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Littérature
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NADAR Félix Tournachon, dit (1820-1910).
L.A.S. « Nadar », [avril 1861 ?, à Émile Pereire, directeur de
la Compagnie immobilière de Paris] ; 3 pages in-8 (deuil
avec petits manques aux bords, les 2 ff. détachés).
1 000 / 1 500 €
Projet d’installation d’un atelier photographique dans le Grand Hôtel
.
[Le chantier du Grand Hôtel fut entamé le 5 avril 1861, près des travaux
du futur Opéra de Charles Garnier.]
« Il est trois heures du matin et je saute en bas de mon lit pour vous
écrire […]. Dans cet hôtel qui présentera réunies toutes les aises, toutes
les utilités, toutes les élégances de la vie moderne, je suppose qu’un
voyageur, aux derniers instans d’un séjour très occupé, soit surpris
par l’obligation de laisser son portrait à Paris ou de l’en emporter.
– À l’hôtel de l’Opéra, ce voyageur doit obtenir ce portrait sur un
signe, sans partir de chez lui, en
sa chambre même
s’il le désire, en
robe de chambre et en pantoufles, et ce, à toute heure du jour du
soir
ou de
la nuit
»…
On a prévu dans les combles de l’hôtel un établissement spécial de
photographie, réservé à la clientèle, et qui doit être « conduit par un
homme dont le nom soit une garantie de travail consciencieux. Le
voisinage de mon établissement, où tout est disposé pour un service
aussi important qu’il puisse être, me permettra d’occuper moins
de place que tout autre sur les combles de l’hôtel. – Ce voisinage
deviendra une attenance par les fils télégraphiques qui relieront
les deux immeubles. Les premiers résultats de ma photographie
à la lumière électrique me permettent dès à présent de garantir le
résultat de mes opérations à quelque heure que ce soit. Quant à la
question de nom, je n’ai jamais eu la vanité que de revendiquer un
seul mérite en photographie et je lui dois la notoriété que je puis
avoir : l’honnêteté dans le travail. […]. L’hôtel de l’Opéra sera la seule
Majesté dont j’aurai sollicité le brevet »…
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NADAR Félix Tournachon, dit (1820-1910).
L.A.S. « Nadar », Dimanche Pâques, à Amand Gautier ; 2
pages petit in-8.
300 / 400 €
Hommage à Baudelaire, critique d’art
.
[Le peintre Amand GAUTIER (1825-1894), proche de Courbet et des
réalistes, encouragea les débuts du jeune Claude Monet.]
« Assurément oui, mon brave et bon Gautier, je ferai tout pour aller
à ton exposition et même à la vente, malgré les tentations que je me
sais d’avance et qui me seront d’autant plus douloureuses devant les
strictes nécessités qui me forcent de m’abstenir devant ce que j’aime
le plus. Mon regret sera doublé de ne pouvoir accomplir mon devoir
élémentaire
d’ami en poussant à ta vente, et ce sera un châtiment
de plus des folies et des témérités de ma vie passée, que j’ai tant de
mal à réparer depuis quelques années.
Je te remercie d’avoir pensé à moi, qui suis si éloigné de tous. Tu as
eu pourtant raison, car je t’aime bien, et dans toi et dans ton talent
si profondément sympathique et essentiel. Je me rappelle en quelle
estime te tenait notre cher et à jamais regretté BAUDELAIRE, lui qui
a été le premier, le plus sûr et le plus fin comme le plus profond et
le plus élevé de nos critiques d’art.
Quant à ta bonne parole et à ton amicale volonté d’honorer ma maison
d’une œuvre de toi, je n’ai rien fait pour les mériter, et, luttant aussi
avec tout ton seul courage, tu as besoin de réserver pour toi toutes
tes forces. Je crois bien que tu vas toucher enfin au but : peut-être
moi-même ne suis-je pas trop éloigné du mien, malgré les dernières
difficultés de l’heure présente. D’ici là, mon bon et cher Gautier,
travaille pour toi »…