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monde plein de bruit – et de fureur – où l’amour, souvent, porte le nom de haine, où la passion de vivre s’exhale en
cris de désespoir ; un monde dévasté par la solitude et qui de loin paraît aride. Il ne l’est pas. “Je suis un désert qui
monologue” m’a écrit un jour Violette Leduc : j’ai rencontré dans les déserts des beautés innombrables. Et quiconque
nous parle du fond de sa solitude nous parle de nous. L’homme le plus mondain ou le plus militant a ses sous-bois où
personne ne s’aventure, pas même lui, mais qui sont là : la nuit de l’enfance, les échecs, les renoncements, le brusque
émoi d’un nuage au ciel. Surprendre un paysage, un être tels qu’ils existent en notre absence : rêve impossible que
nous avons tous caressé. Si nous lisons
La Bâtarde
, il se réalise, ou presque. Une femme descend au plus secret de soi,
et elle se raconte avec une sincérité intrépide, comme s’il n’y avait personne pour l’écouter. “Mon cas n’est pas unique”
dit Violette Leduc en commençant ce récit. Non : mais singulier et significatif. Il montre avec une exceptionnelle clarté
qu’une vie, c’est la reprise d’un destin par une liberté »…
15.
Pierre-Jean de BÉRANGER
(1780-1857). 13 L.A.S., 1834-1854, à divers ; 22 pages in-8, la plupart avec
adresse.
300/400
B
el
ensemble
de lettres du chansonnier adressées à
A
lter
(envoi de vers d’Alphonse Bezenard, détenu, 1843) ; à son
cher
B
ertrand
(félicitations, 1854) ; à Auguste de
D
aucourt
, étudiant en droit (pour lui offrir ses
Chansons
, 1847) ; à
D
avid
d
’A
ngers
(à propos d’une place à l’imprimerie royale pour un protégé du sculpteur, le compositeur Dulay) ; à
François
D
uquesne
, à
La Ruche populaire
(vœux de succès, 1843) ; à son ami le poète
G
uernu
(à propos d’un manuscrit
à présenter à l’éditeur Perrotin, 1834) ; à Mme
L
emaire
(invitation, 1843) ; à son éditeur
P
errotin
(sur son départ pour
un séjour à Rougeperriers [chez Dupont de l’Eure], 1839) ; à Mme Eugène
S
cribe
(évoquant l’appui de Scribe à
Lachambaudie : « lui aussi méritait le prix de vertu accordé à Halévy », 1844) ; à Camille
T
rocard
(hommage à l’auteur
d’un
Chant républicain
, 1849) ; à une chère enfant [Mme Arnould ?] (lui déconseillant de monter à Paris : « il n’y a plus
à compter sur les ressources littéraires, et surtout théâtrales, au moins d’ici à un an. Tous ceux qui vivaient de cela
meurent de faim », 1848)…
16. [
Henri BÉRAUD
(1885-1958)]. 7 lettres ou pièces, 1923-1924.
100/150
A
utour
de
la
polémique
de
B
éraud
contre
la
NRF
et
ses
auteurs
,
et
le
pamphlet
L
a
C
roisade
des
longues
figures
(1924). René
Christian-Frogé (protestation au nom du Comité de l’Association des Écrivains combattants, dont Béraud, contre
l’accusation de plagiat lancée contre Pierre Benoit par Pierre Mille) ; Pierre Lafue (« Pour le dossier de M. Béraud. Le
point de vue de l’étranger ») ; George-Armand Masson (fragment d’article paru en Uruguay et en Autriche), Raoul
Monmarson (« Détruisons notre propagande, mais pour la reconstruire et lui donner des chefs ? ») ; traduction d’un
article d’
Il Messagero
de Rome, « La Décadence des écoles littéraires en France » ; note critiquant Béraud, rancunier à
l’égard de la
NRF
; vers satiriques sur la poésie française contemporaine.
O
n
joint
divers documents.
17.
Tristan BERNARD
(1866-1947).
M
anuscrit
autographe signé,
Mes débuts sur la Côte normande
; 9 pages
in-8, au dos de papier à en-tête de l’
Hotel Rubens
à Londres.
150/200
R
écit
de
ses
premières
vacances
à
la mer
en
famille
,
à
neuf
ans
,
en
N
ormandie
.
… « Donc papa avait décidé que l’on irait à
Trouville. Et ce jour-là Maman l’avait regardé avec un peu d’appréhension. Un autre que mon père aurait hésité. Mais
il avait l’audace et la ténacité de Christophe Colomb »... Personne n’avait jamais vu la mer ; il raconte le voyage de
Besançon à Trouville, en passant par Paris, et leur arrivée : « Pendant trois semaines, nous ne fîmes que cela : des forts
de sable ». La mer ne leur fit pas grande impression : « Plus tard, quand nous eûmes lu les poètes, nous apprîmes à
regarder les vagues, à contempler l’horizon »… Il se souvient d’une représentation au théâtre de la ville, qui lui aurait
fait très plaisir, sans la fâcheuse habitude de ses parents à tout critiquer : « Le théâtre, c’est un plaisir, on est là pour
s’amuser. Et les adultes, pour prouver qu’ils sont de grandes personnes à qui on ne la fait pas, passent leur temps à
gâter la joie des enfants ! »…
18.
Tristan BERNARD
. 9 L.A.S., 1913-1937 et s.d. ; 9 pages et quart formats divers, qqs en-têtes et adresses.
100/150
Lettres à Paul
R
eboux
, relatives à des articles et à « un poulain d’avenir » pour le
Journal
(1913)… À Pierre
W
olff
:
condoléances, promesse d’invitation, recommandation d’une cousine tragédienne et du jeune Valdo ; longue lettre en
tant qu’« ami des chiens qui trouve l’humanitarisme trop étroit, et qui souffre de voir traiter ces braves animaux comme
des créatures inférieures, sous prétexte qu’ils ont échappé à cette glorieuse et dangereuse infirmité qui s’appelle la
parole », avec portrait de sa chienne Mizère. « Tout ceci pour renforcer ta thèse généreuse, et répéter que l’homme n’a
pas droit de vie et de mort sur les chiens » (1935)… Lettres à ses banquiers (Cannes 1937-1938)…
19.
Pierre-Eugène Dufour dit
Paterne BERRICHON
(1855-1922), poète, peintre et sculpteur, beau-
frère d’Arthur Rimbaud dont il avait épousé la sœur Isabelle.
M
anuscrit
autographe signé,
Les Poëtes
conférencés
, [1889] ; 2 pages et demie in-8 avec ratures et corrections.
300/400
Compte rendu d’une conférence (mouvementée) du critique littéraire Pierre
V
alin
. Cet article a paru dans
La Cravache
,
journal dirigé par Georges Lecomte, le 23 février 1889. Valin avait annoncé qu’il ferait la première d’une série de