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DIGULLEVILLE, Guillaume de.
Le pelerinaige de lame
.
Paris
, [Pierre Le Caron pour]
Antoine Vérard, 27 avril 1499.
In-folio gothique [246 x 182 mm] de (2) ff. et 84 ff. : maroquin janséniste rouge, dos à nerfs,
dentelle dorée intérieure, tranches dorées sur marbrures
(Thibaron-Joly)
.
Première et unique édition du roman-poème mis en prose par Jean Gallopes.
Au colophon de l’incunable, la complaisante formule “imprimé par Vérard”, et non plus
pour
Vérard,
mérite d’être rectifiée en faveur de Pierre Le Caron dont on retrouve sur le titre le grand L grotesque
gravé sur bois.
Poète normand, le moine cistercien Guillaume de Digulleville (1295-1380) a composé en octosyllabes
trois
Pèlerinages
allégoriques :
de l’homme
,
de l’âme
et
de Jésus Christ
.
Le Pèlerinage de l’âme
a été mis en prose dans les années 1420 par Jean Gallopes à la requête du régent
Bedford. Le vif succès rencontré par l’œuvre est attesté par un grand nombre de manuscrits et par des
traductions, notamment celle imprimée en anglais par Caxton en 1483.
Le Pèlerinage de l’âme.
En songe, l’Âme guidée par son Ange gardien languit au Purgatoire pour mille ans, non sans avoir
entrevu les Limbes et l’Enfer. Le poète a puissamment inspiré l’imaginaire de l’Enfer médiéval par
des scènes d’un réalisme brutal. Les luxurieux, parmi les mieux traités, sont dévorés par la vermine,
déchirés à coups de fourche et de croc. Ils hurlent leur souffrance parmi d’autres damnés éternels :
païens, mécréants, juifs et ministres cupides du roi – suspendus par la langue au-dessus d’un brasier.
Un des huit
exemplaires
connus,
le seul
en mains
privées
Admirable illustration de 28 figures gravées sur bois.
Les compositions de premier tirage ont été conçues pour l’ouvrage ; huit étant répétées.
L’Âme humaine représentée par un personnage nu, muni du bourdon et de la besace, aborde les Limbes
où végètent les enfants morts sans baptême, plus proches du gouffre infernal que du séjour de félicité.
Ces légendes qui, au milieu du XIV
e
siècle, conservent encore l’apparence d’inventions poétiques, sont
représentées comme des vérités dans la prédication au siècle suivant.
“On s’est souvent demandé pourquoi le poème de Dante nous était demeuré si longtemps inconnu :
c’est que nous avions déjà notre Enfer” (Mâle,
L’ Art religieux de la fin du Moyen Âge en France,
1925, pp.467).
Bel exemplaire, à grandes marges, lavé ; le seul encore en mains privées parmi les huit recensés.
Provenance :
Eugène Piot
(cat. 1891, n° 478).- Charles Fairfax Murray (cat.
Early French Books
II, n° 644).
-
Edmée Maus
, avec ex-libris.-
Otto Schäfer
(cat. II, 1995, n° 94 : “Goff’s treatment of this edition as part II
of Verard’s edition of the undated
Pelerinages de la vie humaine
is an error. There is nothing in the title-pages,
quiring, or colophons of the two works to connect them bibliographically.”).-
J.R. Ritman
, avec ex-libris.
Mors supérieur frotté.
Tchemerzine III, p. 650.- GW 11844 : l’exemplaire est cité.- BMC VIII 88.- Goff G-637 : Pierpont Morgan Library.- Bechtel G 355 : l’exemplaire
est cité.- Claudin II, pp. 477-78.- Faral,
Guillaume de Digulleville, moine de Chaalis
in
Histoire littéraire de la France
, tome 39, 1952, pp. 48-72,
129-130.- Arnim,
Katalog der Bibliothek Otto Schäfer
I, 1984, n° 146.
60 000 / 80 000 €