lâcher et de revenir subitement. J’ai beau travailler je n’aboutis à
rien. Ce soir j’ai voulu comparer ce que j’ai fait tous ces jours avec
les anciennes toiles, que j’évite de voir trop, pour ne pas tomber dans
les mêmes errements, eh bien le résultat, c’est que j’avais raison l’an
dernier d’être mécontent, c’est horrible et ce que je fais cette fois, est
aussi mauvais, autrement mauvais, voilà tout. Il faudrait ne pas vouloir
faire cela vite, essayer, essayer encore, pour refaire une bonne fois.
Mais, je sens la lassitude venir. Je suis à bout, et cela prouve bien
que j’ai absolument vidé mon sac. Crébleu ils ne voient pas loin ceux
qui me trouvent un maître, de belles inventions oui, mais c’est tout.
Heureux les jeunes ceux qui croient que c’est facile, je l’ai été, c’est
fini. Et cependant demain à 7 h. j’y serai. […] Je t’envoie toutes mes
pensées dans un baiser »…
122
MONET CLAUDE (1840-1926).
L.A.S. « ton vieux Monet qui t’aime », Sandviken 24 mars
1895, à SA FEMME ALICE ; 2 pages in-8 sur papier ligné
(petit trou au pli).
2 500 / 3 000 €
Belle lettre de Norvège
.
« Ma pauvre bonne chérie. Deux mots à la hâte car je suis dans les
réception et exhibition de mes toiles. J’ai reçu ce matin la bonne
lettre de Marthe [Hoschedé, sa belle-fille] ainsi que celle de Michel
[son fils] qui toutes deux me font bien plaisir, mais je vois que tu
étais encore bien faible à la date de mercredi 20, […] je ne suis pas
sans me tourmenter un peu. J’ai pu travailler un peu hier et pas trop
mal mais aujourd’hui la neige tombe tellement qu’il y a des chances
pour que je ne puisse rien faire. J’attends de tes nouvelles avec
impatience. Il est midi, Jacques [Hoschedé, son beau-fils] n’est pas
encore là je l’attends. Mais j’ai appris hier que tout en étant heureux
de m’avoir là, il sentait que parlant plus le français il désaprenait
un peu le norvégien, il est donc grand temps que je le quitte. Mes
toiles jusqu’à présent paraissent plaire beaucoup à ceux qui sont
capables de comprendre et on est désespéré que je ne veuille pas
les exposer à Christiania. Mais j’attends de nouveaux visiteurs »… Il
recommande à Alice la prudence et lui envoie « toute ma tendresse
et des baisers pour tous »…
122
123