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les collections aristophil
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EINSTEIN Albert
(1879-1955).
L.A.S. « Dein Papa », 18 décembre
1928, à son fils Eduard (« Tetel ») ;
1 page in-4 ; en allemand.
2 500 / 3 000 €
Belle et émouvante lettre à son fils schi-
zophrène
.
[Eduard Einstein (1910-1965) sera hospitalisé
pour la première fois en 1930 à l’hôpital de
Burghölzli, clinique psychiatrique universi-
taire de Zurich, où son père lui rendit une
dernière visite en 1933 avant de partir pour
l’Amérique.]
« Mit grossem Staunen hab ich vernommen,
dass Du Dich für exakte Wissenschaft zu
interessieren anfängst. Ich habe Dir deshalb
ein nüchternes aber kluges Buch darüber
geschickt. Sag mir dann, ob Du Freude daran
findest. Geld hab ich gerade keines liquid,
weil die 10000 M fest angelegt sind und
natürlich noch keine Zinsen da. Geh nur
fleissig auf den Zürichberg, das ist ebensogut
nicht wie [Wilhelm] Buschs Held (Lieber
wär ich anderswo; hier bin ich ja sowieso).
Albert mit Dame kommt Weihnachten; ich
aber gehe übermorgen in meine Einsiedelei.
Der Plesch hat nämlich ein grosses Gut aus
Wasser gekauft und da gibt es eine leere
Chauffeur-Wohnung. Da koche ich mir selbst
und bin ganz alleene.
Jetzt bist Du in dem Alter, wo Du viel bei
mir sein solltest. Ich schlage Dir vor, dass
wir Ostern trotz Matura zusammen sind. Ich
muss sowieso an meinem 50. von zuhause
weg sein. Gesundheitlich geht es langsam
besser, zumal ich mich sehr still halte und
nirgends hin gehe. (Dafür kommen aber
viele). Ich arbeite sehr viel und die hehre
Göttin der Weisheit führt mich an der Nase
herum. Ich weiss immer noch nicht, ob in
meinem neuen Ei ächtes Leben ist »...
Il a été surpris d’apprendre que Tetel s’inté-
resse à la science exacte. C’est pourquoi il
lui a envoyé un livre simple mais intelligent
à ce sujet, et il demande s’il l’a apprécié.
Einstein n’a pas d’argent pour le moment
car les 10.000 marks sont fixes et bien sûr
sans intérêt. Il ne peut aller au Zürichberg,
et évoque le héros de Wilhelm Busch (il
préférerait être ailleurs, mais est ici quand
même). Son fils aîné Albert vient à Noël avec
sa femme ; mais Einstein part le surlendemain
à son ermitage, dans le pied à terre de son
chauffeur Janos Plesch au bord de l’eau. Il fait
sa propre cuisine et y est complètement seul.
Tetel est à l’âge où il devrait être beaucoup
avec son père. Einstein aimerait qu’ils passent
Pâques ensemble, malgré l’examen de fin
d’études ; il doit quand même être loin de
chez lui pour ses 50 ans. La santé s’améliore
lentement, d’autant plus qu’il reste très calme
et ne va nulle part… Il travaille beaucoup et
la noble déesse de la sagesse le guide. Mais
il ne sait toujours pas s’il y a de la vraie vie
dans son nouvel œuf…