80
les collections aristophil
Belle évocation de Tristan et Iseult
: « Derrière les tours bien closes,
Iseult la Blonde languit aussi, plus malheureuse encore
: car, parmi
ces étrangers qui l’épient, il lui faut tout le jour feindre la joie et le
rire
; et, la nuit, étendue aux côtés du roi Marc, il lui faut dompter,
immobile, l’agitation de ses membres et les tressauts de la fièvre.[…]
J
e
suis
changé
de
fond
en
comble
– ce que tu ne pouvais pas croire
de moi jadis je te demande de le croire maintenant avec la même
foi qui me mêle à ta personne comme les anneaux de la bague
»....
Les commérages, les bruits qui courent et la jalousie de Marie-
Laure de Noailles font fuir Natalie en Suisse, et Cocteau s’inquiète
:
«
N’était-il pas naturel que je m’effraye – moi dont le rêve sur la
terre est d’avoir un fils de toi – lorsque je t’entends parler de crimes
contre ce Dieu que tu invoques aujourd’hui et contre ce mystère dont
tu parles et que tu voulais détruire
»
; il souffre atrocement
: «
Je te
conjure de ne pas me tuer […] Moi qui
me crèverais les yeux
, qui
me
couperais la langue pour toi
. Comment peux-tu mettre en balance
des potins mondains ?
»… Dans une autre lettre, il se fait plus précis
:
« Un enfant dont j’adore t’entendre parler maintenant comme d’un
mystère entre le ciel et nous – rappelle-toi que, la semaine avant ce
départ atroce – tu en parlais comme d’une chose immonde, une
chose à redouter et à supprimer coûte que coûte, une chose sans
valeur – qui t’appartenait du reste et en m’appartenait pas
»…En août,
arrivent les reproches
: « Jamais tu ne me parles de l’essentiel – notre
pacte d’amour – et tu escamotes les détails de ta grossesse. Était-elle
nerveuse
? – fausse couche
? – as-tu agi
? […] mon amour s’inquiète
atrocement
»… Les BOURDET organisent un grand bal costumé dans
leur villa de Tamaris, où il n’a guère le cœur d’aller
: Jean-Michel
FRANK «
va venir en Polaire-Claudine (sic) […] C’est lugubre. À 6
heures, COLETTE le maquille à St-Tropez. Pauvre Colette – peut-on
ainsi gâcher, bafouer ses souvenirs. Il est vrai que les souvenirs de
Willy sont d’un ordre que rien de sacré ne protège
»…
Il travaille à
la Machine infernale
: « Hygiène productif. J’ai fait mon
acte III et commencerai ce soir mon Épilogue […] Sans Boris Bébé
est adorable, couche ici, travaille à mes décors […] Si tu étais avec
nous ce serait le Paradis terrestre ou céleste […] Le pauvre J. Michel
Frank est devenu exhibitionniste
»… – « Je suis seul – Délivré – un peu
“trop léger” après avoir fini fini jusqu’à la dernière ligne de l’Épilogue
– mon seul rêve serait que cet énorme calvaire d’Œdipe te plaise et
que je puisse te le lire d’un coup sans avoir trop envie de le lâcher,
de t’embrasser, de te prendre dans mes bras et de “partir” loin du
théâtre. […] Je t’aime chaque jour davantage et mieux
». Il a décoré
la chambre blanche avec «
tes gants, tes profils, tes bagues, et la
merveille des merveilles, ma Natalie petite
»…
Octobre
. Au dos d’une carte d’invitation de Maxim’s pour le « Souper
1900
», il parle à « Mon ange d’Este
» (elle séjourne à l’hôtel Villa d’Este
sur le lac de Côme) de la maladie de son chien Petit Crû, dont il lui