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les collections aristophil

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LA HARPE Jean François de

(1739-1803) poète, auteur

dramatique et critique littéraire [AF 1776, 21

e

 f].

L.A.S. « Laharpe », « décadi Prairial l’an 2 de la Rep. » [29

mai 1794, à Maximilien ROBESPIERRE] ; cahier cousu petit

in-4 de 8 pages.

1 200 / 1 500 €

Long et magnifique plaidoyer sur sa conduite et ses sentiments

républicains, dont témoignent ses écrits ; il compte sur Robespierre

pour prendre sa défense et obtenir sa mise en liberté

.

« Je suis flatté, citoyen, que tu ayes désiré d’avoir mes ouvrages ;

mais quoiqu’ils soient tous d’un bon citoyen, tu présumes bien que

ce n’est pas dans ce que j’écrivais longtemps avant la Révolution qui

faut chercher les preuves de mon civisme. Il est vrai que j’eus dès

lors les honneurs d’une lettre de cachet, d’un arrêt du Parlement, d’un

arrêt du Conseil et d’une censure de la Sorbonne. Mais tout cela n’est

rien. C’est dans mon

Lycée

qui n’est pas encore imprimé mais qui a

eu de nombreux auditeurs et a donné un grand mouvement à l’esprit

public ; c’est dans la Tragédie de

Virginie

, jouée l’année dernière

par

et pour le peuple

; c’est surtout dans mes articles du

Mercure

, c’est

là que l’on peut voir ce que j’ai toujours été ». Il y a « des choses qui

ne peuvent être écrites que par un patriote et un républicain […] Ainsi

le témoignage de mes écrits est absolument irrécusable ».

Il joint quelques extraits de ses articles de l’an passé : « Aux yeux de

tout homme de sens, ils sont décisifs ; et si l’on songe que j’ai pris

parti pour la Révolution, quand je pouvais, comme la pluspart de

mes confrères, garder le silence ; que j’ai pris parti pour la Révolution

dans le temps même où elle m’ôtait tout le fruit de mes travaux par

la destruction des privilèges de journaux sur lesquels étaient fondées

mes pensions ; à qui ne sera t’il pas démontré que j’ai tout sacrifié à

mon

opinion

, que mon existence toute entière a toujours été dans

mon

opinion

, que cette manière d’être est naturelle à celui qui par

état a vécu pour la gloire et la postérité, a mis toute sa gloire à être

un

homme libre

, à être nommé un jour parmi les deffenseurs de la

liberté, a crû consacrer ses talens et sa plume par l’invariable fermeté

de ses sentimens, en un mot s’est prononcé de manière qu’il lui

est impossible de changer ou de reculer à moins de vouloir être vil

gratuitement, faux et hypocrite sans intérêt ? […] Une chose frappante

dans mes écrits depuis 1790 et dont je suis en droit de m’applaudir,

c’est, j’ose le dire, la conformité continuelle de mes sentimens avec

ceux de ROBESPIERRE, que pourtant je n’ai jamais connu. Le projet

profondément perfide de provoquer la guerre avec toute l’Europe

pour nous faire écraser, de mettre à la mode l’immoralité, sous le

nom de

patriotisme exalté

, n’a pas échappé à Robespierre : c’est le

plus grand crime des factions qu’il est venu à bout d’abattre ; mais

tu n’as pas oublié, sans doute, ce qu’il lui en a coûté, qu’il a été au

point de compromettre sa popularité, en s’opposant à la déclaration

de guerre contre l’Angleterre et l’Espagne, projettée par Brissot, à

l’invasion de la Hollande concertée par Dumouriez, à la prédication

de l’athéisme mise à la mode par ceux qui voulaient déshonorer notre

Révolution. Eh bien ! dès ce temps là, j’ai pensé, parlé, écrit dans le

même sens. Je sais bien que dans mon petit coin je ne pouvais pas

faire le même effet que sur un grand théatre ; que je ne pouvais pas

m’expliquer dans un petit article du

Mercure

avec la maire autorité,

la même énergie, la même hardiesse que Robespierre à la tribune

de la Convention. Mais enfin, proportion gardée, je me suis conduit

dans le même esprit ; j’ai marché sur la même ligne, quoiqu’à la

distance nécessaire ; et mes écrits en font foi.

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