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les collections aristophil
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FLAUBERT Gustave
(1821-1880).
L.A.S. « G
ve
Flaubert », Mardi [11 février
1857, à son ami Frédéric BAUDRY] ;
4 pages in-8 sur papier bleu (petites
fentes réparées).
5 000 / 7 000 €
Intéressante lettre sur
Madame Bovary
,
entre sa publication en revue et l’édition
originale
.
[
Madame Bovary
a paru dans la
Revue de
Paris
du 1
er
octobre au 15 décembre 1856.
Flaubert est poursuivi pour atteinte aux
bonnes mœurs et à la religion, et acquitté
mais blâmé le 7 février 1857. L’édition originale
est publiée en avril par Michel Lévy.]
Il attend Baudry (« ô brave homme »)
dimanche, et partira probablement le soir
avec lui pour Versailles, « afin de fuir les
cornes à bouquin qui me mettent les nerfs
en morceaux. J’en ai horriblement souffert
pendant le Carnaval dernier. Je suis d’ailleurs
dans un état sombre. La Bovary m’assomme !
Comme je regrette maintenant de l’avoir
publiée ! Tout le monde me conseille d’y faire
quelques légères corrections
par prudence
par bon goût
etc. Or cette action me paraît
à moi une lâcheté insigne puisque dans ma
conscience je ne vois dans mon livre rien
de blâmable (au point de vue de la morale
la plus stricte). Voilà pourquoi j’ai dit à Lévy
de tout arrêter. Je suis encore indécis. […]
Et puis ? l’avenir ! quoi écrire qui soit moins
inoffensif que ce roman ? On s’est révolté
d’une peinture impartiale. Que faire ? biaiser,
blaguer ? non ! non ! mille fois non !
J’ai donc fort envie de m’en retourner &
pour toujours dans
ma campagne
et dans
mon silence, – et là, de continuer à écrire
pour moi. Pour moi seul. Je ferai des livres
vrais
et corsés, je vous en réponds. L’insouci
de la renommée me donnera une roideur
salutaire. J’ai beaucoup perdu cet hiver. Je
valais mieux il y a un an. Je me fais l’effet
d’une prostituée.
En un mot le tapage qui s’est fait autour
de mon premier livre me semble tellement
étranger à l’art, que je suis
dégoûté de moi
.
De plus comme je tiens infiniment à mon
estime, je voudrais bien la garder, & je suis
en train de la perdre. Vous savez que je n’ai
point le prurit de la typographie. Je vivrai très
bien sans elle. Car il me paraît impossible
d’écrire une ligne en pensant à autre chose
qu’à mon œuvre. Mes contemporains se
passeront de mes phrases, – et moi je me
passerai de leurs applaudissements – & de
leurs tribunaux. L’hypocrisie sociale étant
la plus forte, je fuis bravement la bataille –
résigné à vivre désormais comme le plus
humble des bourgeois »...
Correspondance
(Pléiade), t. II, p. 680.