Binoche & Giquello / Sotheby's - BIBLIOTHÈQUE R. ET B. L. - page 32

15. APOLLINAIRE (Guillaume). Lettre-poème autographe signée
Gui
, à Louise de Coligny-Châtillon
(Lou), datée
Nîmes 29 X
bre
1914
, une page 1/4 sur un feuillet in-4, écrite à l’encre brune recto-verso,
sous chemise demi-maroquin noir moderne.
20 000 / 30 000
Beau poème d'amour à Lou.
C
ETTE LETTRE EST ENTIÈREMENT CONSTITUÉE PAR UN LONG POÈME D
'
AMOUR DE
34
VERS
(vers libres, à rimes
plates).
Elle date des premiers temps de la liaison d'Apollinaire avec Louise de Coligny-Châtillon, dite Lou, qu'il avait
connue à Nice en septembre 1914. Engagé volontaire, Apollinaire se trouvait alors incorporé à Nîmes, d'où il
envoie ce poème, qui se situe très précisément entre deux rencontres avec Lou : la première, début décembre,
à Nîmes, et la seconde, le 31 décembre, à Nice (soit deux jours après cette lettre). Ces circonstances expliquent
la tonalité de ces vers, confiants et heureux, qui sont d'un amoureux encore euphorique.
Comme souvent, Apollinaire commence par associer des souvenirs de Lou à ses occupations quotidiennes de
militaire :
Mon Lou la nuit descend tu es à moi je t'aime
Les cyprès ont noirci, le ciel a fait de même
Les trompettes chantaient ta beauté mon bonheur
De t'aimer pour toujours ton cœur près de mon cœur
Je suis revenu doucement à la caserne
Les écuries sentaient bon la luzerne
Les croupes des chevaux évoquaient ta force et ta grâce
D'alezane dorée ô ma belle jument de race
La tour Magne tournait sur sa colline laurée
Et dansait lentement, lentement s'obombrait
Tandis que des amants descendaient de la colline
La tour dansait lentement comme une sarrasine…
Après avoir dit son impatience de la revoir sous peu, il poursuit son contrepoint de petits croquis de ses
camarades de caserne et d'évocations de Lou :
Je pense à tes cheveux qui sont mon or et ma gloire
Ils sont toute ma lumière dans la nuit noire
Et tes yeux sont les fenêtres d'où je veux regarder
La vie et ses bonheurs la mort qui vient aider
Les soldats las, les femmes tristes et les enfants malades
Des soldats mangent près d'ici de l'ail dans la salade
L'un a une chemise quadrillée de bleu comme une carte
Je t'adore mon Lou et sans te voir je te regarde…
Le poème se termine par une belle et poignante image :
Le ciel est plein d'étoiles qui sont les soldats
Morts il
[sic]
bivouaquent là-haut comme ils bivouaquaient là-bas
Et j'irai conducteur un jour lointain t'y conduire
Lou que de jours de bonheur avant que ce jour ne vienne luire
Aime-moi mon Lou je t'adore Bonsoir
Je t’adore, je t’aime adieu, mon Lou ma gloire
Gui
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