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927

PROUST, Marcel.

Du côté de chez Swann

.

Paris, Bernard Grasset, 1914

[1913].

Fort in-12 [191 x 139 mm] de (2) ff., 524 pp., la dernière pour l’achevé d’imprimer non numérotée :

maroquin rouge à grain long, dos à nerfs orné de caissons de filets dorés, plats ornés d’un jeu de filets

dorés formant des cadres, coupes filetées or,

doublures de maroquin citron à grain long

ornées de cinq cadres

de filets dorés, tranches dorées sur témoins, couverture et dos conservés

(Randeynes & fils)

.

Édition originale.

Un des 5 premiers exemplaires sur papier du Japon : le nº 1 offert à Lucien Daudet.

Il est enrichi d’un envoi autographe célèbre, sur un feuillet inséré en tête :

Mon cher petit vous êtes absent de ce livre : vous faites trop partie de mon cœur pour que je puisse jamais vous

peindre objectivement, vous ne serez jamais un “personnage”, vous êtes la meilleure part de l’auteur. Mais

quand je pense que bien des années de ma vie ont été passées “du côté de chez Lucien”, de la rue de Bellechasse,

de Bourg-la-Reine, les mots “le Temps perdu” prennent pour moi bien des sens différents, bien tristes,

bien beaux aussi. Puissions-nous un jour le “retrouver”. D’ailleurs pour vous qui avez peint la pagode de

Chanteloup et les roses de Pâques tout est retrouvé et sera éternellement gardé.

Le

Prince des cravates

.

Lucien Daudet et Marcel Proust se lièrent d’amitié à partir d’octobre 1895, puis, quelques mois plus

tard, devinrent amants. En février 1897, une allusion fielleuse de Jean Lorrain à cette relation poussa

Proust à provoquer le critique en duel.

Au bout d’une année, la passion éteinte laissa place à une amitié parfois un peu distante ou

mutuellement intéressée, mais réelle : comptes rendus, conseils, chacun prenait appui sur l’autre, ou

l’utilisait. Cette amitié prit parfois un tour désabusé : “Il est curieux de penser que nous nous sommes

aimés”, lui écrivit Proust en 1901… Les deux amis se fréquentaient toujours et, en 1910, Proust rendit

compte de manière élogieuse du

Prince des cravates

de Lucien Daudet.

Empêtré dans la relecture des épreuves de

Swann

, l’écrivain lui adressa un mot afin de solliciter

son aide. “Au reçu de cette lettre, je suppliai Marcel Proust de m’envoyer des épreuves le plus vite

possible”, rapportera Lucien Daudet : “Je les reçus le surlendemain et passai toute cette journée et

une partie de la nuit suivante à lire

Swann

. Je revins de là (car j’avais l’impression d’un voyage autant

que d’une lecture) ébloui. J’essayai de lui dire tout de suite pourquoi j’étais ébloui” (

Autour de soixante

lettres de Marcel Proust

, p. 65-67). Lucien Daudet lui proposa des modifications et l’interrogea sur des

passages qui lui semblaient obscurs.

À la sortie du roman, Daudet fut l’un des premiers à publier un compte-rendu élogieux dans le

Figaro

du 23 novembre 1913. Marcel Proust lui en fut infiniment reconnaissant : “Vous avez écrit à propos

de moi des choses admirables. […] Je sais ce que vous avez fait pour moi, vous l’avez fait par bonté et

par amitié pour le livre ; mais malgré cela, sachez que je ne serai pas en repos tant que je ne vous en

aurai pas remercié.”

En lui offrant le premier des cinq exemplaires sur papier du Japon, il tint parole.

Une si longue séparation.

Lucien Daudet reçut un premier exemplaire du roman sur papier courant, sans doute

le 18 novembre 1913, doté d’une dédicace amusante mais assez courte adressée à “Mon rat”.

L’Exemplaire