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45. BAuDELAIRE (Charles). L
ES
É
PAVES
.
Amsterdam, À l’Enseigne du Coq
[Bruxelles, Poulet-Malassis]
, 1866
.
In-12, demi-veau blond avec petits coins de vélin vert, dos orné à la grotesque, pièce de titre verte, non rogné
(
Reliure de l’époque
).
2 500 / 3 500 €
Édition en partie originale, tirée à 260 exemplaires.
Le recueil contient, outre les six pièces condamnées des
Fleurs du Mal
, dix-sept poèmes nouveaux.
Superbe frontispice gravé à l’eau-forte par
Félicien Rops
, tiré sur chine volant, représentant un tronc-squelette symbolisant la
déchéance de la race humaine et une allégorie duMal et du Péché. La planche est accompagnée d’un feuillet d’explication imprimé
en rouge, tiré sur le même papier.
C’est après leur rencontre à Bruxelles en 1865 que Baudelaire confia à Félicien Rops,
le seul véritable artiste qu’il ait
trouvé en Belgique
écrivit-il dans une lettre à Édouard Manet, le soin de réaliser cette macabre gravure.
un des 250 exemplaires sur vergé de Hollande, second papier après 10 chine.
D
ÉLICIEuX EXEMPLAIRE
,
LE DOS DÉCORÉ À LA GROTESquE DANS LE GENRE DE
N
IEDR
É
E
.
Infime éclat sur la coiffe inférieure.
46. [BAuDELAIRE] — SILVESTRE (Théophile). Lettre autographe signée au commandant Hippolyte Lejosne,
datée
Paris, 26 Décembre 1866
, 4 pages in-8 (209 x 134 mm), sur un bifeuillet, sous chemise demi-maroquin
noir moderne.
1 500 / 2 000 €
E
XTRAORDINAIRE ET BOuLEVERSANT T
É
MOIGNAGE SuR LES DERNIERS MOIS DE
B
AuDELAIRE
.
L
ETTRE ENTIèREMENT INÉDITE
.
Critique d’art, Théophile Silvestre (1823-1876) rencontrait Baudelaire dans le salon des Lejosne, que fréquentaient aussi
Delacroix, Manet et Barbey d’Aurevilly. Il s’adresse ici au commandant Lejosne pour lui donner des nouvelles de leur
pauvre Baudelaire.
Hémiplégique et aphasique depuis mars 1866, Baudelaire avait été ramené à Paris de Bruxelles à la fin
de juin. Ses amis l’avaient fait admettre dans la maison de santé du D
r
Duval, rue du Dôme, où il restera jusqu’à sa mort,
le 31 août 1867. Silvestre avait vu Baudelaire dans un état désespéré, complètement aphasique. On remarquera au passage
que la démarche de Silvestre auprès du poète foudroyé honore grandement le critique : Baudelaire éprouvait parfois
quelque jalousie de voir Silvestre bénéficier plus que lui de l’amitié de Delacroix.
L’extraordinaire récit, très détaillé, d’un déjeuner avec le poète occupe toute la lettre :
Il était fort content, quoique fort
sage et fort sobre.
un détail montre que Baudelaire avait gardé intacte sa passion pour l’art :
Il a passé chez moi
[…],
son
inspection fine et minutieuse, son examen portant particulièrement sur les estampes.
Silvestre précise qu’il n’a pas voulu
lui refuser, après déjeuner un petit verre
[…]
et quelques cigares.
Suit ce passage étonnant et presque amusant, n’était le
tragique de la situation :
Il a d’abord mis, à l’anglaise, son nez dans le goulot de la bouteille et fortement accusé la
médiocrité de ce riquiqui hasardeux, d’un geste expressif. J’ai tiré du placard une autre taupette. Le nez et le cœur de notre
ami se sont épanouis : c’était de la bonne marchandise.
[…]
Puis l’idée de rencontrer d’Aurevilly l’a pris. Il s’est mis à faire
la pantomime et les objurgations d’un orateur très enflé et très rageur. Il a même, pour plus d’intensité, imité l’aboiement
d’un molosse. Et des rires, des rires qui l’ont mis un moment au rang des bienheureux...
Baudelaire accepte le projet de
dîner le lendemain avec les Lejosne, Silvestre et quelques autres convives, puis prend congé :
vers les six heures, il n’a
pas même voulu rester à dîner avec moi. Il a vivement désiré de rentrer rue du Dôme. Il était pressant. Je l’ai reconduit
en voiture, après l’avoir fait raser selon son vif désir.
Silvestre conclut tristement :
En somme, c’est douloureux.
Baudelaire décèdera quelques mois plus tard, le 31 août 1867.