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517.
Juliette DROUET
(1806-1883).
Lettre autographe signée « Juliette », 12 août [1838] dimanche après-midi 1 h. 1/4, à V
ICTOR
H
UGO
; 6 pages in-4.
1 200/1 500
B
ELLE
LETTRE
SUR
R
UY
B
LAS
. [Victor Hugo a achevé l’écriture de
Ruy Blas
la veille, et en a réservé la première lecture à Juliette.]
« Il y avait quinze jours, mon adoré, que vous n’étiez venu
déjeuner
avec moi aussi Dieu sait quel appétit j’avais de vous. Je vous
aurais avalé comme une cerise si vous n’aviez pas eu de queue. C’est pour le coup que la précaution du
petit
Toto était bonne :
Ze ne sait pas si zai une queue mais ze veut
pas comme la coupe. Je m’aperçois que j’ai
pris mon papier à l’envers. Heureusement que
mon amour est à l’endroit et que vous vous
y retrouverez tout de même. J’ai une plume
hideuse. J’aimerais autant écrire avec une tête
de pavot j’en viendrais mieux à bout […] Je
vais écrire à la mère Krafft si elle peut me
prêter un vieux chapeau ça nous fera toujours
une petite économie et peut-être un jour de
plus de bonheur ? Quel miracle que ta pièce,
mon pauvre bien-aimé, et que tu es bon de
me l’avoir fait admirer la première. Jamais
je n’avais rien entendu d’aussi magnifique.
Je n’en excepte même pas tes autres chefs-
d’œuvre. C’est une richesse, une magnificence,
un éblouissement dont on ne peut pas se faire
une idée avant de l’avoir entendue. C’est
miraculeux. Malheureusement mon esprit
en est encore plus obscurci, comme quand
les yeux ont trop long-temps fixé le soleil il
reste des tâches noires devant les yeux [
DESSIN
de 2 taches noires] comme cela. C’est ce qui
m’arrive j’y vois moins que jamais. Je suis bête
comme une oie et si ce n’était mon amour qui
me tient lieu de chandelles et de lumière je
n’y verrais plus du tout. Oh ! mon beau soleil
vous m’avez aveuglée pour lon-temps. Je ne
vois plus rien que vos rayons qui me brûlent :
au dedans, au dehors de moi tout ce qui n’est
pas vous est noir »...
516.
Juliette DROUET
(1806-1883).
Pièce autographe, février 1838 ; 2 pages in-4.
600/800
C
OMPTES
.
Dépense générale du mois de février 1838
, récapitulatif des
frais du mois : nourriture et vin, éclairage, chauffage, entretien
de la maison, dettes et mont-de-piété, gages, « toilette entretien
et parfumerie », blanchissage, « faux frais, argent de poche »,
« maladies et bains », dépense commune, charbon… se montant
à un total de 328 livres, 10 sols, 3 liards, soit 329 francs avec les
9 sous restant en caisse.
Recette générale du mois de février 1838
, tenue presque
quotidiennement, dont « argent gagné par mon Toto », « argent de
la bourse de mon adoré », « argent gagné par mon bien aimé », etc.,
et de l’argent rendu par M. P
RADIER
, soit 329 francs, et 2 sous en
« déficit à mon désavantage ».