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188.
Paul VALÉRY
. 20 L.A.S., 1 L.S. et 1 lettre dactylographiée, 1941-1943, à la comtesse Robert de
B
illy
(2 au
comte) ; 23 pages formats divers, la plupart avec enveloppe ou adresse (2 au crayon).
1 200/1 500
C
harmante
correspondance
du
poète
à
la
châtelaine
de
M
ontrozier
pendant
l
’O
ccupation
.
1941
.
[Montrozier (Aveyron) début septembre].
Il se sent vaseux, mais il est levé depuis 6 h et il travaillote. « M. Rey
doit être le beau-frère de ma fille. S’il est chargé des missions, inutile, je crois, de sonner Albert I
er
»...
Montpellier
[13 septembre]
. Il se sent dépaysé, après avoir pris l’habitude, chez la comtesse, d’être choyé, et « de goûter chaque
jour un mélange délicieux de loisir, de solitude, de compagnie, de vague méditation et de conversation (parfois trop
hardie – je m’en excuse) ; bref, de vivre selon l’amitié la plus simple et la plus harmonique »... Dans son «
Abbaye
aux Dames
», il était « un peu mon Dritte Faust chez les Fées »…
Marseille 17 [septembre]
. Il réitère le charme de
son séjour à Montrozier, « ce temps d’intimité charmante... et de bouillons de légumes ». Il annonce son départ pour
Vichy, « puis Paris, la zone occupée – la scissure. Cependant, il a fallu des catastrophes et cette affreuse mesure pour
que nous nous connaissions mieux »...
Paris 10 octobre
. Il évoque avec reconnaissance son séjour alors qu’il était « en
mauvais état » et « patraque »… Il va recommencer son cours… « Dites mille choses pour moi à Madame la Mer et
à Monseigneur le Soleil. Le 30 de ce mois, il y aura 70 fois que ce grand astre aura joui de ma présence »...
Jeudi
.
Invitation à entendre chez le Dr Bour, « Mary Marquet dire un peu du
Narcisse
», avec des pièces pour flûte et piano
jouées par Gaubert et Maas ; il prie le comte d’appuyer sa demande de « médaille de vieux serviteur » en faveur de
son « antique cuisinière »...
21 décembre.
Il ne veut pas laisser « filer dans le sablier cette mourante et obscure année »
sans rappeler les jours « doux et indisposés […] passés dans l’Abbaye aux Dames, légumes compris »...
1942
.
18 avril
. Il est « en pleine… rogne », ayant reçu son laissez-passer en retard : sa conférence à Lyon, et sans
doute Limoges et la visite à Montrozier sont manqués. « Ah ! Les printemps m’en veulent ! La bêtise des poètes,
d’avoir chanté ces pubertés agrestes ! […] Je mets à vos pieds un nerveux et lamentable vieillard et ami ».
[Limoges
22 mai]
. Instructions concernant divers objets laissés à Montrozier, dont un calepin et des livres (Joyce). Le Dr Périgord
lui a radiographié « ce fameux estomac nerveux. Il a fait mieux. J’espère, grâce à lui, avoir [...] de quoi chausser mes
pieds ! – Quant à la conférence, elle fut ce qu’elle fut. Théâtre plein »...
[Paris]
18 juin
. Il ne sait ce que sera son été,
mais pense au « château ami […] M. votre époux sort d’ici. Je lui ai exhibé de sales manuscrits dont celui de la
J.
Parque
»...
10 août
. Il a eu des ennuis, dont l’hospitalisation de sa fille, « et puis la maudite insomnie. Et je devrais
travailler
plus que jamais
! » Il craint aussi les conditions de voyage : « la vie est impossible aujourd’hui. Pardonnez-moi
de vous écrire dans un flot d’humeur massacrante »...
24 août
. Sur son imbroglio d’été : accident de sa fille, chute de sa
femme, projets de voyage en zone franche, et « peu
de rendement utile. Mais, à quoi ? On m’a refusé
le papier du volume tout prêt »...
2 septembre
.
Mme J.V. [Jean Voilier] ne peut le recevoir à Béduer.
« D’autre part, j’ai ici femme et fille en état peu
prospère ». Mais il espère aller à Montrozier, et « un
peu encore m’abriter sous votre aile, poussin de 71
printemps ! Et de quelle humeur ! Car je suis de la
pire. Le travail en masse mais tant d’autres idées en
tête »...
21 septembre
. Il sera son hôte pour peu de
temps : « Mon papier rouge est consumé aux deux
tiers et je laisse ici beaucoup de travail que ce vilain
été n’a pas voulu accomplir »...
Lundi [19 octobre]
.
Récit de sa nuit de retour en train, où « trois paires de
narines exécutaient en canon dans une atmosphère
sans courant d’air, le Nocturne en dodo mineur » ;
remerciements...
18 novembre
. « Je travaille. Mon
cours reprendra le 9 janvier. Mais il faut faire aussi bien
d’autres choses que j’avais acceptées en prévision
de ma cessation de fonctions ! Figurez-vous que les
M.P. font quelque bruit. Même si à l’Académie et
des gens imprévus se réjouissent ou se scandalisent
de les avoir lues... Un directeur connu de théâtre de
genre veut absolument que je fasse qq. chose pour
lui »...
[4 décembre]
. Évocation d’un dîner donné par
M. Gay au Fouquet : « Il y avait aussi des frites, chose
presque fabuleuse »...
28 décembre
. « Je trébuche
d’incidents fâcheux en incidents pénibles. Pas assez
de globules rouges et trop de blancs. Bref, on se
délabre, et l’esprit ne se reconnaît guère plus dans
ce qu’il tente de faire. Rien de plus déprimant que
ces offensives de travail presque aussitôt arrêtées,
noyées dans le vague et l’ennui »...