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les collections aristophil
littérature
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VOLTAIRE (1694-1778).
L.A.S. « Voltaire », Ferney 6 mai 1761, [à Louis QUARRÉ DE
QUINTIN] ; 3 pages in-4.
3 000 / 4 000 €
Belle lettre en partie inédite, sur son élection à l’Académie de Dijon
.
[Louis QUARRÉ DE QUINTIN (1698-1768) était procureur général au
Parlement de Bourgogne, et un des directeurs de l’Académie de Dijon.]
« Vous êtes je crois le premier procureur general qui ait envoyé des
douceurs et qui en ait dittes à un pauvre homme de lettres comme
moy. Je ne me flattais pas Monsieur que ce serait vous qui me don-
neriez des épices. Je peux vous assurer que je ferai l’impossible pour
venir plaider ma cause devant vous et cette cause est celle des muses
que je cultive et que vous daignez aimer, elles font le bonheur de
ma retraitte et elles font ma gloire depuis qu’on a daigné m’associer
à votre académie. Je n’etais qu’un bourguignon de frontieres et je
suis apresent de la capitale ». Il partirait volontiers pour le remercier
ainsi que le président de RUFFEY, et revoir son vieil ami FYOT DE LA
MARCHE auquel il est « attaché depuis plus de cinquante années [...]
Mais croiriez vous Monsieur que je batis une église, et une grange et
que je vais de l’une à l’autre ? Je suis architecte, sacristain, laboureur
et jardinier, et de plus grand barbouilleur de vers et de prose le tout
avec une santé si mauvaise que je ne peux presque etre trois heures
hors de ma chambre attendu les ordres positifs de TRONCHIN. Cepen-
dant je ferai un effort des que ma petite eglise de village sera finie »…
Correspondance
(Pléiade), t. VI, p. 375 (extraits).
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VOLTAIRE (1694-1778).
L.A.S. « V », Ferney 7 octobre 1761, au cardinal de BERNIS ;
4 pages in-4.
8 000 / 10 000 €
Très belle lettre au cardinal de Bernis, parlant de son travail sur
Corneille
.
« Monseigneur
Béni soit Dieu de ce qu’il vous fait aimer toujours les lettres ; avec ce
goust là, un estomac qui digere, deux cent mille livres de rente, et un
chapeau rouge, on est au dessus de tous les Souverains. Mettez la main
sur la conscience; quoique vous portiez un beau nom, et que vous
soyez né avec une élévation dans l’esprit, digne de votre naissance,
c’est aux lettres que vous devez votre fortune, ce sont elles qui ont
fait connaitre votre merite, elles feront toujours la douceur de votre
vie. Je m’imagine quelquefois dans mes rêves que vous pouriez avoir
des indigestions, que vous pouriez faire comme M. le duc de Villars,
Madame la comtesse d’Harcourt, Madame la marquise de Mui, etc.
etc. etc., qui sont venues voir TRONCHIN comme on allait autrefois à
Épidaure. J’ay aux portes de Geneve un hermitage intitulé les Délices.
[…] Enfin toutte mon ambition est que Votre Eminence ait des indiges-
tions. Cela serait plaisant. Pourquoy non ? Permettez moy de rèver ».
Puis il parle de son travail sur le
Théâtre
de Pierre CORNEILLE : « Votre
reflexion Monseigneur sur la dédicace à l’Académie est très juste, mais
figurez vous que l’Académie, loin de vouloir que j’adoucisse le tableau
des injustices qu’essuia Pierre, veut que je le charge, et cette injonction
est en marge du manuscrit. On est indigné d’une certaine protection
qu’on a donnée à certaines injures, etc. etc.
Permettrez vous que j’aye l’honneur de vous envoyer les commentaires
sur les pièces principales ? Vous avez sans doute votre breviaire de
S
t
Pierre Corneille. Vous me jugeriez et cela vous amuserait. […] Ce
travail est assez considérable, et transcrire est bien long. En attendant
je demande à Votre Eminence la continuation de vos bontez, mais
surtout la continuation de votre philosophie, qui seule fait le bonheur.
Ne bâtissez vous point, ne plantez vous point ? Avez vous une épitre
de moi sur l’agriculture ? Batissez Monseigneur, plantez, etc. Vous
gouterez les joyes du paradis »...
Correspondance
(Pléiade), t. VI, p. 607.