les collections aristophil
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plusieurs autres Ecrits où respire cet amour
de l’Egalité sans laquelle la liberté politique
n’est qu’une illusion, une chimère. Voila
l’Aristocrate de la façon de M. Tobiezen
Duby. […] C’est un tissu de calomnies atroces,
de mensonges denués meme de vraisem-
blance. Croira t’on quil pousse l’aveuglement
de la haine jusqu’à se permettre d’articuler
un fait, dont la fausseté peut se demontrer
par une preuve sans replique, une preuve
matérielle ? après avoir dit que je vais rare-
ment aux assemblées de section, ce qui est
malheureusement vrai par l’effet de mon
etat maladif, suffocations, étouffemens &c, il
ajoutte que je n’ai pourtant pas manqué de
m’y trouver à la nomination d’un Comman-
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CHAMFORT Sébastien Roch
Nicolas
(1740-1794) écrivain et
moraliste [AF 1781, 6
e
f].
L.A.S. « Chamfort » (copie
autographe), 9 septembre « l’an 2
e
de la Republique une et indivisible »
[1793], au citoyen
LAVEAU,
rédacteur
du
Journal de la Montagne
; 3 pages
in-fol.
1 500 / 2 000 €
Vigoureuse protestation contre les calom-
nies et dénonciations de Tobiesen-Duby,
l’accusant d’être aristocrate
.
[« Il a le sentiment d’être véritablement insulté.
Sa défense maladroite a quelque chose de
touchant en même temps que de tragique »,
exemple « de la confusion des esprits en cette
heure, confuse s’il en fût, de la Révolution
française. » (Pierre-Jean Rémy)]
Le citoyen Chamfort, « Bibliotécaire de
la Biblioteque Nationale », répond aux
calomnies : « L’impartialité que vous avez
montrée, Citoyen, en rendant compte de
la denonciation de Tobiezen Duby contre
plusieurs citoyens attachés à la Bibliotèque
Nationale et en inserant dans votre journal la
note du dénonciateur me laisse lieu d’espérer
que vous voudrez bien y donner aussi une
place dans ma lettre.
Un journaliste, plus dur que vous, a trouvé
qu’une lettre flagorneuse de Tobiezen Duby
à la Citoyenne ROLAND nétoit pas pour
moi une justification suffisante et cela est
vrai ; mais avant que je connusse les chefs
d’accusation, de quoi vouloit on que je me
justifiasse ? et netoit il pas naturel de faire
connoitre d’abord l’accusateur et ses motifs ?
[…] Le créateur de la formule
au Ministre
Roland, Respect
qui se trouve à la tête des
lettres du desinteressé Tobiezen Duby, depo-
sées au Ministere de l’intérieur ne devroit
pas se donner pour un Republicain de la
première force et je doute que le Comité
Epuratoire des Jacobins s’accommode de
cette formule.
Je devois donc d’abord me borner à faire
connoitre mon dénonciateur, quand je me
suis vu accusé d’Aristocrate.
Chamfort aris-
tocrate
! Tous ceux qui me connoissent en
ont ri, et beaucoup trop ri, selon moi, car
j’etois
aux Madelonettes
. Aristocrate ! celui
chez qui l’amour de l’Egalité a été constam-
ment une passion dominante, un instinct
inné indomptable et machinal ; celui qui a
mis au Theatre, il y a plus de 20 ans, la pièce
du
Marchand de Smyrne
, quon joue encor
frequemment, et dans laquelle les nobles et
aristocrates de toute robe sont mis en vente,
au rabais, et finalement donnés pour rien !
celui qui a publié contre les Aademies un
Discours lequel a devancé de deux ans leur
destruction depuis peu prononcée, enfin
dant General,
pour donner ma voix à Raffé
.
J’affirme que ce fait est faux. J’ignore si on
conserve ou non les listes des votans ; mais
si on les conserve, je defie qu’on y trouve
mon nom. […] Il faut une place à M. Duby,
quoiquil vous dise le contraire dans sa note.
Je resigne la mienne dès ce moment, dût
elle lui être donnée. Mais elle ne le sera pas,
et il aura calomnié pour le comte d’autrui ;
c’est un malheur »...
L’Académie française au fil des lettres
,
p. 154-157.
CHAMFORT Sébastien Roch Nicolas
: voir
n° 795.
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