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les collections aristophil
d’hommes du droit naturel d’être libres […] En Pologne, il n’y a que
des Tyrans et des Esclaves : la Patrie n’a donc point d’enfants pour
la deffendre. […] Ces puissances qui sous prétexte de rétablir la paix
dans vos provinces désolées y sont entrées les armes à la main,
ne veulent que les envahir et vous reduire en servitude ». C’est au
peuple à prendre en mains son destin, et à se révolter : « Il faut porter
la cognée à la racine. Il faut faire connoitre au peuple ses droits et
l’engager à les revendiquer ; il faut lui mettre les armes à la main, se
saisir dans tout le royaume des petits tyrans qui le tiennent opprimé,
renverser l’édifice monstrueux de votre gouvernement, en établir un
nouveau sur une base équitable »...
Le dialogue continue par un intéressant portrait critique de FRÉDÉRIC
II, puis par un violent réquisitoire contre les rois et les princes qui
« doivent à leurs peuples l’exemple des bonnes mœurs et des vertus »,
mais donnent celui des vices et de la débauche ; qui « doivent tout
leur tems à l’État » mais le passent dans l’oisiveté et les plaisirs ; qui,
au lieu d’être « les économes des revenus publics », les dépensent
en « scandaleuses prodigalités » ; qui, au lieu de cultiver la paix, « ne
mettent leur gloire qu’à épouvanter la terre » et répandre la terreur :
« Au lieu d’être les Ministres de la loi, ils s’en rendent les maîtres, ils ne
veulent voir dans leurs sujets que des esclaves, ils les oppriment sans
pitié, et les poussent à la révolte : puis ils pillent, dévastent, égorgent,
répandent partout la terreur et l’effroi, et pour comble d’infortune,
insultent encore aux malheureux qu’ils tiennent opprimés. Ainsi un
seul homme que le Ciel dans sa colère donne au Monde, suffit pour
faire le malheur de toute une Nation »…
Citons le biographe de Marat, Gérard Walter : « Voilà comment un
petit médecin-vétérinaire, perdu au fond d’une province anglaise
et pris dans l’engrenage d’un labeur obscur et quotidien, jugeait
les hommes et les événements, dont il ne percevait que les échos
lointains et diffus ».
Le manuscrit est rédigé à l’encre brune sur 111 bifeuillets de papier vergé
de Hollande filigrané
Van Der Ley
, numérotés de [1] à 111, le premier
ayant été en partie déchiré et doublé ; la page [1] porte le titre : «
Les
Avantures / du / Jeune Conte Potowski
», et la 2
e
l’
Avis au Lecteur
:
« Ces lettres, éparses entre tant de mains, ont été rassemblées par
un heureux hazard. L’éditeur n’a d’autre part à cet ouvrage que de
les avoir traduittes, et placées selon l’ordre des tems ». Le dernier
feuillet, avec la fin du texte (cinq lignes selon Paul Lacroix), a disparu.
Le manuscrit, très bien conservé, est très lisible, de l’élégante et
régulière écriture de Marat, qui a légèrement plié chaque page sur
la gauche pour marquer une marge. Il comporte cependant plus de
cinquante lignes biffées et près de 700 corrections avec ratures, avec
quelques additions en marges.
Les lettres sont numérotées de I (Gustave Potowski à Sigismond Panin)
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