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vous
copiez
F
aublas
... »
71. LOUVET DE COUVRAY
(Jean-Baptiste). 3 lettres, soit une autographe signée et 2 autographes, à mademoiselle
Mestais.
800 / 1 000
Écrivain, libraire et homme politique, Jean-Baptiste Louvet de Couvray
(
1760
-
1797
) fut d'abord le secrétaire
du baron de Dietrich, savant et académicien, avant d'entrer comme commis chez l'imprimeur parisien Louis-François
Prault. De
1787
à
1790
, il publia les volumes du roman à succès
Les Aventures du chevalier de Faublas
. Proches des
jacobins puis des girondins, il joua un rôle actif sous la Révolution : il lança le journal
La Sentinelle
, collaborant au
Journal des débats,
et fut élu à la Convention en
1792
. Marquant son opposition à Robespierre, il dut se cacher sous la
Terreur, puis vécut un temps du commerce de la librairie tout en relançant son journal, avant d'être nommé au Conseil
des Cinq-Cents (
1795
). Il mourut prématurément en
1797
.
Mademoiselle Mestais, résidant à nemours, était une amie de la maîtresse et future épouse de Louvet de Couvray,
Marguerite Denuelle qui était alors encore mariée à un M. Cholet.
– S.l.n.d. «
... N
e
dites
pas
à
m
[a]
d
[am]
e
de
L
a
P
laigne
que
vous
copiez
F
aublas
.
Ne copiez pas devant elle. Je vous
renouvelle tous mes remerciemens ; et je vous prie aussi de ne pas vous fatiguer. Je vous fais passer encore un cahier
que je me suis tout exprès bien privé de finir. Ma sœur, ce sera moi qui vous apporterai le reste du manuscrit. Malgré les
nouvelles affaires dont je suis embarassé, je compte toujours avoir fini dans les derniers jours de juin ; et je me rendrai
avec infiniment de plaisir à votre invitation et à celle de Mr Cholet
[l'époux de Marguerite Denuelle, maîtresse et future
femme de Louvet].
.. Assurément, je compte sur vos observations, ma sœur, et je les recevrai avec reconnoissance et
plaisir, je vous assure.
L
a
scène de
l
'
appartement de m
[a]
d
[am]
e
L
ignolle dont vous me parlez
est
sans doute
la grande
entre
la m
[arqu]
ise et
la baronne
. E
verat
la trouvoit trop courte
[probablement l'imprimeur-libraire parisien André-
Amable Éverat]
, et vouloit que j'y ajoutasse encore. Il est vrai, comme vous le remarquez fort bien, qu'il en entendoit la
lecture. Au reste, il se peut qu'il s'y trouve quelque chose à retrancher : vous savez qu'en pareil cas je ne le fais pas prier,
et moi je ne crains pas que vous me fassiez des remarques qui n'aient pas le sens commun, car depuis longtems nous
savons tous que vous avez plus que du sens commun...
» Il évoque aussi la mort de son père.
– [Nemours],
6
août
1788
[d'après une note d'une autre main).
1
p. in-
8
.Apostille à une lettre autographe de mademoiselle
Mestais à lui adressée (
1
p.
1
/
2
in-
8
) qui a elle-même inscrit une nouvelle réponse autographe (
2
lignes). Au sujet d'une
brouille. Mademoiselle Mestais lui a écrit : «
... Je vous répète que notre intention étoit de parler une heure avec vous, et
que les anguilles seules en ont empêché... Je n'est pas assez de mal interpréter toutes nos actions et toutes nos paroles,
vous interprétez encor mon silence de la manière la plus odieuse... Si vous ne vous rendez pas à l'évidence à tout ce que
j'ai fait pour dissiper des idées qui n'ont aucune vraisemblance, aucun fondement, je croirai qu'il est impossible d'être
votre amie... Je me suis brouillée avec m
[a]
d
[am]
e Denuelle, et je vous en ai dit la raison, un petit intérêt a été la cause
de notre rupture...
» Louvet de Couvray a rétorqué : «
... Je ne vous connais qu'un défaut, c'est d'être prodigieusement
susceptible, prodigieusement ingénieuse à vous tourmenter . Je m'en connois un à moi, celui d'être un peu fier... Veuillez
relire le peu de mots que je vous écris, et voyez si vous aimez mieux croire que je ments quand je dis que je vous aime,
que de croire que vous vous trompez quand vous croiez que je ne vous aime pas. D'ailleurs, il existe une manière
toujours sûre de juger ses amis, c'est leur donduite. Réfléchissez à la sienne et à la mienne, et convenez que vous avez de
grands torts à réparer envers elle et envers moi ; envers elle que vous voudriez aimer moins ; envers moi que vous avez
le courage de haïr... Je commençois, ma femme, à concevoir toute l'étendue de votre force en fait d'anguilles ; cependant,
je vous avoue qu'il y en a dans cette brouille qui m'étonnent. Ce ne sont plus des anguilles, mais de vraies couleuvres
que j'ai peine à avaler.
» Mademoiselle Mestais a ensuite répondu : «
Adieu, je vous aime bien. À
9
heures, je vous le
dirai moi-même et si vous retardez votre souper, cela me fera grand plaisir.
»
– S.l.n.d. : «
Écoute, ma bonne amie, demain je commence le régime pour me débarrasser de ce mal de cœur incommode ;
aujourd'hui, grand fricot. Porc au gratin, épinards au sucre, orange à dessers ; le café par-dessus tout cela. N'est-ce pas
un festin ? Si cela est possible, sans trop chagriner la bonne maman, nous dînerons dans le cabinet. Eh ! bien, est-ce
que tu ne viendras pas ? Dis, ma bonne amie ? Toi, tu n'auras aucune peine, c'est moi qui me trémousserai s'il le faut,
toi tu seras comme un vrai coq en pâte. Allons, ma bonne amie, je vous attends, et puis le courrier est venu. L'ouvrage
intéressant est acheté...
» (
1
p.
1
/
2
in-
16
). Deux apostilles de mains différentes, dont une citation approximative d'un
passage de «
L'introduction à la Révolution
» d'Élisée Loustalot qui ouvre la première livraison des
Révolutions de Paris
(
12
juillet
1789
) : «
Puisque la fureur des conquêtes n'est plus le plaisir des rois et que la raison a déploy[é] la consollante
bannièr[e de la raison]...
»
Joint
, un portrait de Louvet de Couvray, gravé sur cuivre par Johann Heinrich Lips d'après Charles-Paul-Jérôme de
Bréa, avec rehauts de couleurs à la main.