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sont

tous

. S’il est radicalement fripon comme ils le sont

presque tous

, il te dira qu’il n’a rien vendu et te demandera encore des

indemnités pour s’être chargé de tout cet embarras. Car enfin, la surveillance de l’impression, l’emmagasinement des exemplaires,

les démarches auprès des débiteurs en détail, &c. tout cela représente une peine qui demande salaire. Les moyens de contrôle sont

impossibles ». Ainsi, elle pense qu’on la « trompe épouvantablement sur le tirage de

Consuelo

en volumes in-8º. Mais je ne puis

le prouver et il faut que j’aie l’air de ne pas m’en douter. Il y a de grands éditeurs tels que Gosselin &c. d’honnêtes éditeurs tels

que Perrotin qui fait mon édition populaire. Mais ceux-là ne veulent point faire de petites opérations. Elles leur prennent trop de

tems et nuisent aux grandes.

P

errotin

ne veut plus éditer un à un les romans que je publie en

in-8º

depuis qu’il a commencé mon

édition complète

in-18

 ». Cela risque donc de coûter 2 500 à 3 000 fr. par volume, « sans beaucoup d’espoir d’être indemnisée par

la vente. Si le roman a du succès, tu trouveras des éditeurs sans peine, et le second roman marchera tout seul ». Mais on ne sait à

quoi tient le succès : « Avant tout, il faut amuser le lecteur, ou l’étonner »...

Elle a réabonné Rozanne à la

Revue indépendante

, que ne dirige pas Anselme Pététin, « mais deux hommes qui sont dans les

mêmes idées et les mêmes sentiments qui ont gouverné la revue jusqu’ici.

L

eroux

leur a donné cette direction qui lui prenait trop

de temps, et l’empêchait d’écrire et de faire paraître avec exactitude. Ces Messieurs ont apporté des fonds, et nous ont mis à même

de faire un cautionnement et de paraître tous les 15 jours. Leroux continue à y écrire comme par le passé, et moi aussi assidûment,

Consuelo

étant encore destinée à faire beaucoup de numéros. J’y vais mettre aussi des morceaux qui ne seront pas de sitôt publiés

à part. Enfin je crois que si cette revue t’a intéressée jusqu’ici, elle ne t’intéressera pas moins à l’avenir et j’y porte quant à moi le

même intérêt de cœur et le même zèle »...

Correspondance

, V, 2533.

159.

George SAND

. L.A.S., [Nohant 27 mai ? 1847], au peintre Auguste

C

harpentier

 ; 2 pages et demie à son petit

chiffre gothique, adresse (légère fente, plis).

800/1 000

L

ettre

inédite

au

peintre

de

son

célèbre

portrait

(peint en 1838, et exposé avec succès au Salon de 1839 ; Musée Carnavalet,

en dépôt au Musée de la vie romantique).

« Mon cher Charpentier, je n’ai jamais beaucoup insisté auprès de vous pour reprendre le beau portrait que vous avez fait de moi.

Je vous l’ai laissé tant qu’il a pu vous être utile de l’avoir chez vous, mais j’y tiens, malgré tout, et vous n’en avez plus besoin.

Depuis longtems votre réputation et votre position sont faites. Ma fille qui est nouvellement mariée et qui s’installe avec moi à

Nohant, désire vivement, ainsi que son mari qui est artiste, inaugurer cette belle toile chez nous. Ils vont donc vous la demander

en mon nom, et je serai bien aise qu’ils fassent ou renouvellent connaissance avec vous. Nohant a pris une meilleure tournure

depuis que vous n’y êtes venu, et les portraits de mes deux enfans y sont

honorés

comme ils le méritent ». Elle espère le voir lors

d’un prochain voyage à Paris...

Reproduction page précédente

160.

George SAND

. L.A. (signée d’un paraphe), Nohant 10 mai 1849, à Pauline

V

iardot

 ; 4 pages in-8 à son petit chiffre

gothique.

1 500/2 000

B

elle

lettre

à

son

amie

chanteuse

,

qui

triomphe

dans

L

e

P

rophète

de

M

eyerbeer

,

au

sujet

du

choix

d

un

piano

pour

N

ohant

.

« Ma fille chérie, je crois que

P

leyel

pourra parfaitement me fournir pour 7 à 800 f. un très bon pianino non pas tout neuf, mais

presque neuf, parmi ceux qu’il loue et qui lui rentrent chaque jour. Il m’en a souvent loué à Nohant et à Paris de très bons, et au

bout de deux ou trois mois de service, il les laissait pour 800, 700, 600 f. aux personnes qui les demandaient. J’en ai vendu un

excellent à Majorque 600 f. avec son autorisation. S’il savait que c’est pour moi, il choisirait lui-même un bon instrument. Mais

voilà justement ce que je ne veux pas qu’il sache. Vous pourriez tout arranger en lui disant que c’est un cadeau que vous voulez

me faire, et pour vous, il choisirait bien, car il sait bien ce qu’il vend. Vous lui fixeriez votre maximum à 750 f., votre minimum à

700. Tâchez de faire ce choix tout de suite, ma mignonne, parce que voilà Duvernet qui arrive et qui va m’enlever celui que je lui

ai vendu, or j’ai deux ou trois heures par jour où je suis comme une âme en peine, quand je ne peux pas faire de fausses notes ».

Elle recommande à « ce pauvre bêtat de Loulou » (Louis Viardot, le mari de Pauline) de « sucer du camphre » pour ne pas attraper

la cholérine : « Il n’y a que le camphre et Raspail est son prophète ». Elle s’inquiète aussi de savoir si sa rente a été vendue, dans la

situation actuelle, avec les événements d’Italie et les discussions parlementaires… « Et pourtant, à propos d’événements politiques,

je les prends tous au sérieux quand Maurice [son fils] est à Paris. J’ai toujours peur qu’en allant flâner où l’on se bouscule, car

il est curieux comme un peintre, il n’attrape quelque horion, ou quelque stupide arrestation de mouchards. Je veux qu’il soit

indépendant de moi, et pourtant je voudrais l’avoir toujours près de moi. Je ne sais comment arranger cela. Quand vous le voyez,

conseillez-lui la prudence ».

Puis elle évoque les succès de la cantatrice : « 

Le

Prophète

va-t-il toujours bien ? […] Êtes-vous toujours contente ? Je ne vous

demande pas si vous êtes toujours admirable. Dernièrement je rompais beaucoup de lances pour

M

eyerbeer

avec quelqu’un qui

parlait avec tant d’assurance que je n’osais trop soutenir mon dire devant un si fort musicien. Voilà qu’il se met à chantonner un

pont-neuf si mal, si faux, si à contre-mesure, si à contresens, que je n’ai pas pu m’empêcher de rire bien fort, et de lui dire : Ah

mon bon ami, si tous les critiques sont de votre force,

Le

Prophète

peut s’en moquer. – C’est comme cela que les trois quarts des

amateurs sont compétens. Heureusement tous, ceux qui s’y connaissent comme ceux qui ne s’y connaissent pas, sont enthousiastes

de vous. Ils voient que vous êtes superbe comme tragédienne, ils entendent que vous avez une voix divine. C’est toujours cela »...

Correspondance

, IX, 4211.