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littérature

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MAURIAC FRANÇOIS (1885-1970)

L’Embarquement pour Tribschen,

manuscrit

autographe signé

S.l., [1957], 5 pages in-8 à l’encre sur papier entête

« Grand Hôtel Nation, Lucerne », signé « F.M. », ratures

et corrections.

1 000 / 1 500 €

Pèlerinage musical et littéraire chez Wagner, publié dans

Le Figaro

littéraire

du 31 aout 1957.

« Ce rameur plein de jeunesse et de force qui me mène à Tribschen

et dans sa barque est mon ainé ». C’est René DUMESNIL, notre

confrère du Monde. Il a juré de me faire aborder chez WAGNER

un matin, à l’heure où le lac est désert. Deux cygnes suivis de leurs

petits au duvet gris viennent à notre rencontre.

Lucerne s’éloigne.

Au-dessus des eaux, le décor de la tétralogie s’éploie, vide à jamais

des héros et des dieux, pris au piège de la musique d’un homme »

« Le magicien qui hanta ces lieux et qui y retint sous son charme la

femme de son jeune disciple, la fille de son meilleur ami, n’est pas

mon homme. Ce Tristan quinquagénaire bas sur pattes, avec son

béret de velours, ses favoris, et ce nez comme un bec de petit rapace,

n’entre pour rien dans l’enchantement que je dois à sa musique. Il

importe même que je l’oublie, lui, pour que son chant m’ensorcèle »

Mauriac se rappelle d’autres pèlerinages, chez Lamennais, chez Mau-

rice de Guérin ; il interroge les portraits de Nietzsche et de Cosima,

et évoque la souffrance de Hans de Bülow. Rembarqué avec son

rameur bientôt octogénaire, il compare ce conteur passionné, ami

jadis de Huysmans, aux jeunes garçons amers qu’il connaît : « Ainsi

je rêvais dans la barque et je me disais que le génie est peut-être

une vertu qui échappe à nos prises et que même aux yeux de Dieu,

Richard Wagner aura accompli l’œuvre pour laquelle il avait été mis

au monde, et que nous pouvons croire qu’il repose en paix ».