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SCIENCES

coutume de s’entendre ; mais c’est juste-

ment parce qu’il y a ce que j’ai appelé les

vérifications qui jugent en dernier ressort et

devant lesquelles tout le monde s’incline.

Mais là où ces vérifications font défaut, les

mathématiciens ne sont pas plus avancés

que de simples philosophes. Quand il s’agit

de savoir si un théorème peut avoir un sens

sans être vérifiable, qui pourra juger puisque

par définition on s’interdit de vérifier. On

n’avait plus de ressource que d’acculer son

adversaire à une contradiction. Mais l’expé-

rience a été faite et elle n’a pas réussi. On

en a signalé beaucoup, des antinomies, et

le désaccord a subsisté, personne n’a été

convaincu ; d’une contradiction on peut

toujours se tirer par un coup de pouce ; je

veux dire par un distingo ».

L’espace et le temps

. « Une des raisons qui

m’ont déterminé à revenir sur une des ques-

tions que j’ai le plus souvent traitées, c’est

la révolution qui s’est récemment accomplie

dans nos idées sur la Mécanique. Le principe

de relativité, tel que le conçoit LORENTZ

ne va-t-il pas nous imposer une concep-

tion entièrement nouvelle de l’espace et du

temps et par là nous forcer à abandonner des

conclusions qui pouvaient sembler acquises.

N’avons-nous pas dit que la géométrie a

été construite par l’esprit à l’occasion de

l’expérience, sans doute, mais sans nous

être imposée par l’expérience, de telle façon

que, une fois constituée, elle est à l’abri de

toute révision, elle est hors d’atteinte de nou-

veaux assauts de l’expérience ; et cependant

les expériences sur lesquelles est fondée la

mécanique nouvelle ne semblent-ils pas

l’avoir ébranlée ? »... Et il conclut : « Quelle

va être notre position en face de ces nou-

velles conceptions ? Allons-nous être forcés

de modifier nos conclusions ? Non certes,

nous avions adopté une convention parce

qu’elle nous semblait commode, et nous

disions que rien ne pourrait nous contraindre

à l’abandonner. Aujourd’hui certains physi-

ciens veulent adopter une convention nou-

velle. Ce n’est pas qu’ils y soient contraints ;

ils jugent cette convention nouvelle plus

commode voilà tout ; et ceux qui ne sont pas

de cet avis, peuvent légitimement conserver

l’ancienne pour ne pas troubler leurs vieilles

habitudes. Je crois entre nous que c’est ce

qu’ils feront encore longtemps ».