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en France, la presse, le traité de Versailles dont il écrivit en 1919 que « la bourgeoisie française venait de signer son arrêt de
mort. Elle le contresigne aujourd’hui »… Réflexions sur une guerre imminente, ou préventive… « Quelle belle chose que le
régime démocratique et parlementaire ! Chamberlain, interrompant la conversation, pour dire : pardon, je dois consulter mes
collègues. Et Daladier, faisant venir Caillaux pour prendre son avis. Car tout de même, on ne peut pas déclarer la guerre,
sans la voix de Caillaux »…
Vendredi-samedi soir [30 septembre-1
er
octobre]
. Longue lettre après le retour de Daladier de
Munich. Chardonne célèbre d’abord comme « un chef-d’œuvre » l’ouvrage de nos ministres ; il parle de l’impression produite
en Allemagne, puis analyse les calculs politiques des différentes tendances en France, concluant à la grande sagesse du peuple
français… Sur Hitler : « Je crois voir en lui, à côté de traits de génie, je ne sais quoi de simpliste et d’enfantin »… Puis le
lendemain, il rapporte un entretien avec Brisson, « tout à fait anti-Flandrin », critique les vacillations de la France, notamment
lors de réunions des ministres à Londres (il eût fallu une autre réponse à la crise des Sudètes)… Communication confidentielle
par Brisson d’un rapport secret relatant deux dialogues entre Daladier et Gamelin. « Gamelin disait : je suis sûr de la victoire
au bout d’un an. Il comptait l’Italie contre nous. […] Il tenait grand compte de la bataille en Tchécoslovaquie et de l’accrochage
d’une partie de l’armée allemande de ce côté. L’armée française devait se masser à l’abri de la ligne Maginot et attendre les
Anglais. La ligne Siegfried dans sa plus grande partie n’est qu’ébauchée. Il indiquait l’endroit où elle ne consiste qu’en fil de
fer : c’est là qu’il prévoyait l’offensive. – En quittant Brisson j’ai ouvert
Paris soir
, et vu l’article de Sauerwein annonçant que la
Hongrie avait déclaré sa neutralité la veille des accords de Munich. Hitler était lâché par ses amis ; par Franco ; presque sûrement
par Mussolini. Il était perdu »…
Vendredi [été 1943]
. Réception à l’ambassade, où il a fait la connaissance de Fernand de Brinon : ils ont parlé des limites
du livre de Fabre [
Journal de la France, mai 1942-1943
d’Alfred Fabre-Luce], et des bombardements d’usine… « Il y avait
deux ou trois “autorités” assez marquantes. L’une d’elles m’a dit une chose surprenante de la part d’un Allemand […] : si les
Anglo-Américains sont vainqueurs, ils peuvent très bien et très facilement tenir l’Europe sous le joug ; et ils y sont décidés. J’ai
répondu : vous avez prouvé qu’on ne tient pas une nation sous le joug. – Cette fois, dit-il, ils feront le nécessaire »… Intéressant
échange sur ce joug variable selon les pays, et la menace du communisme. « Voilà dans quelle alternative nous ont jeté ceux qui
comme Bernanos veulent voir dans l’Allemand la Bête »…
Paris [1946 ?]
. Ferme rejet d’un livre traduit de l’allemand sur Van Gogh : « Le pathos lyrique germain me convulse »…
La Frette 24 avril 1965
. Paul Morand attend une réponse de Delamain, à sa proposition d’un texte sur la graphologie…
Chardonne parle de ses
Propos comme ça
, petit livre que Grasset va publier, et d’autres projets non littéraires ; nouvelles de la
librairie et du groupe Hachette (Guy Schoeller, Bernard Privat, Grasset)…
53.
François de CHATEAUBRIAND
(1768-1848). L.S. « Le V
te
de Chateaubriand », 19 octobre 1814, à Joseph Van
Praet, « Conservateur de la bibliothèque du Roi » ; 1 page petit in-4, adresse.
250/300
Emprunt de livres à la Bibliothèque royale. Il souhaite le bon jour à M. Van Praet, et « le prie d’avoir l’extrême bonté de
remettre au porteur de ce billet, les livres dont je lui ai fait passer la note samedi dernier »...
On joint une P.A.S. de Joseph Van Praet, 16 mai 1810 (1 page in-4), recevant pour la Bibliothèque impériale, de M. Molini
de Florence, « un exemplaire de l’ouvrage intitulé :
Opere di scultura e di plastica di Antonio Canova, descritte da Isabella
Albrizzi
»…
54.
François-René de CHATEAUBRIAND
. L.A.S.,
31 décembre 1820, à Jacques-Joseph de Corbière ;
2 pages in‑fol., fragment de l’enveloppe montée en tête
de lettre (salissures, fentes aux plis réparées).
1 000/1 200
Très importante lettre politique le soir de son départ
pour Berlin, où il venait d’être nommé ambassadeur. [Les
ultras viennent de remporter les élections législatives de
novembre 1820, et Richelieu, à la tête du gouvernement, se
voit contraint de les y faire entrer. Mais Louis XVIII et les
ministres en place ne veulent pas de Chateaubriand, qui est
écarté et envoyé à Berlin. Chateaubriand réussit cependant
à placer au gouvernement deux pions, les ultras Villèle et
Corbière, qui est nommé ministre d’État et président du
Conseil royal de l’Instruction publique.]
« Voici, mon brave compatriote, mes
dernières volontés
dont je vous rends, vous et notre ami Villèle, les exécuteurs.
Trois réparations immédiates. L’une au militaire, l’autre à la
justice, la troisième dans l’administration à savoir : Cannuel
[le général Simon Canuel], Agier et Trouvé : Cannuel
surtout ; c’est le moyen de vous attacher tous les royalistes,
et de faire taire toutes les oppositions de notre bord. Soigner
les journaux ; faire écrire dans votre sens, et diriger l’opinion
monarchique.Malheureusement je vous manquerai beaucoup
pour cela : mais enfin ne faut-il pas renoncer à ce travail de