Previous Page  335 / 360 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 335 / 360 Next Page
Page Background

333

Le dépôt des livres que m’a remis M. Didot est encore entre mes mains. Il est, et il devait quoi qu’il pût m’arriver rester

intact.

[...]

Quant à la somme que je vous dois, Monsieur, elle n’est nullement compromise. Je ne puis pas vouloir que

vous perdiez quelque chose avec moi. Il y aura eu dans tout ceci un retard, un peu long peut-être, mais voilà tout.

Sans doute vous faites un livre ; eh bien ! si je vous dois 900 fr. je vous le payerai 900 fr. plus cher, et je vous le payerai

comptant

pour vous dédommager du retard que vous aurez éprouvé pour l’autre cas. J’ose espérer que vous voudrez

bien encore me confier un nouvel ouvrage. C’est ainsi Monsieur, seulement ainsi, que viendront pour moi les temps

meilleurs que vous me souhaitez. Et puis, comme je ne me trouverai plus sous le poids de circonstances comme celles

qui m’ont écrasé, je ferai plus et mieux pour la réputation du livre. J’ai une grande dette à acquitter envers vous.

Un an plus tard, les choses n’ont guère évolué. Toujours aux abois, l’éditeur revient à la charge le 8 août 1833.

Depuis quelques temps les affaires de librairie se sont améliorées. Du moins sont-elles devenues un peu plus faciles

pour moi, et, je vous l’avoue, ce qui dans cet état de chose me flatte le plus, c’est la perspective qui m’est offerte de

pouvoir m’acquitter complètement vis-à-vis de vous. Je sais par une rude expérience ce qu’il y a de pénible à perdre,

mais je sais aussi qu’il est plus pénible encore de faire perdre et, de tous les malheurs, c’est celui que je tiens le plus

à m’éviter. Je ne doute pas que dans votre retraite vous n’ayez travaillé beaucoup et que par conséquent vous n’ayez

au moins un ouvrage à publier. Le moment me semble donc opportun de prendre un arrangement qui concilie vos

intérêts et les miens.

[...]

Je vous dois environ 900 francs, un peu plus de moitié du prix d’un excellent roman. Voulez-vous, Monsieur,

m’en envoyer que je m’oblige dès à présent à vous payer comptant en écus une somme de deux mille francs. Aussitôt

la publication de ce roman, j’ajouterai une somme de mille francs pour solder mon ancienne dette vis à vis de vous.

Ce serait donc une somme totale de mille écus comptant que j’aurais à vous solder.

Fils d’un employé à la préfecture de la Seine, né en 1801, Alphonse Levavasseur fit partie des nombreux éditeurs

n’ayant pas survécu à la crise des années 1830. Il s’associa de 1827 à 1829 avec Ponthieu, puis avec Urbain Canel,

publiant, outre Stendhal, de nombreux écrivains en vogue : Musset, Vigny, Balzac...

Après une première faillite, il bénéficia, en vertu de la loi du 17 octobre 1830, d’un prêt de 40 000 francs. Cela

ne devait pas empêcher sa deuxième déclaration de faillite le 10 février 1832, ni la troisième en 1839. Il cessa

toute activité éditoriale en 1845.

(Stendhal,

Correspondance II

, Bibliothèque de la Pléiade, 1967, appendice n° 229 et 245.)

2 000 / 3 000