46
68. LORRAIN
(Jean). Poème autographe intitulé «
L'Émeraude
». 14 alexandrins sur une p. in-12, en-tête gravé en
rouge « Divina belluis ».
200 / 300
Sonnet paru en
1885
sous le titre « Amour pur » dans son recueil
M
odernités
(Paris, Giraud), avec très fortes
variantes, le second quatrain et les deux tercets entièrement différents.
«
Elle est rousse, un peu maigre... un glauque caftan vert / Aux longs plis moirés d'ombre ainsi qu'une eau dormante /
De sa cheville grêle à sa nuque charmante, / Suaire étroit, l'étreint, à l'aisselle entr'ouvert. // Dans la sombre harmonie
attiédie et calmante / Des vieux velours persans et des tapis hindoux, / Son œil verdâtre au guet entre ses longs cils
roux / Assoupie et perfide, elle veille, l'amante. // L'étoffe luit et craque aux pointes de ses seins / Et parmi les griffons
japonais des coussins / Où l'énervante odeur de sa peau fume et rôde, // Elle a l'air, sous la lampe astrale en vieil étain,
/ Blanche avec ses yeux verts, d'une froide émeraude / Posée entre les fleurs des carreaux de satin
»
Deux mentions autographes, en tête, «
Ci-joint une émeraude détachée d'une série de Rochegrosse
[le peintre et illustrateur
Georges Rochegrosse].
Ébauche.
» Au verso, «
circonstances... spéciales... et beaucoup plus jeune, très coureur de femmes
et très couru par elles, pourrait avoir un caprice pour un... très jeune et très féminin objet, que nous ne sommes ni l'un ni
l'autre. Un bon averti en vaut deux. J'ai dit
. »
S
ouvenirs
sur
la
reine
P
omaré
69. LOTI
(Julien Viaud, dit). Lettre autographe signée «
Julien
» à sa tante Nelly Lieutier. Lorient, à bord du Tonnerre,
2 novembre 1877. 6 pp. in-12.
200 / 300
Femme de lettres tenant salon, Nelly Lieutier
(
1829
-
1900
) écrivait des ouvrages à destination de la jeunesse, dont
un fut couronné par l'Académie française. Elle collabora à de nombreux périodiques et dirigea
La Mode pour tous
et
L'Écho
. Elle aida Loti à placer des textes et des dessins dans les revues.
Pierre Loti, qui cherchait un complément de revenus par des publications dans la presse, évoque ici le séjour à Tahiti en
1872
qui lui inspirerait
Le Mariage de Loti
(
1879
). Il était rentré de Turquie depuis quelques mois, autre lieu d'inspiration
qui lui fournirait les éléments à l'écriture d'
Aziyadé
(
1879
). En
1877
, il servait sur le
Tonnerre
où se trouvait aussi Pierre
Le Cor, alors quartier-maître, qui devint son ami et qu'il transposerait sous les traits d'Yves Kermadec dans
Mon frère
Yves
(
1883
).
«
... J
e
viens d
'
apprendre
la mort d
'
une
vieille
femme
pour
laquelle
j
'
avais
conservé un
certain
attachement
–
ne
ris
pas
–,
c
'
est
la
reine
P
omare
. Et j'ai songé, en garçon pratique, à tirer profit de cet événement.
J'
ai d
'
elle un autographe
,
sa photographie et les portraits de plusieurs personnes de sa cour
;
avec cela
,
des croquis
inédits
sur
son
pays
;
des détails
ignorés
sur
cette
cour
,
dans
l
'
intimité de
laquelle
j
'
ai
longtemps
vécu
.
Tout cela, à la faveur de
l'actualité, peut se vendre et se caser quelque part. Mr Hubert
[Édouard Hubert, secrétaire de rédaction du
Monde illustré
]
l'accepterait peut-être, cela reposerait ses abonnés des Russes et des Turcs qu'il leur sert sous toutes leurs formes. Si cela
pouvait être accepté, je me mettrais au travail et je pourrais dans une quinzaine de jours fournir cette commande.
Enfin, j'ai pensé à autre chose... N'y aurait-il pas moyen d'aller trouver Mr Éd. Charton [Édouard Charton directeur du
Tour du monde] et de lui tenir à peu près ce langage : "
un officier de marine qui a parcouru
les
trois quarts des recoins
du monde
,
même
les
plus
invraisemblables
,
en
a
rapporté des
cartons
remplis de
croquis
bizarres
.
Il offre son concours
très intéressé au
Tour du monde..."
... Je n'offrirais point de fournir des articles complets de mon cru ; je donnerais
seulement à la rédaction une liste des pays sur lesquels elle pourrait m'interroger. Si ces braves gens consentaient à
me communiquer à l'avance leur programme, je pourrais, sur les pays qui seraient sous presse, leur présenter quelques
dessins pris sur nature. Leurs gravures seraient ainsi plus exactes et moins livrées aux fantaisies de leurs dessinateurs.
Tu vois, chère Nelly, que j'use bien largement de l'autorisation que tu m'as donnée de me servir de toi.
J
e
tire
si
bien
le
diable
par
la queue que
je ne
sais qu
'
imaginer
...
»