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les collections aristophil
212
692
SAND GEORGE (1804-1876)
Lettre autographe adressée
à son
fils Maurice
[La Châtre : 17 mai 1836], 4 pages
grand in-4 à l’encre. (Déchirure
centrale et léger manque de papier et
de texte)
1 500 / 2 000 €
Belle lettre de mise en garde de George
Sand à son fils Maurice, curieusement en
contradiction avec les aventures roman-
tiques et passionnées de l’auteur.
Note autographe indiquant : « George Sand
à son fils Maurice. Brouillon autographe ».
George Sand à cette époque avait déjà
connu plusieurs amants avec qui elle vivait
à chaque fois une passion sensuelle et idéa-
liste. Cependant elle se devait de dicter une
conduite modèle à son fils pensionnaire. Elle
répond à son courrier adressé le 15 mai 1836
et dans lequel il se plaint des railleries de
ses camarades envers sa mère « parce que
tu es une femme qui écrit … ils te nomment,
je ne pourrai pas te dire le mot parce qu’il
est trop vilain, P… je te le dis malgré moi ».
« Mon cher enfant, le collège est une prison,
et les pions des tyrans. Mais tu vois que
l’humanité est si corrompue, si grossière qu’il
faut la mener avec le fouet et les chaînes.
Je vois que tes camarades ont déjà perdu
l’innocence de leur âge, et que sans un joug
sévère, ils se livreraient à des vices honteux …
il ne faut pas t’en étonner, mais t’en affliger ».
« La vie est une guerre. Souviens-toi que je
t’ai élevé dans des idées de chasteté … sou-
viens-toi de la confiance sans bornes que
j’ai toujours eue en toi … je t’ai confié ta sœur
dès le jour de sa naissance. Je te l’ai donnée
pour filleule, afin de te faire comprendre
que tu dois exercer sur elle, une espèce
de paternité, tu dois être son soutien, son
conseil, son défenseur ». Elle mentionne son
ex-mari, le baron Dudevant : « ton père veut
que tu sois élevé au collège … il a raison. Tout
ce que tu souffres est nécessaire pour que
tu sois un homme, pour que tu apprennes
à discerner le bien d’avec le mal, la vraie
joie d’avec la peine. Il faut que tu t’habitues
à voir combien les hommes sont égarés, et
que tu comprennes les véritables devoirs. »
« Quant à ce qu’on peut te dire sur moi, ne
t’en occupe pas. Je sais que mes écrits font
beaucoup parler, et qu’on parle de même
par curiosité et par oisiveté, de tous les gens
qui écrivent beaucoup. »
Enfin, elle encourage son fils à garder sa
« fierté comme un trésor » et conclut ten-
drement « je te presse dans mes bras avec
amour ».
Superbe document.
Lettre publiée dans la
Correspondance.
Paris,
classiques Garnier, 1991, t. XXV (suppléments)
provenance
Christie’s 26/11/2003 ; ancienne collection
Sacha Guitry, vente Drouot, 21 novembre
1974, lot 86
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SAND GEORGE (1804-1876)
Lettre autographe adressée à
la cantatrice et compositrice
Pauline VIARDOT
S.l., marque postale du 1
er
octobre
1843, 3 pages et demie in-8 sur un
double feuillet. Encre noire sur papier
au chiffre à froid « G.S. ». Adresse
autographe au verso du second
feuillet « Madame Pauline Viardot rue
Favart 12 Paris », marque postale.
2 500 / 3 000 €
Une escapade à Crozant avec Chopin.
« Pauline chérie, nous venons de faire un
petit voyage dans la Creuse pour revoir
les ruines de Crozant, un site sauvage et
horrible, où nous voulions vous conduire et
où nous [vous] conduirons l’année prochaine,
maintenant que nous connaissons des routes
possibles et des gites où, de mémoire
d’homme, aucune voiture ne s’était hasardée,
surtout la nuit, ce dont nous sommes pourtant
sortis miraculeusement sans accident, et
même sans émotion. Nous étions neuf et
nous étions braves. Nous avons couché sur
la paille, voire Chopin qui a affronté tout cela
sans être malade ni fatigué. Monsieur, qui
n’était pas très bien pourtant, s’est brisé de
fatigue […] J’avais reçu votre lettre avant de
partir. Je suis heureuse de voir que tout s’est
arrangé à votre satisfaction et que vous allez
moissonner les roubles et les lauriers. Il dit
que plus il fait froid, plus il fait beau en Russie.
Courage, écrivez-moi, et revenez-nous triom-
phante et vivante de toute votre vie […]. La
maison est restée si grande et si triste sans
vous, et sans notre chère Louisette, que nous
ne pouvons plus y tenir. J’espère qu’elle
ne souffrira pas de votre absence et que
vous la retrouverez encore plus charmante
qu’elle ne l’est maintenant si c’est possible.
N’oubliez pas que c’est à Nohant qu’il faut
la retrouver. Ne vous occupez pas de cette
misère que vous prétendez me devoir. J’ai
été fâchée que vous eussiez remis les 100
fr. intégralement à monsieur. D’après mes
calculs, ils ne devraient pas un cheval de
surplus pour Bouli [Maurice]. Ledit Bouli
m’est revenu d’Orléans sain et sauf quoiqu’un
peu las. Il essaie de se remettre au travail,
mais ce n’est pas sans peine après tant de
joies, de nous et des festins […] Chopin ne
vous embrasse pas, mais il ne vous en aime
pas moins […] »
Lettre publiée dans
Lettres inédites de George
Sand et de Pauline Viardot 1839-1849. Notes
et introduction de Thérèse Marix-Spire
(Paris,
Nouvelles éditions latines, 1959), p. 189 et
suivantes.
provenance
Christie’s France, 29/10/2012
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