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Joe BOUSQUET
(1897-1950). L.A.S., Carcassonne 29 janvier 1948, [à Paul Éluard] ; 6 pages in-4 (petites fentes
aux plis).
700/800
Longue réflexion sur le sens de l’acte poétique.
« Singulier destin que le nôtre ! Je vous ai admiré et même envié quand vous ignoriez mon nom. […] Nous sommes entrés
en même temps – et en pleine maturité – dans l’expérience politique, créant un
fait historique
dont il faudra bien tenir compte.
Car aucune théorie ne tient contre l’événement, surtout si celui-ci s’appuie sur des vies sincères et vouées. [...] Sans les lenteurs
de la matière, l’homme disparaîtrait dans ce qu’il dit : parler, c’est être à un certain degré et penser, le même être sous un certain
angle. Nous avons senti cela en même temps. [...] Nous seuls, peut-être, nous avons senti, en 1940 – que tout ce qui n’était pas
expérience poétique restait sans intérêt véritable... S’engager. Quelle sottise. La poésie ne doit rien à rien, il n’est rien qui ne
se doive à elle, par un côté au moins. Celui qui pourrait ne pas mourir. Si un poète sans aucun talent est mort au poteau, livré
à l’amitié allemande par son sens entièrement pur de l’acte poétique, même trahi par ses forces, même écrasé sous son silence,
il est digne de notre admiration par sa seule attitude. La poésie sous-entend le salut de l’homme. Mais jusqu’à ce miracle d’y
sacrifier le sien propre et l’homme que l’on est. Le fait que le langage est, avec des significations de plus en plus hautes a permis
cela... Et moi, et mes poèmes... Peu importent les poèmes. Le jour où, dans mon cœur, j’ai accepté ma blessure, le jour où me
souvenant qu’à trente mètres des Allemands, je m’étais levé sous le feu, j’ai pu me féliciter d’avoir agi ainsi ; et, seul devant ma
conscience, avec un espoir d’outre-monde qui se formait lentement, me dire : “Sans doute possible, et devant ma conscience, je
voudrais recommencer ma vie et ne pas agir autrement...” Ce jour-là, la partie était gagnée par la poésie, je venais de mesurer
l’acte poétique : une adhésion à la parole au regard de quoi vivre et ne pas vivre s’équivalaient... Ce point atteint, il importait
peu que la poésie fut la mienne ou celle d’un homme aussi entièrement voué »... Etc. Il termine en exprimant sa gratitude : « Ce
que vous venez d’écrire sur moi dépasse tout ce que mon œuvre et mon sort ont jamais inspiré. [...] Votre article demeurera près
de moi, je le relirai dans les moments de doute »...
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Joe BOUSQUET
. Poème autographe signé,
Petit-jour
; 1 page petit in-8.
700/800
Beau poème de trois quatrains.
« Pour fermer les yeux du rêve en allé
Dont elle est la sœur aux paupières closes
Une rose est née au nid d’une rose
Il n’est plus de nuit pour l’ombre qu’elle est »...
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