118
112. MATISSE.
– RONSARD (Pierre).
Florilège des Amours.
Paris, Albert Skira, 1948. Grand in-4, 185
[dont les pp. 3-4 blanches]-(9 dont les 5 dernières blanches) pp., sans les deux premiers ff. blancs
dont celui compté comme pp. 1-2, maroquin noir, dos lisse, grand décor de rubans de maroquin
rouge ondoyant mosaïqués avec criblés de points dorés, rappel de ce décor en tête et en queue
de dos, n encadrement intérieur de maroquin noir avec listels de maroquin rouge mosaïqué
souligné d’un let doré aux angles, doublures et gardes de daim bordeaux, tranches dorées sur
témoins, couvertures et dos conservés, chemise à dos et rabats de maroquin noir (dos un peu
passé avec petites fentes) doublée de basane brun clair, étui bordé (un peu usagé avec taches au
dos), plusieurs feuillets avec rousseurs marginales, plus fortes sur le frontispice et le titre, reports
d’encre sur quelques feuillets, pièce de papier détachée anciennement placée par la relieuse en
prolongement du dos de la couverture (
Gras
).
14 000 / 18 000
Édition tirée à 320 exemplaires, justi és par Matisse et par l’éditeur, celui-ci le n° 99.
I
LLUSTRATION
DE
128
LITHOGRAPHIES
ORIGINALES
PAR
H
ENRI
M
ATISSE
,
dont 2 à double page (une avec texte), et
23 à pleine page, tirées en sanguine sauf une en noir (Duthuit et Garnaud, n° 25).
U
NE
VASTE
ENTREPRISE
CONDUITE
AU
LONG
DE
SEPT
ANNÉES
.
Matisse envisagea d’interpréter graphiquement
Ronsard au début de 1941, et t le choix de la suite poétique des
Amours
telle que parue dans le recueil des
Œuvres
en 1578. Le travail s’étendit sur de longs mois avec plusieurs interruptions en raison de la guerre,
d’une santé précaire, de dif cultés techniques liées au papier et à la police de caractères, ainsi que de
travaux à d’autres ouvrages comme
Jazz
et les
Poèmes
de Charles d’Orléans. « Je suis chauffé et j’ai le désir de
faire un beau livre », écrivait Matisse à l’éditeur Skira en novembre 1941, et la maquette, de 25 lithographies
prévues au départ, s’enrichit progressivement jusqu’à dépasser les 120. La composition typographique fut
entreprise en 1947 mais véritablement reprise et achevée au printemps 1948, après une fonte spéciale de
police de caractères demandée par Skira et d’ultimes mais importantes modi cations par Matisse.
«
U
N
TRAVAIL
QUI
,
DE
SECONDAIRE
PAR
ESSENCE
,
DEVIENT
UNE
CHOSE
ESSENTIELLE
,
PRINCIPALE
» En novembre 1941,
Matisse écrivait à André Rouveyre : « [Ronsard] chante sa chanson sur tous les tons et il faut que j’en fasse
quelque chose. Je crois que je ferai simplement du Matisse ». Néanmoins, il se réappropria si bien l’œuvre
du poète qu’il pouvait af rmer au même Rouveyre en juillet 1942 : « Je travaille (au lit) à mon Ronsard et je
n’ai aucun moment d’ennui. J’ai piqué au mur devant moi toutes les illustrations avec lesquelles je vis nuit
et jour. J’ajoute, je retranche et je crois que rarement les circonstances ont favorisé ainsi la naissance d’un
travail qui, de secondaire par essence, devient une chose essentielle, principale »
U
N
HYMNE
À
LA
VOLUPTÉ
.
Trois modèles stimulaient alors l’inspiration de Matisse et se retrouvaient
transposées dans nombre de ses peintures, dessins, et ici lithographies : «Elles sont déjà xées pour moi,
les sylphides, dans mon esprit :
Cassandre
, ma princesse Hamidé,
Marie
, Lydia, et,
Hélène
M
elle
Michels ;
à vrai dire pour les deux dernières, il y a souvent interversion jusqu’ici » (à Rouveyre, décembre 1941). Il
s’agit de Lydia Delectorskaya, aide d’atelier de Matisse, de Nézy-Hamidé Chawkat, princesse turque en exil,
et de Jeannie Michels, jeune femme peintre. Le présent
Florilège
, qui donne leur triple visage aux vers de
Ronsard, offre toute la palette de la sensualité : « Il y a des choses un peu fortes de café, tu me diras si c’est
inopportun pour Ronsard [...]. Mes étreintes sont ardentes, mais on ne voit pas un sexe [...]. Chez moi, il n’y
a que le taureau d’Europe, ce bon Jupin qui est bien servi » (à Rouveyre, juillet 1942).
S
PLENDIDE RELIURE MOSAÏQUÉE
SIGNÉE DE
M
ADELEINE
G
RAS
.
Voir aussi la reproduction au verso