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71*. TRÈS INTERRESSANTE LETTRE DE LA REINE

MARIE-ANTOINETTE À SON FRÈRE L’EMPEREUR

D’AUTRICHE.

MARIE-ANTOINETTE, reine de France.

L.A.S.

Marie-Antoinette

, ce 4 octobre 1791 adressée à son

frère, l’empereur Léopold II d’Autriche (1747-1792); 2 pages

½, in-folio.

Pliures, légères déchirures, mais bon état.

3 000/5 000 €

«Je n’ai de consolation qu’à vous écrire, mon cher frère, je suis entourée de

tant d’atrocités que j’ai besoin d

e toute votre amitié pour reposer mon esprit ;

j’ai pu par bonheur inouï voir la personne de confiance du comte de M (le

comte Florimond de Mercy-Argenteau (1727-1794)), mais je n’y suis parvenue

qu’une fois sûrement ; elle m’a exposé des pensées du comte qui se rencontre avec

beaucoup de ce que je vous ai déjà dit ces jours derniers ; depuis l’acceptation de la

constitution le peuple semble nous avoir rendu sa confiance, mais cet évènement

n’a pas étouffé les mauvais desseins dans le cœur des méchants, ils seroit impossible

qu’on ne revienne pas à nous si l’on connoissoit notre véritable manière de penser,

mais malgré cette sécurité du moment, je suis loin de me livrer a une confiance

aveugle ; je pense qu’au fond le bon bourgeois et le bon peuple ont toujours été

bien pour nous, mais il n’y a entre eux nul accord, et il n’en faut pas attendre ; le

peuple, la multitude sent par instinct et par intérêt le besoin de s’attacher à un chef

unique, mais ils n’ont pas la force de se débarrasser de tous les tirans de populace

qui les opprime n’ayant point d’unité, et ayant à lutter contre des scélérats bien

d’accord qui se donnent d’heure en heure le mot d’ordre dans les clubs, et puis

on les travaille sans cesse, on leur glisse avec perfidie des soupçons contre la bonne

foi du roi et l’on viendra aussi à bout de soulever de nouveaux orages, si cela

arrive comme je le crains, car encore une fois je ne me laisse pas prendre à cette

ivresse du moment, les malheures seront encore plus grands, car il sera lors plus

difficile de reconquérir la confiance perdue, et le peuple qui se croiroit trompé

tourneroit contre nous. C’est un motif de plus de redoubler de soins pour profiter

du moment, s’il est possible, il le faut puisque l’autorité royale échappe et que

la confiance publique est le seul frein à opposer aux envahissements du corps

législatif. Mais comment profiter de la confiance du moment, là est la difficulté.

Je pense qu’un premier point essentiel est de régler la conduite des émigrants. Je

puis répondre des frères du Roi, mais non de Mr de Condé. Les émigrants rentrant

en armes en France tout est perdu, et il seroit impossible de persuader que nous

ne sommes pas de connivence avec eux. L’existence d’une armée d’émigrants sur

la frontière suffit même pour entretenir le feu et fournir aliment aux accusations

contre nous. Il me semble qu’un congrès faciliteroit le moyen de les contenir. J’en

ai fait dire ma pensée à Mr de M… pour qu’il vous en parlat, mon cher frère,

cette idée d’un congrès me sourit beaucoup, et seconderoit les efforts que nous

faisons pour maintenir la confiance. Cela d’abord je le répète contiendroit les

émigrants et d’un autre côté feroit icy une impression dont j’attends du bien, je

remets cela à vos lumières supérieures, on est de cet avis auprès de moi et je n’ai

pas besoin de m’étendre sur ce point ayant tout fait expliquer à Mr de M… Adieu

mon cher frère, tous nous vous aimons et ma fille m’a chargé particulièrement

d’embrasser son bon oncle

». 

Provenance :

ancienne collection d’un des pages de la reine Marie-Antoinette, le

Marquis Charles de Biencourt (1747-1824).

Présentation

 :

cette lettre fut en partie publiée dans l’ouvrage des frères

Goncourt : Histoire de Marie-Antoinette, publié à Paris aux éditions Firmin

Didot en 1858, page 287, 288 et 289.

72*. GONCOURT Edmond et Jules.

Histoire de Marie-

Antoinette,

publié à Paris par la Librairie Firmint-Didot,

1858, 429 pages dorées sur tranches, demi-reliure d’époque

en maroquin rouge, dos à nerfs orné de croix, titre en lettres

d’or, rousseurs, mais bon état dans l’ensemble.

Dans cet

ouvrage sont reproduites les cinq lettres autographes signées

par la Reine Marie-Antoinette que nous vendrons ci-dessus

du n°66 au n°70.

150/200 €

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