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Un papillon imprimé à l’adresse de la galerie Simon a été monté sur le titre : relancée par Kahnweiler en 1920,

la galerie devint le distributeur de l’ouvrage imprimé par François Bernouard.

Bel exemplaire, non coupé.

De la bibliothèque

ML Hermanos

, avec ex-libris.

(Dussert,

Une forêt cachée, 156 portraits d’écrivains oubliés,

2013, pp. 285-287.-

Anthologie du livre illustré par

les peintres et sculpteurs de l’École de Paris,

nº 83.-

Un certain Derain,

1991, nº 47.)

3 000 / 5 000

Au bonheur du lecteur

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DAUDET (Alphonse).

Lettre adressée à Émile Zola.

Sans lieu ni date

[mars 1883].

Lettre autographe signée “Alphonse Daudet” ; 2 pages in-12.

Superbe et fraternelle lettre de félicitations d’un lecteur enthousiaste.

Ayant reçu

Au bonheur des dames

la veille, Daudet l’a lu dans l’après-midi, “

d’une happée.

Ce qui me frappe d’abord, c’est le bien établi de l’œuvre. Vous n’en avez pas, à mon sens, d’aussi largement et

solidement architecturée. L’Assommoir lui-même ne m’a pas donné cette impression de grandiose et de sécurité, cette

vibration lente et puissante d’un gigantesque ascenseur vous hissant sans arrêt jusqu’aux combles du bonheur des

dames dans le fracas, la cohue, la bousculade des rayons, le miroitement des étalages, et l’étourdissante montée des

quatre chiffres d’inventaire dont le dernier million éclate comme une bordée d’artillerie.

Cela est très beau, très fort ; et ce qui m’enchante c’est que l’étoffe n’a pas tout mangé – comme vous en aviez peur –

et que l’éblouissement de vos mises en vente ne m’empêche pas de voir cette vieille barbe de Bouras

[sic],

Geneviève

Baudu et son Colomban, les Robineau, tout ce grouillement d’infusoirs qui fait grésiller chaque page de votre livre.

Vous avez un très grand succès ; mais il ne sera jamais trop grand pour vous payer de cet effort de création. Et quand

je pense qu’on appelle cela un roman, et qu’on appelle aussi roman la Criquette d’Halévy, morte pendant la guerre,

aux ambulances, peuchère ! amoureuse d’un zouave de charrette ambulancière, cabotine, et pour zouaves pontificaux !

O Maladie !

Zola, mon vieux, je vous embrasse de tout mon cœur.

Alphonse Daudet

Ma femme veut que je rouvre ma lettre pour vous dire la joie que lui a faite le roman qu’elle a lu feuilleton par

feuilleton et qu’elle a repris en volume. Elle envoie à Madame Zola ses félicitations bien affectueuses.

En dépit de divergences politiques (Daudet était légitimiste) et des intrigues de Mme Daudet et d’Edmond

de Goncourt, les deux écrivains demeurèrent amis. Méridionaux, nés la même année, ils ne furent séparés que

par la mort de l’auteur des

Lettres de mon moulin.

À ses obsèques, le 20 décembre 1897, Émile Zola fut chargé

par la famille de prononcer l’éloge funèbre au cimetière du Père-Lachaise : “Daudet a été ce qu’il y a de plus

rare, de plus charmant, de plus immortel dans une littérature : une originalité exquise et forte, le don même de

la vie, de sentir et de rendre, avec une telle intensité personnelle, que les moindres pages écrites par lui garderont

la vibration de son âme jusqu’à la fin de notre langue.”

(Graham,

Passages d’encre,

nº 73 : le bibliographe fait observer que trois semaines après la mort de Daudet,

conservateur nationaliste, et le bel éloge funèbre de Zola, ce dernier publiait

J’accuse

.)

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