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beaux-arts

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MONET CLAUDE (1840-1926).

L.A.S. « Claude Monet », Pourville mercredi soir

[19 février 1896 ?], à SA FEMME ALICE ; 4 pages in-8

à en-tête de

Giverny

.

4 000 / 5 000 €

Belle lettre avant de se mettre au travail sur le motif à Pourville

près de Dieppe

.

Il s’inquiète de la santé de sa femme, à qui il recommande de bien se

soigner… « Quand à moi je suis rendu de fatigue tant j’ai marché grimpé

en deux jours, les jambes ne sont décidément plus si solides. Enfin

j’ai la certitude de travailler. C’est le grand point. Hier par le splendide

soleil qu’il faisait, j’ai tout vu, et aujourd’hui temps gris j’ai refait les

mêmes pérégrinations et sais ce que je ferai par l’un ou l’autre temps.

Je serai donc à l’œuvre demain à la première heure à moi de pluie,

ce dont j’ai un trac monstre »... Il craint de ne pouvoir écrire tous les

soirs à Alice : « cela voudra toujours dire que le travail marche. C’est

décidément un endroit superbe malgré les horribles maisons qui se

sont élevées en masse et ici on peut au moins regarder la mer tout le

jour sans être aveuglé ». Il occupe dans le petit pavillon « une petite

chambre au midi, où je couche et une plus grande avec balcon sur

la mer. J’ai du reste toutes mes aises ici, et toutes les commodités

possibles. Mais ce n’est plus la même cuisine que dans le temps »,

et le beurre est infect…

Il ne sait s’il viendra dimanche; il aura peut-être besoin de prendre

d’autres toiles : « cela dépendra et du temps et de ce que j’aurai fait

d’ici là »…

À Dieppe, il est tombé sur THAULOW : « c’est peut-être un bon garçon

mais j’ai de la méfiance et ce doit être un crampon » ; quand il sera à

Paris, il veut venir voir Monet en bicyclette, « et il est gros et grand »…

Il termine en envoyant toutes ses tendresses à Alice et aux enfants.

midi du soleil qui s’est couché juste quand il me le fallait. Demain,

ce sera du gris noir ou de l’eau, et j’ai grand peur encore une fois

de lâcher et de revenir subitement. J’ai beau travailler je n’aboutis à

rien. Ce soir j’ai voulu comparer ce que j’ai fait tous ces jours avec

les anciennes toiles, que j’évite de voir trop, pour ne pas tomber dans

les mêmes errements, eh bien le résultat, c’est que j’avais raison l’an

dernier d’être mécontent, c’est horrible et ce que je fais cette fois, est

aussi mauvais, autrement mauvais, voilà tout. Il faudrait ne pas vouloir

faire cela vite, essayer, essayer encore, pour refaire une bonne fois.

Mais, je sens la lassitude venir. Je suis à bout, et cela prouve bien

que j’ai absolument vidé mon sac. Crébleu ils ne voient pas loin ceux

qui me trouvent un maître, de belles inventions oui, mais c’est tout.

Heureux les jeunes ceux qui croient que c’est facile, je l’ai été, c’est

fini. Et cependant demain à 7 h. j’y serai. […] Je t’envoie toutes mes

pensées dans un baiser »…

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MONET CLAUDE (1840-1926).

L.A.S. « ton vieux Monet qui t’aime », Sandviken 24 mars

1895, à SA FEMME ALICE ; 2 pages in-8 sur papier ligné

(petit trou au pli).

2 500 / 3 000 €

Belle lettre de Norvège

.

« Ma pauvre bonne chérie. Deux mots à la hâte car je suis dans les

réception et exhibition de mes toiles. J’ai reçu ce matin la bonne

lettre de Marthe [Hoschedé, sa belle-fille] ainsi que celle de Michel

[son fils] qui toutes deux me font bien plaisir, mais je vois que tu

étais encore bien faible à la date de mercredi 20, […] je ne suis pas

sans me tourmenter un peu. J’ai pu travailler un peu hier et pas trop

mal mais aujourd’hui la neige tombe tellement qu’il y a des chances

pour que je ne puisse rien faire. J’attends de tes nouvelles avec

impatience. Il est midi, Jacques [Hoschedé, son beau-fils] n’est pas

encore là je l’attends. Mais j’ai appris hier que tout en étant heureux

de m’avoir là, il sentait que parlant plus le français il désaprenait

un peu le norvégien, il est donc grand temps que je le quitte. Mes

toiles jusqu’à présent paraissent plaire beaucoup à ceux qui sont

capables de comprendre et on est désespéré que je ne veuille pas

les exposer à Christiania. Mais j’attends de nouveaux visiteurs »… Il

recommande à Alice la prudence et lui envoie « toute ma tendresse

et des baisers pour tous »…

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