Background Image
Previous Page  36 / 140 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 36 / 140 Next Page
Page Background

34

109.

Victor JACQUEMONT

(1801-1832) voyageur et naturaliste, ami de Mérimée et Stendhal. L.A.S. « Victor », à

bord de la Zélée en mer 17 octobre 1828, à son ami Jules Cloquet ; 3 pages in-4.

500/600

Lettre envoyée depuis Rio de Janeiro, escale lors de son célèbre voyage en Inde.

Ayant été très occupé entre son retour de Londres et son départ pour Brest, il regrette de n’avoir pas eu le temps de voir son

ami, et lui promet, à son retour, de lui rapporter des contes persans : « Vous savez comme ils sont jolis. Ce sera pour le départ, car

je m’attends auparavant de votre part à un feu bien nourri de questions sur les crânes de tous les gens que je vais voir. J’espère

aussi rapporter de quoi être intéressant sans cesser d’être sérieux »... Il compte sur lui pour visiter son père de temps à autre et

soigner son frère Porphyre : « Il ne saurait être pour moi un objet d’inquiétude. Il est malade de bonne volonté et ne rechigne

pas aux remèdes. Néanmoins si pouviez le guérir sérieusement des dartres qui le tracassent. Je vous promets de

puffer

(to puff)

votre médecine comme j’ai puffé votre chirurgie »... Il évoque son escale de quatre jours à Ténériffe, trop courte « pour que j’y

puisse faire aucune recherche scientifique. [...] Il y a un mois aujourd’hui que nous en sommes partis, contrariés d’abord par des

calmes ou des vents contraires. Mais au voisinage immédiat de l’équateur les vents nous sont devenus très favorables et nous

l’avons passé au galop, et depuis trois jours que ce solennel passage a eu lieu nous avons gardé cette allure. Il nous suffirait de

le conserver encore onze jours pour être à Rio de Janeiro »... À propos du dilettantisme du médecin du navire : « Je lui ai mis

quelques livres aux trousses, et le feu sous le ventre pour qu’il s’expédiât : et j’ai réussi. Il travaille. C’est presqu’un phénomène

à bord, où la paresse moyenne est portée au plus haut degré. Vous pensez bien que j’y fais diversion. La mer, et surtout le

régime alimentaire qu’elle impose, rendent bien plus difficile encore ce qui chez moi ne va guère de soi même habituellement,

mais il est des moyens que l’art ingénieux... et j’en use – et ainsy me porte bien. Je suis libre ainsy de m’occuper de travailler

comme au coin de mon feu ; et si fais-je »... Il termine en priant son ami de mettre pour lui de côté le 4

ème

volume de sa « Grande

Anatomie » à paraître… Il ajoute que la lettre part de « Rio de Janeiro d’où un bâtiment pour la France sort quand nous jettons

l’ancre », le 28 octobre 1828.

Reproduit en page précédente

110.

Victor JACQUEMONT

. L.A.S., et notes autographes ; 1 page in-8 avec adresse au dos, et 4 pages in-fol.

400/500

Lundi à 4 heures

, à Constant Duméril, à propos d’une lettre de recommandation que Duméril lui avait promise pour

l’introduire auprès de Benjamin Delessert : « Espérant l’avoir aujourd’hui j’étais convenu déjà avec mon ami Achille Richard

qu’il me conduirait demain chez M. Delessert »...

Quatre pages de notes prises en Inde : coordonnées géographiques et repères topographiques, petit plan des environs

d’Islamabad... Le document a été certifié par son neveu en juillet 1903.

111.

Marcel JOUHANDEAU

(1888-1979). Manuscrit autographe,

Tout ou rien

, [1967 ?]

; 102 pages sur 56 feuillets

in-8 de classeur à petits carreaux, en feuilles sous chemise demi-maroquin vert, titre doré, étui.

1 000/1 200

Manuscrit de travail de cette pièce radiophonique diffusée sur France-Culture en 1967, puis publiée en ouverture du

n° 1 de

La Nouvelle Table Ronde

(mai 1970, exemplaire joint, sous l’emboîtage), puis en édition originale, avec deux autres

pièces pour la radio, la même année, chez Gallimard (collection « Le Manteau d’Arlequin »).

Dans le milieu provincial et ouvrier de Chaminadour (le Guéret de Jouhandeau), une ancienne et très brève passion charnelle

révélée par malveillance se termine en tragédie. Marie et Serge Pingaud vivent depuis vingt ans dans une harmonie conjugale

sans faille quoiqu’un peu monotone. Marie a une confidente, Jeanne Desmoulin, une veuve dont le mari toujours passionnément

aimé d’elle quoique disparu, David, avait péri quinze ans auparavant dans un accident. Cet époux volage était en outre le

meilleur ami de l’austère Serge. Mais voilà que ce bonheur sans histoire se trouve ébranlé par une discussion malveillante entre

hommes au café. On veut se venger de Serge, obsessionnel contempteur des maris trompés et des trop faibles femmes. On lui

révèle que son ami David, coureur invétéré, était parvenu à séduire sa femme quelques jours seulement avant sa mort. Serge,

hors de lui, fait avouer le crime à Marie, la bat et l’humilie devant sa mère et les femmes du voisinage. Mais Marie revendique

crânement et publiquement ce très bref écart de conduite, instant d’amour qui, dit-elle, aura éclairé et justifié toute sa vie. Serge,

se considérant comme déshonoré, prononce sa sentence : que Marie l’étrangle ! Ce qu’elle fait, avant de se livrer à la police.

Cette tragédie en trois actes ou épisodes permet à Jouhandeau d’exprimer la vision quasi mystique de l’amour physique à

laquelle il tient. Cette conception apparaît par exemple dans cet extrait d’un monologue de Marie, texte déjà travaillé dans notre

manuscrit, mais qui sera totalement refondu dans la version de la revue : « En somme, si je n’avais pas connu David, je n’aurais

pas connu ce je ne sais quoi qui donne un sens à la vie. Qu’est-ce que c’est ? La passion, la possession d’un souvenir ineffaçable.

David ! Il n’a fait que passer dans mes bras, mais grâce à lui, je ne suis plus seule quand je suis seule ; je suis moins seule, même

entre les bras de Serge. Comment regretter cette sorte d’effacement de tout au bénéfice d’un être radieux, illuminé dont une fois

pour toutes le corps a couvert le vôtre et satisfait en un instant l’âme toute entière comme si, le ciel entrouvert, on avait connu

ensemble le paradis... »

(Acte III, scène 1).

Le manuscrit présente de nombreuses ratures et corrections. Il est conservé sous une chemise titrée par Jouhandeau, avec

liste des personnages et le synopsis original. Les 78 pages du manuscrit se répartissent en trois séries de feuillets (42 en tout,

sans compter la chemise de titre) paginés par Jouhandeau au crayon rouge de façon discontinue, selon les états différents

du texte : certains sont très corrigés et leurs variantes lisibles révèlent une version primitive déjà travaillée mais qui sera

développée encore, les autres mis au net avec quelques repentirs ou ajouts. Malgré cette relative hétérogénéité, la pièce peut se

lire aisément dans sa continuité manuscrite, mis à part deux courts passages intercalés en typographie à leur place. 24 autres

pages (13 feuillets) sont rassemblées dans un dossier de brouillons. Écrites de différentes encres, d’une graphie tantôt appliquée,

tantôt très hâtive, elles présentent des versions différentes de certaines scènes, avec de significatifs ajouts ou repentirs. Le