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les collections aristophil
818
VOITURE Vincent
(1597-1648) poète et épistolier, il fut
un
des membres fondateurs
de l’Académie française [AF 1634,
33
e
f].
2 L.A. (minutes, une incomplète du début), Paris 27 février
1648 et s.d., [à Claude de
MESMES
comte d’A
VAUX
] ;
2 pages in-fol. chaque.
2 000 / 2 500 €
Probablement la toute dernière lettre de Voiture, trois mois avant
sa mort
.
[Il s’agit de brouillons, le second signé d’une fermesse ; Étienne
Martin de Pinchesne (1616-1680), le neveu de Voiture, y a porté des
corrections et additions, a biffé d’un trait de plume certains passages
qui sont restés inédits, et a fait de ces deux morceaux une seule lettre
CCXIX des « Lettres de Monsieur de Voiture » dans l’édition originale
posthume des
Œuvres de Monsieur de Voiture
en 1650 chez Augustin
Courbé (p. 787-800).
Voiture est mort le 24 mai 1648. Il fait ici allusion à la disgrâce du
comte d’Avaux, que les intrigues d’Abel Servien ont écarté de la fin
des négociations de Munster.]
« Vous ne pouviez pas mieus tesmoigner la bonne assiette ou est
vostre ame qu’en m’escrivant une lettre comme celle que je viens
de recevoir ; elle semble puisée medio de fonte leporum tant elle
est agreable et fleurie, et il est aisé de voir que cela part d’un esprit
serain, et d’une source tranquille. En verité Monseigneur rien ne vous
pouvoit faire tant d’honneur dans mon esprit que de voir qu’en l’estat
ou sont vos affaires vous sachies rire de la sorte ; cela s’appelle frui
diis iratis, et fortunae minaci mandare laqueum ; vous souvient il du
tems que vous luy prometties des Temples, vous estes bien revenu
de cette idolatrie, et vous vous scavez bien moquer d’elle a cette
heure. Je crois pourtant que pour ce coup elle ne vous fera que
des menaces ; ceux qui cognoissent les gens a qui vous aves affaire
disent qu’encore qu’ilz ne vous veuillent point de bien, ilz ne vous
feront point de mal, et qu’ils ne voudront pas s’exposer à l’envie qu’ilz
encourroient s’ilz traittoient mal un homme qui au jugement de tout
le monde a si bien merité de la France ». Puis il loue la lettre écrite
par le comte au duc de Longueville, et évoque son propre poème
[
Épître à M. le Prince
] : « Je suis ravi que mes vers ne vous ayent
pas desplu, quand je les feis je ne me proposai pas qu’ils deussent
estre examinés par un juge aussi entendu que vous »…
La fin de lettre, collée au feuillet précédent, commence par une page
entièrement biffée d’un trait de plume. Voiture y parle des démarches
qu’il veut faire en faveur du comte : « Moy qui cognois vostre bonté,
vostre franchise et vostre cœur il me semble Monseigneur que je
ferois des merveilles la dessus, et que je pourrois persuader tout ce
que je voudrois » ; notamment auprès du duc de LONGUEVILLE :
« me faisant l’honneur de me tesmoigner fort de m’aymer, et sachant
combien je suis a vous, il trouvera estrange que je ne luy parle de
rien, je pense donc qu’il sera bien que vous m’ordonnies de luy dire
quelque chose de vostre part »… Et il conclut : « Si je m’y cognois
bien vous estes le meilleur et le plus sage homme du monde, mais
vous estes le plus plaisant homme du monde aussi, et l’on ne s’en
douteroit pas »...
819
VOLTAIRE
(1694-1778) [AF 1746, 33
e
f].
L.A.S. « V », « Samedy » [9 août 1732], à Pierre-Robert de
CIDEVILLE, « conseiller au parlement à Rouen » ; 1 page
grand in-8, adresse.
4 000 / 5 000 €
Jolie lettre avec un sizain, à propos de
Zaïre
.
[Pierre-Robert Le Cornier de CIDEVILLE (1693-1776) avait été le
condisciple de Voltaire, et resta son grand ami.
La tragédie
Zaïre
de Voltaire sera créée à la Comédie-Française le
13 août 1732.]
« Messieurs Formond et Cideville
De grâce pardonez au stile
Qui ma Zaire barbouilla,
Lorsqu’etant en sale cornette
A la hate on vous l’envoia
Avant d’avoir fait sa toilette.
Jetois si pressé messieurs mes juges quand je fis le paquet que je
vous envoiay une leçon de Zaire qui n’est pas tout a fait la bonne.
Mais figurez vous que la derniere scene du 3 acte et la derniere du
quatre entre Orosmane et Zaire sont comme il faut. Imaginez vous
qu’Orosmane n’a plus le billet entre les mains et l’a dejà fait donner
à un esclave quand il se trouve avec Zaire à qui il a toujours envie
de tout montrer. Croiez qu’il y a bien des vers corrigez, et que si je
n’etois pas aussi pressé que je le suis vous auriez de moy des lettres
de dix pages ».
Correspondance
(Pléiade), t. I, p. 355.
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