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Littérature
328.
Paul-Jean TOULET
(1867-1920). L.A. sur carte postale, [9 avril 1907], à son adresse « Monsieur Toulet 14 place de
Laborde (8
e
) à Paris » ; carte postale avec adresse et timbres (illustrée du
Bain de Diane
de Corot).
400/500
U
ne
des
« L
ettres
à
soi
-
même
»
. « Il y avait un siècle que je n’avais vu Faustine. [...] Le hasard me fit passer par N., un soir d’automne
que le vent sifflait en haut des toits et dans le branchage deffeuillé des parcs. Plus près du sol roulait une sorte de brume humide. Avec
cela le temps était chaud et plein de mélancolie. [...] De sa fenêtre ouverte, elle [Faustine] me reconnut malgré le crépuscule, et, quelque
souvenir frivole lui montant à la tête, elle laissa soudain s’égrener jusques à moi la perle mélodieuse de son roucoulement ».
329.
Paul VALÉRY
(1871-1945). L.A.S., [septembre ? 1900, à son ami André-Ferdinand
H
érold
] ; 4 pages in-8.
300/400
Il a quitté son emploi au ministère [de la Guerre] pour un congé de six mois, et occupe les fonctions de « secrétaire près de l’oncle de
L
ebey
[Édouard Lebey, directeur de l’Agence Havas]. Comme cela se passe à 2 pas de chez moi et très agréablement je jouis d’un loisir
assez grand – et ne regrette en rien ma boîte. Seule me chiffonne la notion qu’il y faudra peut-être rentrer – ensuite – ou se débrouiller
de quelque façon. Ma femme m’aide dans le travail que j’ai entrepris dès que j’ai eu plus de temps à moi – c.à.d. révision des kilomètres
de notes incluses en mes cahiers. Je les lui dicte sur des feuilles séparées que je pourrai ensuite classer et appeler à la vie de l’ordre.
Elle y apporte un grand courage […] Peut-être cela prendra-t-il une forme à force d’être discipliné – j’y remarque seulement jusqu’à
ce jour une obstination curieuse autour de quelques points centraux et capitaux… ». Il a lu un livre de
D
uranty
: « C’est gentil mais
rien de supérieur ». Il invite Hérold à lire Théophile
S
ilvestre
, qui lui paraît « de la bonne critique d’art – car il est parlé beaucoup et
précisément, de procédés »…
O
n
joint
une L.A.S. à un confrère.
330.
Paul VALÉRY
(1871-1945). L.A.S., 16 septembre 1918, à Guy
L
avaud
; 2 pages et demie in-8 (rousseurs).
250/300
B
elle
lettre
à
propos
de
S
ur
un
vieux
livre
de
marine
.
« Rien, jadis, ne m’a fait rêver plus profondément, plus précisément que les
choses marines. J’ai souffert très cruellement pendant une dizaine d’années d’avoir dû considérer le
Borda
comme un Paradis défendu.
Cette annonce malheureuse s’est irritée et satisfaite à demi, comme toutes les autres : par l’imagination, et la fraude psychologique. J’ai
lu et relu les vieux livres qui parlent de la mer ; j’ai passé des heures au Musée où sont les modèles ; j’ai médité d’écrire une
Esthétique
Navale
, dont les quelques pages qui existent me font apprécier infiniment le défaut des autres ; et j’ai convoité, je convoite encore sans
trop d’espoir, cette inestimable
Hydrographie
du Pr Louis Fournier, aumônier des armées de mer du Roy (Louis XIII) dont le peu que je
connais excite depuis si longtemps mes désirs et ma curiosité. Est-ce là votre
Vieux livre
? Quel soit-il, vous voyez combien j’étais prêt
à aimer vos vers, qui sont si beaux et qui me parlent, davantage, une langue assez familière et positivement chérie »…
331.
Paul VALÉRY
. 3 L.A.S., 1926, à George
B
arbier
; 1 page in-4, en-tête
La Polynésie
, et 4 pages in-8, enveloppes.
700/800
S
ur
sa
candidature
à
l
’A
cadémie
française
,
et
le
projet
d
’
édition
de
P
oèmes
en
prose
de
M
aurice
de
G
uérin
, précédés d’une petite
lettre sur les mythes de Paul Valéry, illustrations par George Barbier (A. Blaizot, 1928).
[2 novembre 1925]
. Il part pour Bruxelles, et aurait voulu causer du projet ; quant à sa candidature : « Je vous dis (entre nous, pour ce
soir) que je change de
place
[de sa candidature au fauteuil d’Haussonville, à celui d’Anatole France]. On m’y pousse et presque on m’y
contraint. Je n’avais plus aucune chance, sur l’autre position »…
Vendredi [5 février 1926]
. Il se plaint de sa santé et de ses insomnies ; il
doit faire une conférence à Lyon, et aurait voulu avant de partir parler à Barbier « au sujet du
Centaure
. Êtes-vous arrivé à vous accorder
avec Bl[aizot] ? – Vous m’aviez demandé une lettre sur la mythologie de 1200 mots environ, pour le 20 mars. Tout ceci est-il convenu
avec lui ? Que donne-t-il en fait d’argent et d’exemplaires ? Je n’ai vu qu’une fois cet éditeur, et je n’ai pas infiniment à me louer avec lui.
Mais enfin nous avons coutume de travailler pour le diable »…
La Polynésie (Giens) Samedi [27 février 1926]
. Au sujet de ses conditions et
des difficutés avec Blaizot : « Ce n’est pas lui qui paye, c’est l’acheteur. Ce que je ne veux pas, c’est stipuler un prix en
francs
– c. à d. un
prix indéterminé. Si le franc baisse, l’éditeur peut élever son prix de vente ; il est juste que nous suivions le mouvement. Je maintiens
donc mes conditions qui ne sont que naturelles – 5% sur le prix de toute édition (prix fort). C’est 6 semaines de travail que je devrai
intercaler dans le travail en train qui est déjà accablant pour moi »…
332.
Paul VALÉRY
. 2 L.A.S., [1927-1928], à une amie ; 1 page in-4 à en-tête de
La Polynésie
à Giens, et 2 pages petit in-4 sur
papier arraché d’un cahier d’écolier (petites traces de rouille).
300/400
La Polynésie [20 avril 1927].
« L’œil sur la mer qui est pâle, (vu qu’il est 5 h du matin) et calme après les belles tempêtes récentes. Je
baille comme un lion du Jardin des Plantes. Le discours est sous ce bloc. Je n’en finirai jamais. Je pleure d’ennui. C’est un supplice
que ce devoir ! Toute ma faculté pensante en est paralysée. Les délicieux voiliers qui frôlent à chaque instant nos rochers me donnent
l’envie de planter tant d’ennuis et de soucis sur quelque grosse pierre et de pousser au large vers l’île de Robinson. L’idée de rentrer
à Paris m’est odieuse »… Il partira pour Grasse en fin de semaine « avec l’idée vague (si je prolonge) de revenir enfin (pour traîner un
peu) à Roquebrune, […] chez les
B
ussy
qui m’y verraient avec joie. Mon portrait commencé par lui était en belle voie. Les choses que
vous m’écrivez ne sont pas plus gaies que celles que je reçois d’autre part de Paris. Les affaires et les enfants – sans compter les grandes
personnes – tout est contre l’esprit. Je ne parle pas du cœur dont c’est le métier d’être torturé »…